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Etienne Jodelle



Chapitre de l'amour - Poéme


Poéme / Poémes d'Etienne Jodelle





Amour qui quelquefois emportes sur tes ailes
Mainte âme vive et haute, et d'un instinct céleste
L'emplissant, lui fais voir les choses les plus belles,



Quand la guidant dans l'air, dans le ciel, dans le reste
De ce grand monde uni par ta sainte harmonie
Que le temps ne corrompt, ni change, ni moleste,



Lui montre ce qu'en tout ta sainte main manie
D'amoureux entretien, tirant de la discorde
De tout la paix qui est par l'Amour seule unie,



Et fait voir que par toi tout cela qui n'accorde
Ensemble, se recherche, et dessous ta puissance
Se mêle, et se mêlant engendre par concorde,



Et voir qu'ainsi c'est toi qui donnes toute essence,
Tout mouvement, tout cours, comme étant la grande

âme
Du grand
Tout maintenu par durable alliance,



Que c'est toi seul par qui reluit, tourne et s'enflamme,
Tout rond et feu céleste, et que sous les cieux même
La terre se maintient, l'onde, l'air, et la flamme,



Que de toi seul dépend toute basse et suprême

Ame, vie, et vigueur, et croissance, et durée,

Car rien ne dure en rien que d'autant qu'il s'entr'aime,



Et dès lors que ta force amoureuse inspirée

Dans quelque chose en sort par
Discord, ton contraire,

Soudain son être et forme est d'elle retirée ;



Tu fais donc voir alors que l'on ne peut forfaire
Quand sous ton nom d'Amour notre âme vient

entendre
Ce seul grand
Dieu qui peut par union tout faire,



Qui à ses ouvres fait tout tel entretien prendre
Qu'il lui plaît et autant qu'en eux cet
Amour dure
Qui est en tout et même en soi peut tout comprendre.



Voilà cela que peut telle âme vive et pure,
Hautaine, et sur ton vol hautain plus haut ravie,
Connaître en ta plus haute et plus sainte nature,



Te faisant celui seul par qui désasservie
Fut la confusion qui empêchait le monde
D'avoir en son
Chaos forme, ornement et vie.



Ou si avant le ciel et cette terre ronde

Rien n'était, ce fut alors l'Amour d'un tel ouvrage

Qui fit faire de rien ce qui en tout abonde.



Cet
Amour nous fait naître, accroît, nourrit, soulage,
Par maisons, par cités, par peuples nous allie,
Conservant tout cela qu'il fit pour notre usage.



Cet
Amour mêmement à soi-même nous lie,
Et si le faux
Discord de lui nous vient distraire,
A soi, doux et bénin, il nous réconcilie.



L'Antiquité t'a su couvertement portraire

Pour tel
Dieu, te faisant du
Chaos premier naître,



Que tu crevas, domptant
Discord, ton adversaire.

Ce que par tes noms même on veut faire connaître,
T'appelant premier-né des
Dieux, forme et idée
Souveraine de tout, et l'être de tout être,



Par qui fut toute chose en ordonnant guidée

En son lieu le plus propre et par force amoureuse,

Sans que rien restât vain, l'une de l'autre aidée.



Tu es de tout la source et l'origine heureuse,
L'unité, le principe uniq' de la machine
Et de tous ses effets la cause plantureuse,



Son essence cinquième et sa chaîne divine

Qui tout embrasse et tient, restaurateur des choses

Que la vicissitude en les changeant termine.



Dessous maints autres noms sont tes puissances closes,
Que telle âme ravie en toi trouve en toi-même,
Contemplant les secrets qu'à ses yeux tu proposes.



Mais la mienne ne veut dessus ton vol suprême
Ore si hautement te suivre : tu la fiches Çà-bas sur un objet et rareté extrême,



Et bien que ce ne soit qu'un seul de tes plus riches

Effets, un seul sujet de ta vertu plus ample

En qui de tous tes dons, tes mains n'ont été chiches,



De toi un seul chef-d'ouvre, un seul petit exemple
De tout ce que tu peux infiniment, si est-ce
Que ton los en cela plus qu'en rien se contemple.



Et moi je reconnais dans si haute
Déesse,
Qui est l'ouvre et sujet où mon âme se range
Et de tes raretés la rareté maîtresse,



Je ne sais quoi tant beau, tant divin, tant étrange,

Qu'avecques toi, je crois, je suis forcé la dire

Le mieux de tout ton mieux, le plus de ta louange.



Il ne faut donc qu'au ciel ton vol ailé me tire

Pour voir rien de plus grand : je vois la chose en terre,

En qui avecques toi ton ciel courbé se mire.



Je vois çà-bas la chose en qui le plus s'enserre
Ton trésor le plus cher et qu'exprès voulus faire
Pour plus à ton saint joug de grands âmes acquerre.



Tu l'as faite, je crois, comme pour sanctuaire,
Pour retraite et palais où le plus tu séjournes,
Pour à toi les grands cours par tel organe attraire,



Car en tous les beaux dons, dont si bien tu l'atournes,
Amour et déité se retrouvent ensemble,
Témoignant que toi,
Dieu, peu souvent t'en détournes.



