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La crise du langage


Poésie / Poémes d'Samuel Beckett





Beckett impose au langage dramatique traditionnel des modifications considérables. Pendant des siècles, un « beau » texte théâtral fut en effet un texte « bien » écrit. Le mot devait être juste, précis, et, du moins pour la tragédie, relever du registre noble ou soutenu. C'était la conception qu'en avait par exemple l'époque classique au xvii" siècle: « Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,/ Et les mots pour le dire arrivent aisément », écrit Boileau (1636-1711) dans son Art poétique (1674). Celle-ci impliquait donc une confiance absolue dans le langage, jugé apte, si on le maniait correctement, à tout signifier et tout dévoiler.



Cette confiance, Beckett (et, avec lui, tout le théâtre contemporaiN) ne la partage pas. Loin d'être transparent, le langage lui semble problématique: sa maîtrise ne va pas de soi et encore moins ce qu'il est censé dire, signifier. C'est ce qu'on appelle la « crise du langage ». Il la met en scène en pulvérisant le langage, en l'appauvrissant et le vidant de tout sens.



LA PULVÉRISATION DU LANGAGE

La dislocation des mots, l'hésitation à parler et l'introduction de nombreux silences sont les principales caractéristiques de la pulvérisation du langage chez Beckett.



La dislocation des mots ou des phrases

« A - (bâillementS) - à moi » (p. 14) : tels sont les premiers mots et gestes sonores de Hamm. Le bâillement rompt la continuité syntaxique de la phrase. La compréhension en devient moins immédiate. Quand Hamm dit « A » puis bâille, on ne sait pas encore ce qu'il veut dire. Le procédé revient à quatre reprises dans son premier monologue: « Peut-il y a - {bâillementS) - y avoir misère plus... plus haute que la mienne? »;«[...] j'hésite encore à - [bâillementS) - à finir » (p. 15).

La dislocation n'est pas seulement formelle. Faisant éclater le signifiant, elle fart en même temps voler en éclats le signifié: « Non, tout est a - [bâillementS) - bsolu » (p. 15). Tout ce que l'absolu désigne - Dieu, la vérité, les valeurs... - s'en trouve atteint (-» problématique 6). Rarement bâillement n'eut autant de force destructrice.



L'hésitation à dire

Par ailleurs, aucun personnage de la pièce ne maîtrise vraiment le langage. Leurs phrases restent inachevées, s'arrêtent, repartent, ainsi que l'indique la présence fréquente dès points de suspension: « Il paraît que le cas n'est... n'était pas si... si rare » (p. 61), dit Hamm, comme s'il cherchait ses mots, qu'il ne savait pas encore ce qu'il allait dire ou qu'il venait déjà d'oublier ce qu'il voulait dire.

La récurrence de la didascalie « il hésite » renforce le procédé et accentue la difficulté dire les choses:

Ce sera la fin et je me demanderai ce qui a bien pu l'amener et je me demanderai ce qui a bien pu... (ilhésitE)... pourquoi elle a tant tardé. (Un temps.) Je serai là, dans le vieux refuge, seul contre le silence et... (ilhésitE)... l'inertie. [...] J'aurai appelé mon père et j'aurai appelé mon... (ilhésitE)... mon fils. (p. 90)

La didascalie « ayant réfléchi » est une autre illustration de cette difficulté : clov. - [...] Alors? On ne rit pas? hamm (ayant réfléchI). - Moi non. clov (ayant réfléchI). - Moi non plus. (p. 43) Tant de réflexion pour savoir si l'on a envie de rire ne témoigne pas d'une rapidité d'analyse ni d'une grande richesse de vocabulaire!



L'introduction du silence

La didascalie «Un temps^ » abonde à foison. Contrairement aux didascalies analysées précédemment et aux trois points de suspension, elle ne rompt pas la continuité des phrases ni même du dialogue. Elle introduit une pause entre les phrases, et le langage en est comme suspendu :

Hamm (avec lassitudE). - Mais taisez-vous, taisez-vous, vous m'empêchez de dormir. {Un tempS) Parlez plus bas. (Un temps.) Si je dormais je ferais peut-être l'amour. J'irais dans les bois. Je verrais... le ciel, la terre. Je courrais. On me poursuivrait. Je m'enfuirais. (Un temps.) Nature! (Un temps.) Il y a une goutte d'eau dans ma tête. (Un temps.) Un cour, un cceur dans ma tête. (p. 31)

Le retour à intervalles réguliers de la didascalie met le mot et le silence, c'est-à-dire l'absence de mots, sur le même plan. C'est un moyen de réduire voire de nier l'importance du langage. Le mot perd tout prestige.



