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Théodore Désorgues



Les transtéverins ou les sans-culottes du tibre - Poéme


Poéme / Poémes d'Théodore Désorgues





Rome fêtait
Simon : un peuple fanatique
Inondait à grands flots sa vaste basilique ;
L'étranger dans ses murs volait de tous côtés
Pour voir l'ordre pompeux de ses solennités :
Et moi, loin de la foule, errant sur ses collines,
J'allai dans le silence admirer ses ruines.



Viens, me dit mon ami, viens : jamais ces remparts
D'un si riche appareil n'ont frappé des regards.
L'airain sacré t'appelle à cette auguste fête ;
De ce dôme éclatant vois-tu parer le faîte ?
Il doit ce soir, orné de mille feux divers.
Tel qu'un globe enflammé s'élever dans les airs;
Courons au
Vatican : le pontife lui-même
Y marche le front ceint du triple diadème,
D'un cortège nombreux il prie environné,



Et bénit à l'autel le
Romain prosterné.

Ah ! lui dis-je, plutôt dédaignons ces prestiges,

Cherchons une autre
Rome et de plus grands prodiges.

Qu'au temple de l'apôtre un pontife orgueilleux

De son coupable encens déshonore les cieux,

Irais-je, me mêlant à la foule insensée,

De superstitions attrister ma pensée ?

Quand je puis sur ces monts, parmi ces monuments,

Régénérer mon cour par de grands sentiments !



A ces mots, je m'éloigne, et mes regards avides
Recueillant, en passant, des souvenirs rapides.
Là, disais-je, les rois, proscrits, chargés de fers,
Venaient au
Capitole étaler leurs revers ;
Ici, des nations réglant les destinées,
Rome voyait passer les villes enchaînées.
Tout parlait à mon cour, tout m'offrait un grand nom :
Chaque pierre à mes yeux dictait une leçon.



Ah ! m'écriais-je, ému par tant d'objets célèbres,
Si parmi ces tombeaux, ces monuments funèbres,
Sous ces arcs triomphaux s'offrait à mes regards,
Quelque auguste débris des descendants de
Mars,
Qu'avec transport j'irais, reconnaissant le
Tibre,
Presser ces vieux
Romains, reste d'un peuple libre !
De mes bras étendus je suppliais les cieux
De ne point rejeter le plus doux de mes voux ;
Soudain je vois ce pont où l'invincible
Horace À
Porsenna vainqueur opposa son audace.
J'aperçois l'Aventin, où le peuple autrefois
Contre l'oppression vint réclamer ses droits ;
Où de
Valerius la paisible éloquence
De
Rome et du sénat resserra l'alliance.
Ce mont, en tous les temps, cher à la liberté.
D'un peuple indépendant est encor fréquenté.
Là,
Rome de ses fils a rassemblé l'élite ;
Là, des
Transtéverins ' repose la limite.



Tel qu'un vieil obélisque, épargné par les ans,
Qui voit autour de lui rouler l'ordre des temps,
Au milieu des débris de la grandeur romaine



Ce peuple élève encor sa tête souveraine,
Séparés par leurs murs de ces tyrans cloîtrés,
De ce troupeau rampant de
Vandales mitres,
Sous les grossiers lambeaux de l'obscure indigence
Ils ont su conserver leur mâle indépendance.
Avec
Rome elle-même ils n'ont pu s'abaisser,
Tant un grand caractère est lent à s'effacer !



Ah ! ne jugez pas d'eux par cette foule impure
D'ambitieux dévots, enrichis d'imposture,
Qui, dans le
Vatican, aux intrigues nourris,
Obtiennent un chapeau pour vingt ans de mépris !
Par ces lâches flatteurs dont la bouche vendue
Du pontife, à grands cris, annonce la venue.
Et par ces vils brigands, ces pieux meurtriers
Qui du parvis de
Pierre assiègent les piliers.
Et du crime impuni montrant l'affreux exemple,
Lavent leurs bras sanglants sur les degrés du temple.



Ah ! les
Transtéverins, plus fiers, plus généreux,
N'abaissent point ainsi l'honneur de leurs aïeux :
Ils ignorent l'intrigue; et d'une main avare
Ils n'ont jamais flatté l'orgueil de la tiare.
Quand sur eux, en marchant, le pape étend les bras,
Bénis, lui disent-ils, passe et ne reviens pas.
Ils blâment hautement son lâche despotisme,
Son faste, ses projets, son fatal népotisme ;
Et ce peuple, à sa mort, sans plaisir, sans chagrin,
Du
Capitole en deuil entend gémir l'airain.



Eh !
Pourquoi voulez-vous que leur rudesse austère
De leurs aïeux n'ait point gardé le caractère!
Le sacré despotisme, en corrompant leurs lois,
A sans doute altéré la chartre de leurs droits ;
Mais leur sang pur toujours transmis par des
Romaines,
Avec leur noble orgueil a coulé dans leurs veines ;
Et souvent l'étranger, en contemplant leurs traits,
Des demi-dieux du
Tibre a cru voir les portraits.
Leurs noms, riche héritage, annoncent leur naissance :
Quand d'utiles travaux exercent leur constance,
Accourez sur ces monts, vous entendrez
Brutus,



Vous y verrez bêcher le vieux
Cincinnatus.

La main d'Agricola sème ce champ fertile,

Ces boufs sont à
Gracchus, ce char est à
Camille.

Qui d'un bois arrondi frappe ce but roulant?

L'écho fidèle au loin redit
Coriolan.

Dans le sein de l'Eglise, au milieu des mystères,

Ils conservent les mours, les fêtes de leurs pères.

Ils appellent encore à leurs banquets joyeux

Enée et les
Troyens, pères de leurs aïeux ;

De fleurs, couchés sur l'herbe, ils couronnent leur coupe,

Et pour d'illustres jeux ils rassemblent leur troupe ;

L'un déploie en luttant la vigueur de son corps.

De ses muscles tendus fait mouvoir les ressorts,

Et sous des coups nouveaux prend des forces nouvelles.

Que de souples
Darès ! que de nerveux
Entelles !

L'autre exerçant ses pieds à d'agiles combats.

Vers le but éloigné précipite ses pas.

Nisus à son rival rend sa chute fatale,

Et se relève encor pour son cher
Euryale.

Celui-ci dans les airs fait bondir un ballon ;

Marius le reçoit, et le rend à
Caton ;

Celui-là courbe un arc, joint l'adresse à la force.

Et d'un ormeau qui tremble il traverse l'écorce.

Ainsi, les fiers
Toscans, les antiques
Sabins

Aux durs travaux de
Mars préparèrent leurs mains ;

Ainsi,
Rome autrefois en héros si féconde

Préluda par ces jeux à l'empire du monde.

Là revivent encor ses usages, ses dieux,

La source d'énergie obtient toujours des voux :

Ils n'ont point oublié les déités champêtres;

Ils offrent à
Paies les dons de leurs ancêtres :

Mais de
Bacchus surtout ils attestent le nom,

Et d'un culte annuel honorent sa boisson.

À peine au carnaval reviennent ses orgies

Que d'un nectar nouveau ses ménades rougies

Volent, le thyrse en main, sur des chars enflammés,

Et promènent trois jours ses jeux accoutumés :

Le peuple alors reprend l'autorité suprême.



Abaisse devant lui le triple diadème,
Le barigel lui-même exécute ses lois,
Et le front découvert il proclame ses droits.





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Théodore Désorgues
(1764 - 1808)
Portrait de Théodore Désorgues


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