Si je veux raconter chaque don qui s'assemble
En son seul chef divin, je ne suis, pour décrire
Ce beau poil seulement, capable ce me semble :



Ce poil divin n'est tel que l'on le puisse dire
D'or ou d'ébène, encor que sur une albâtrine
Blancheur l'ébène et l'or des cheveux on admire,



Mais tel que justement l'une et l'autre divine

Chevelure, soit celle excellemment dorée

Que du chef d'Apollon on feint l'ornement digne,



Ou soit celle qu'on nomme à
Vénus
Cythérée,
Lui cédant en beauté qui rendrait bien captive
De ses beaux nouds d'un
Dieu l'âme plus assurée,



Ce beau poil couronnant cette blancheur naïve

De ses tortis mêlés, d'une crêpe frisure,

Et l'oreille ombrageant tant mignarde et tant vive,



Empêtre en soi les cours qui de telle liure
Sentant accompagner deux maux qui les atteignent,
Qui sont de ses beaux yeux la blessure et brûlure.



Ces liens précieux si fortement étreignent,

L'oil navre et ard si fort, que nouds, plaies et flammes

Se rompent peu souvent, se guérissent, s'éteignent.



Oil, oil, le plus bel oil, qu'eurent oncques les
Dames,
Qui comme un fer ardent (car de l'Amour les flèches
Portent et fer, et feu) nous perces et enflammes,



Bien que le coup, l'ardeur, les amoureuses mèches
Nous tourmentent, tu viens pourtant nos cours

contraindre
De te laisser sans fin renouveler tes brèches.



Car avec tel plaisir tu nous viens ardre et poindre,
Que quand gros, grand, brillant, rayonneux, plein de

fière
Douceur, dardant l'espoir et la crainte non moindre,



Tu tournes et répands dessus nous ta lumière,
Tu semblés nous ouvrir tout un ciel : aussi est-ce
Un ciel, étant d'un
Dieu retraite coutumière.



La voûte de ce ciel vers qui notre oil se dresse

Tout ébloui de voir cette torche jumelle

Qui saintement se fait de nos sens charmeresse,



Se décore alentour de l'arcure tant belle
D'un sourcil délié portant rigueur et grâce,
Comme tirant des traits sortant des yeux d'icelle.



Dirai-je un front serein, dessus lequel se place
La majesté hautaine, un teint qui de l'Aurore
Et de
Phèbe les teints mêlés ensemble efface ?



Un nez de beau profil, même une bouche encore,
Petite et coraline, et par qui l'âme toute,
Au parler, au chanter, au baiser, se dévore ?



Car quand à l'un des trois, divine, elle se boute,

Le musc, le miel coulant et l'harmonie étrange

Se fait, quand on la touche, ou soit que l'on l'écoute ;



Dedans elle des dents le double rang se range,
Qui blanches feraient honte à l'albâtre, à l'ivoire,
Et claires ôteraient aux perles leur louange.



Ce brave chef céleste environné de gloire,

De
Grâces et d'Amours, et qui nous épouvante

De rais, d'éclairs, de foudre, à ses amants notoire,



Est porté sur son col, semblable à l'excellente
Colonne, droite, ronde, albâtrine et polie
Sur qui un chapiteau riche et orné se plante.



Cette gorge de marbre assez grasse et unie
Se flanque d'une double et raide montaignette
Dont l'amour pour défense a la place munie ;



Toute force approchant de la force secrète
De ces deux ronds, se sent poussée et reculée
Si fort, qu'elle s'en rend et confuse, et muette.



Que dirai-je du reste ?
Ah ! grand' beauté voilée,

Que l'esprit par le reste imagine et regarde !

Mais las ! qui est aux yeux par trop longtemps celée,



De décrire et chanter par mes vers je n'ai garde
Cela, car l'honneur même, y mettant couverture,
Ne permet qu'à l'ôter notre voix se hasarde.



Je dirai seulement que toute la structure

De ce beau corps parfait est en port et en taille

Tant admirable aux
Dieux que rare en la
Nature.



Ce corps enclôt une âme.
Ah,
Dieu, faut-il que j'aille
Avec toi sur ton vol,
Amour, ou bien sur l'aile
De cette âme tant haut que du corps il ne chaille ?



Faut-il aller chercher la grand' cause éternelle
D'un tel esprit tiré du pur de la substance
Sur qui se formerait toute forme plus belle ?



Contre ce mien dessein, contre ton ordonnance,
Sur ce chant me faut-il laisser la terre basse
Pour voir le plus parfait de ta sainte puissance ?



Toutes perfections que cet esprit embrasse,
Tant d'instincts, grâces, dons qui de toi lui

proviennent,
Font, comme on dit, voiler d'Agamemnon la face.



Tout est inexprimable.
Il faut que tes mains tiennent
La bride à ce haut vol, m'arrêtant sur la chose
Terrestre qui pourtant (affirmer je ne l'ose)
Ne cède à rien du tout ce que les deux contiennent.





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Etienne Jodelle
(1532 - 1573)
 
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Biographie / Ouvres

1532

Bibliographie

Poète et dramaturge français, l'une des gloires - mais la plus méconnue - de la Pléiade, Jodelle est aussi musicien, peintre, architecte, orateur et « vaillant aux armes ». Élève de Muret au collège de Boncourt, il fait jouer dès l'âge de vingt ans une pièce, Eugène, première tentative pour créer une comédie nationale. Jodelle semble avoir écrit une autre comédie, La Rencontre, qui, elle, est perd

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