L'APPAUVRISSEMENT DU LANGAGE

L'appauvrissement du langage est obtenu par la simplification du vocabulaire et de la syntaxe, par le recours au langage familier et par la dérision de la « belle langue », du style littérairement recherché.



L'extrême simplification du vocabulaire et de la syntaxe

Le langage est souvent ramené à sa plus simple expression. Les personnages se répondent souvent par des monosyllabes: «Oui» (p. 17,19,23...),« Non » (p. 25,29,37...). Quand elles ne sont pas monosyllabiques, les répliques restent brèves et grammaticalement élémentaires. Ce sont le plus souvent des propositions indépendantes: nell. -Je vais te laisser. nagg. -Tu peux me gratter d'abord? (p. 32)

Le dernier monologue de Hamm (p. 108-110) accumule les phrases nominales et interjections monosyllabiques comme si le langage s'engloutissait lui aussi dans la « fin de partie » : «Voyons. (Un temps.) Ah oui! [...] Bon. (Un temps.) Jeter. [...] Et puis? {Un temps.) Enlever. [...] Et remettre. [...] Égalité. [...] Essuyer. [...] Et puis? [...] Bon (Un temps.) Père! (Un temps. Plus fort.) Père! (Un temps.) Bon. (Un temps.) On arrive. .> Les tout derniers mots de Hamm sont d'ailleurs « ne parlons plus » (p. 110). D'appauvrissement en amoindrissement, le langage s'amenuise jusqu'à disparaître.



Le recours au langage familier

Les personnages s'expriment en outre sur un registre du quotidien: hamm (avec colèrE). -Je m'en fous de l'univers! (Un tempS) Trouve quelque chose. clov. - Comment? hamm. - Un truc, trouve un truc. (Un temps. Avec colère.) Une combine ! (p. 63)

Ou encore: « Flanque-lui en plein la lampe! » (p. 49) dit Hamm à propos de l'insecticide avec lequel Clov s'apprête à tuer la puce.

Les règles et codes grammaticaux ne sont pas toujours respectés: « Tu te crois un morceau, hein? » (p. 24), dit Hamm à Clov. L'interjection « hein » (comme « Eh ben », p. 85) frise la vulgarité. Les phrases interrogatives ne respectent pas toujours l'inversion du verbe et du sujet: « Quelle fenêtre c'est? » (p. 84); ou encore: « On est quel mois? » (p. 86).

Comme dans le langage courant, les segments de phrases sont plus souvent juxtaposés que corrélés ou subordonnés: «Je vous donne du blé, un kilo, un kilo et demi, vous le rapportez à votre enfant et vous lui en faites - s'il vit encore - une bonne bouillie1 »



(p. 71). Ou bien le sujet du verbe est précisé dans une postposition, comme dans l'exemple suivant: » Vous devez savoir ce que c'est, la terre, à présent1 » (p. 109).

I La dérision de la « belle langue »

Par ailleurs lorsque Hamm s'exprime très correctement, presque littérairement, une moquerie déconsidère l'emploi de ce beau Style. Le voici qui s'admire de jouer à l'important devant le gueux: - Allons, allons, présentez votre supplique, mille soins m'appellent ». « Supplique », « mille soins » appartiennent au vocabulaire noble de la tragédie. Mais, comme s'il se dédoublait, Hamm juge ce qu'il vient de dire: « Ça, c'est du français! » (p. 70). Sa remarque détruit aussitôt la boursouflure, l'emphase de son propos antérieur.

De même, lorsqu'à la fin il récite un vers de Baudelaire (-* problématique 5) : « Tu réclamais le soir ; il descend : le voici », il ajoute :





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Samuel Beckett
(1906 - 1989)
 
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Portrait de Samuel Beckett


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Biographie

Samuel Beckett naît en Irlande le 13 avril 1906 à Foxrock dans la banlieue sud de Dublin. Ses parents appartiennent à la bourgeoisie protestante de la ville et lui donnent une éducation très stricte.

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