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Jean-Jacques Viton



Ressac - Poéme


Poéme / Poémes d'Jean-Jacques Viton





parcours six mètres gris blanc objectif miroir terminal doublure d'espace clos j'avance tête penchée vers le sol où tombent les indices de la poussière de nos cheveux de nos poches de nos mains et de notre peau lorsque nous sommes nus

je déplace les pieds

l'un après l'autre

ce qui revient à marcher

je change de place

imperceptiblement

moins vite que les patineurs

qui se croisent la nuit

en se frôlant les joues

dans les allées du
Prado

je change de place



j'avance gramme par gramme

comme une notation de «
Brin »

Berio indique au début doux et immobile

j'avance sans risque de me retrouver

au centre du papier à musique

aux environs de très rapide et sans accents

«
Brin » est un titre de partition

splendidement émouvant

je change de place

j'avance sur la laine du couloir

la porte de la cuisine est à gauche

je n'ai jamais dit à personne

qu'il y a des tarentes dans la cuisine

personne ne les a jamais surprises

c'est une sacrée chance

elles sont pâles presque translucides

comme des jouets japonais en plastique

une grande famille de geckos

aplatis contre un mur

le haut du mur pour la chaleur

d'abord trois ou quatre

ensuite quatre ou cinq

encore une fois trois ou quatre

ensuite deux un couple verdâtre

enfin un seul toujours collé

au-dessus de la porte-fenêtre

je le regarde en prenant une bière

je me dis en ouvrant le frigo

c'est le dernier gecko de ma maison

il dort en paix devant moi



il reste fidèle au mur c'est une habitude que j'ai prise de regarder dans sa direction chaque soir

dans le miroir la lumière change

léger grillage poster brillant

je finirai par le surprendre

appuyé contre une balustrade

en chemise d'été le visage masqué

par le cuivre de la maladie

il suffirait de peu

pour qu'il m'aperçoive

et me fasse signe de la main

pourquoi ne peut-on parler aux morts

L me dit que sans aucun doute c'est

parce qu'on ne les aime pas suffisamment

j'avance vers un tableau-piège

« le lieu de repos de la famille
Delbeck »

fixé en 1960 par
Daniel
Spoerri

ou les installations de
Isidoro
Valcàrcel
Médina

les tables les chaises les couverts les assiettes

les aliments exacts changés tous les deux jours

exhibant l'infecte nourriture de ces «
Repas »

offerts aux indigents de
Madrid

par les institutions de charité

j'avance vers un rite cruel « l'âge de l'âne » en est un le plus vieil âne du village monté par l'homme le plus lourd



et traîné sur les genoux

à travers son paysage familier

les rues les places les montées les descentes

un « terrible périple » disait le journaliste

âne misérable de
Villanueva

au lieu de son exécution encore frappé

à coups de bâtons à coups de pierres

jusqu'à ce que mort s'ensuive

j'avance vers la maison des filles

où sont retenues les putains des champs

« si monsieur le soldat n'est pas satisfait »

phrase simple et simples les suivantes

« au bout de trois plaintes

la femme reçoit une bastonnade publique

et part pour les cheminées »

la lumière change dans le miroir il me reste une petite série de gestes obligatoires

entrer dans le salon

aller aux fenêtres laissées ouvertes l'été pendant la nuit

me pencher compter les maraîchers entre les platanes

regarder les jeunes filles traverser à grandes enjambées

suivre le glissement aquatique des autobus

rentrer les fleurs

croiser les persiennes

et puis

ouvrir la porte du couloir



vérifier les clefs avant de refermer descendre les trois étages arriver dans la rue

il se produit alors chaque matin sans exception un remarquable changement d'appréciation



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Jean-Jacques Viton
(1933 - 1620)
 
  Jean-Jacques Viton - Portrait  
 
Portrait de Jean-Jacques Viton
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