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Etienne Jodelle



Chapitre d'amour - Poéme


Poéme / Poémes d'Etienne Jodelle





Je crois lorsque notre âme est au joug asservie
D'une beauté farouche, et superbe, et rebelle,
Qu'Amour de mille morts tourmente notre vie.



Je crois celui-là serf d'une peine éternelle
Qui serf d'une maîtresse inconstante et volage,
Ne peut ni la lier ni se délier d'elle.



Je crois qu'Amour fait naître encore plus grand'rage
Dans l'esprit, qui jaloux d'une beauté conquise,
Fait au milieu du port lui-même son naufrage.



Je crois le mal que sent l'une et l'autre âme éprise,
Quand on ne peut trouver l'occasion fuyante,
Qui tant plus est suivie et moins peut être prise.



Je crois le mal que sent toute âme violente,

Lorsque de sa moitié par force se retire,

Se repaissant de pleurs, et de songe, et d'attente.



Mais je crois mieux encor que c'est plus grand

martyre
D'aimer et de penser l'amitié mutuelle,
Sans que les deux amants osent se l'entredire.



Je crois certainement cette ardeur être telle,
Que le feu qui sans air se cache sous l'écorce,
Consommant presque l'arbre avant qu'il étincelle,



Ou bien comme la glace, alors que plus s'efforce

L'hiver de retenir le cours d'une rivière,

Fait perdre au fil de l'eau son apport et sa force,



Celui-là qui glaçant sa liberté première

Et qui craintif dans soi son désir emprisonne,

Perd avec son espoir sa force coutumière.



Tous ces deux sont en moi, l'Amour le feu me donne,
La peur tous mes esprits engourdit de sa glace,
Et sens deux ennemis régner en ma personne.



L'un grave en moi ton nom, l'autre ton nom efface ;
L'un me sert d'éperon, l'autre me sert de bride ;
L'un me volte dans l'air, et l'autre me terrasse ;



L'un me dit que l'Amour ainsi que moi te guide,
L'autre me dit que non, et tous deux entretiennent,
Bien qu'ils soient ennemis, l'espoir, mon homicide.



Par l'un le plus souvent les paroles me viennent
Jusqu'au bord de la langue, et par l'autre au contraire
Mon bonheur et ma voix, prisonniers, se retiennent.



O malheureuse peur, qui seule peux distraire
Le cour des bas humains des entreprises hautes,
Montrant que l'homme seul rien de bon ne peut faire,



C'est toi qui vas guidant nos désirs et nos fautes,
Qui poursuivant l'orgueil d'une immortelle guerre,
Et le vouloir ensemble, et le pouvoir nous ôtes.



C'est toi qui fais sentir que nous sommes de terre,
C'est toi dont le brandon, le fléau et la tenaille,
L'âme des criminels brûle, assomme et enserre.



C'est toi dont le venin court d'entraille en entraille,
Et qui de peur qu'on entre en lumière et mémoire,
Nous sert incessamment d'une horrible muraille.



Mais, hélas ! si tu veux rabaisser toute gloire,
Pourquoi est-ce que tant à l'Amour tu t'attaches,
Vu que l'humilité des amants t'est notoire ?



Il faut que seulement tes fureurs tu délâches
Sur le vice, et non pas sur la sainte puissance
D'Amour, qui onc n'entra au cour des hommes lâches.



Amour est vertueux, divine est son essence,
Essence qui se fait de toute essence mère,
Car
Amour est de tout l'éternelle alliance.



Amour de ce grand
Tout se peut dire le père,
L'âme, le gond, l'appui, l'entretien et la vie,
Qui tout par la
Discorde accordante tempère.



Amour tous ses effets diversement allie,
Amour est le plaisir de ses causes secondes,
Soit que l'on aime bien, soit qu'on aime en folie.



Amour darde ses traits jusqu'au plus creux des ondes,

Il balance son vol dessus le vol des nues,

Et se fait même craindre aux abîmes profondes.



Si donc mes volontés ne sont de nul connues,

Si les affections que maintenant j'embrasse,

Me sont plutôt pour bien que pour un mal venues,



Qui sera celui-là qui prendra cette audace

De m'accuser d'aimer, et pourquoi la peur même

Me renversera-t-elle au milieu de la place ?



Arrière, arrière, peur, furie maigre et blême,
Détourne-toi de moi, laisse-moi l'Amour suivre,
Puisqu'Amour, mon objet, est de tous biens l'extrême.



Je veux aimer ma
Dame, en elle je veux vivre,
Et lui ouvre mon cour avecques ma parole :
Tel amour ne peut-il de crime être délivre ?



Je veux que cette voix jusque vers elle vole,
La peur s'en est fuie, et si veux qu'elle sente
Qu'un amour vertueux folâtrement m'affole.



Et si quelque hargneux après s'en mécontente,
Disant, que si l'amour était honnête et bonne,
Que la peur si longtemps ne m'eût été présente ;



Il faut que seulement réponse je lui donne
Qu'on voit le plus souvent telle langue et envie
En chemin vertueux détourner la personne.



Et toi,
Dame, je crois paravant asservie
A la peur, comme moi, suis telle hardiesse,
Comme tu peux longtemps ma peur avoir suivie.



Car je crois qu'en aimant une telle maîtresse,
Faudra qu'Envie cède à ses vertus très saintes,
Comme a fait à l'Amour la peur enchanteresse.



Et lorsqu'en nous seront ses flammes bien empreintes,
Nous nous rirons de ceux qui en diverse mine
Portent leurs passions sur leurs visages peintes,



Et sur le havre assis au flot de la marine,
Nous verrons le refus, le tort, la jalousie,
L'attente, les regrets dédaigneux de leur vie,
Bayer après le bien de cette
Amour divine.





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Etienne Jodelle
(1532 - 1573)
 
  Etienne Jodelle - Portrait  
 
Portrait de Etienne Jodelle

Biographie / Ouvres

1532

Bibliographie

Poète et dramaturge français, l'une des gloires - mais la plus méconnue - de la Pléiade, Jodelle est aussi musicien, peintre, architecte, orateur et « vaillant aux armes ». Élève de Muret au collège de Boncourt, il fait jouer dès l'âge de vingt ans une pièce, Eugène, première tentative pour créer une comédie nationale. Jodelle semble avoir écrit une autre comédie, La Rencontre, qui, elle, est perd

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