Jacques Réda |
Oh vivre ici, Démétrios, dans les bras repliés Des collines. Avec un toit, du fromage, du vin, Des fourrures de chèvre au lieu de casques sous la tête Pour regarder le ciel à quoi nous ne comprenons rien Couchés ce soir sur l'herbe rase où l'on a répandu À l'aube les boyaux décevants d'une poule, où demain Rouleront dans le sang tes drachmes au profil usé, Mercenaire. Tu ronfles. Peut-être qu'en dormant tu connais la forme des mondes Et que nous en saurons la raison tout à l'heure Quand la lumière ayant touché la pointe de nos armes Il faudra y aller, camarade. Noires sont les blessures au soleil qui a soif. Que l'épée nous abrège : aucune immortelle, crois-moi, Ne viendra salir ses pieds nus dans la sève de ceux qui gisent. Empoigne donc la terre et mords, si tu veux qu'un peu de poussière Ait pitié de ton ombre et se souvienne. En haut je ne vois pas D'étoile qui déjà ne soit oubli, dur regard traversant La fumée inutile des sacrifices. Même les Infernales Se taisent, et nous sommes seuls avec l'heure qui rétrécit. Mais le ruisseau qui sépare nos feux de l'autre armée En bas chuchote encore et fait luire entre les roseaux Ces hautes tremblantes lettres que je ne sais pas lire. |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Jacques Réda (1929 - ?) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Jacques Réda | |||||||||
Biographie / OuvresJacques Réda est né à Lunéville en 1929. Après des études inachevées de droit, il monte à Paris en 1953. Il y sera membre du comité de lecture des éditions Gallimard, avant de devenir rédacteur en chef de la Nouvelle Revue Française de 1987 à 1995. Grand Prix de poésie de l'Académie française en 1997, il sera également récompensé de la bourse Goncourt de la poésie en 1999. |
|||||||||