NOUS DEVONS ENCORE MARCHER. - Poéme Divers

J'en vois qui s'élèvent
En colère de pacotille
Enjôlement de mots
Gratuité,
Fatuité
J'en vois qui se rêvent
En abolisseurs de servitudes
Mais seulement dans les salons
Enfoncés dans des fauteuils cossus
Un verre de Bordeaux à la main
Et un stylo d'or pour parapher
Des livres à reliure d'or
Et j'entends des mots qui s'indignent
Jusqu'à la plus convenue des inflexions
Pourvu que rien ne change

Il faut que rien ne change
Puisqu'il y a du pain
Non sur la planche
Mais sur la table
Indignation esthétique et policée
De ce qui ne mange pas de pain
Et ne casse pas trois pattes à un canard
Et même que des canards sans chaîne
Simulent des bonds révolutionnaires
Puisque tout est couru d'avance
Aucune course ne se perd
Sinon celle du damné de la terre
L'estropié qui tourne en rond
D'une course absurde
Dans sa geôle de tiers-mondiste

J'avais lu Martin Luther King
Avant de m'endormir l'autre nuit
J'ai fait cet absurde cauchemar
Qu'une multinationale congolaise
Pillait l'or de la France
Dans une mine au cour de la Beauce
Et je me suis arraché de mon sommeil
D'un sursaut d'aliéné mental :
Prêt à m'indigner aussi. Sottement !
Mais non, cela ne se peut !
On ne pille que dans un seul sens.
Il n'y aura pas d'égalité
Sous le soleil guerrier
De la mondialisation.
Nous devons encore marcher.