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Ghérasim Luca



Aimée a jamais - Prose


Prose / Poémes d'Ghérasim Luca





S'il y a un amour en général, il faut avant tout que j'aime celle qui n'est pas l'aimée et c'est dans cette aimée même que je me fais aimer comme amour et que l'aimée m'aime comme amant de l'amour que j'aime comme aimée.

Par quoi il ne faut pas entendre que l'amour aime l'aimée mais que, au contraire, c'est l'aimée qui aime ce qu'on aime tout en s'aimant comme amour d'une aimée et que cette aimée aime par elle-même comme la même aimée et comme cette aimée même.

Un amour qui aurait à aimer l'aimée sans être l'aimée même serait ce qu'on n'aime pas.

L'aimée que j'aime a à aimer ce qu'elle aime c'est-à-dire ce qu'elle aimera.

Ainsi, en aimant l'amant ou l'amour, ma bien-aimée aime l'amour dans son amant, en tant qu'elle-même est l'aimée de la non-aimée qui aime.

Pour que la non-aimée puisse n'être pas l'amour et pour qu'elle puisse aimer l'amant du non-amour sans que l'aimée soit la nonaimée de l'amour, il faut qu'elle ait à aimer elle-même le n'être-pas-aimée, il faut qu'elle ait à ne pas aimer le non-amant de son amour.

Et cet amour même qui est l'amant de l'aimée fait qu'il y a un non-amant aimanté.

Cela ne signifie point que ma bien-aimée aime ce qu'elle aime, mais simplement qu'elle aime à aimer non pas l'amour aimé mais l'amour aimant, l'amour aimantant, amoureusement aimanté par son amant amoureusement aimé.

Et il va de soi que pour l'amant aimanté-aimantant, aimer-ce-qui-n'est-pas-1'aimée est tout entier aimanté par la non-aimée, l'amant aimant ce qui n'est pas- l'aimée aimantante sur le mode aimanté de la non-aimée aimée, le ne-pas-aimer-la-non-aimée n'est jamais aimé mais amoureusement non-aimé dans un amour aimantant, l'amour ne peut ne pas être aimé qu'en tant qu'il est amour de l'aimée même comme n'aimant que la non-aimée adorée.



Ainsi, l'aimée aime ce que j'aime c'est-à-dire soi-même, l'adorée.

Seulement cette aimée doit aimer une aimée qui s'aime et qui est aimantée par son amour d'être aimée par elle-même.

Lorsque, en effet, l'aimée s'aime comme n'aimant pas ce que j'aime, elle aime déjà ce qu'elle n'aime pas, elle aime la non-aimée adorée.

C'est que, lors de l'aimantation de l'aimée, l'amant n'aimait pas seulement l'aimée mais aussi la non-aimée ardente.

Celle que je me fais ne pas non-aimer, ce n'est pas seulement en tant que je n'aime pas qu'elle n'aime pas ce que j'aime éventrer, mais je me fais précisément ne pas aimer une non-aimée qui se fait ne pas aimer ce que j'ai à aimer, c'est-à-dire ce que j'ai à éventrer dans l'âme ardente de son amour.

Seulement cette double aimantation de ma bien-aimée est ce que j'aime ne pas non-aimer: ou bien je me fais ne pas aimer l'aimée et alors l'aimée est l'amour pour moi et j'aime mon amour pour elle; dans ce cas l'aimée cesse d'être l'amour pour moi c'est-à-dire l'aimée qui me fait aimer l'amour pour elle par amour d'être aimée par moi; ou bien l'aimée aime bien mon amour pour elle et se fait n'être aimée que par mon non-amour pour elle mais en ce cas je deviens amour pour moi et elle n'aime pas son amour par delà mon amour pour elle.

Quelles que soient les aimantations, les ventilations et les adorations dans l'âme de ma bien-aimée, si l'aimée doit aimer d'abord l'amour, elle est celle qui, par amour, ne peut s'aimer dans l'âge d'or de l'amour déjà aimé mais dans ce qu'on peut amoureusement désigner comme l'âme de l'or fabriqué dans l'amour à aimer.

Puisque pour l'aimée à aimer l'amour est ce qui sera fabriqué, en d'autres termes l'aimée est l'aimée jamais aimée, l'aimée aimée à jamais.

En ce sens mon amour pour elle n'est pas ce que j'aimais, mais ce que j'aime à ne pas aimer tout en aimant ce qu'elle-même aime.

Donc, le je-suis-aimé m'aime.

Et j'aime ma bien-aimée dans ce qu'elle-même aime à ne pas aimer ce qui n'est pas à aimer-aimant.

Je l'aime dans le j'aimerai de ce que j'avais toujours aimé, fabriqué, aimanté et amoureusement éventré.



Mais, par là même, j'aime et je non-aime non seulement l'aimée-non-aimée de mon amour mais le non-amour-même, c'est que je ne pourrais pas ne pas aimer le je-serai-aimé par l'amour, dans l'amour, pour l'amour, si je n'avais déjà aimé-aimerai le non-amour de l'amour éventé, implicite et éternel.

J'aime l'amour en lui laissant l'âme et le ventre de ma bien-aimée entre les mains.

Mais comme j'aime l'amour entre l'âme et le ventre de ma bien-aimée j'aime l'âme-ventre de ses mains éventrées, c'est-à-dire ma bien-aimée ardemment implicitée dans ses mains.



Ainsi, cet amour est à la fois mon âme éventée par ses mains et le ventre de ma bien-aimée ardemment éventré par l'âme aimantée de mon ventre.

Dans la mesure où l'âme d'or de ma bien-aimée adorée est fabriquée comme âge d'or artificiel dans les aimantations ardentes de nos amours à aimer, l'amour à aimer reste ouvert comme un non-ventre.

Comme âge d'or non-artificiel l'amour n'est que le retour éventré vers ce ventre maternel qui le mure à jamais dans son centre.

Mais l'amour n'est pas le centre d'un ventre, il est centre d'un centre, son propre ventre c'est-à-dire non-mère éventrée, aimantation et murmure, ouverture.

Celle-ci est ainsi, d'une part, l'aimée ouverte ou l'aimée à aimer au delà des murs éventrés, mais d'autre part l'aimée aimée a dans son ventre muré la non-aimée adorée; disons mieux, puisque ma bien-aimée aime ce qu'elle aimera elle n'aime plus ce que j'aime; mais en tant qu'elle aime déjà ce qu'elle aime, elle aime à jamais ce que je n'aime pas.

L'amour est lui-même ce non-amour que j'aime.

Du côté de l'amour de l'aimée, l'aimée est aimée comme la non-aimée adorée qui m'aime, les murs de son ventre à éventrer sont murés dans le centre; du côté de l'aimée de l'amour, la non-aimée adorée est aimée comme aimée aimée, car toute aimée que j'ai à aimer est adorée à jamais.

Pourtant cet amour éventé dans soft centre qui est mon amour à adorer n'est pas une ouverture dans le mur mais ouverture sans mur.

Car il ne s'agit pas d'ouvrir ce qui n'est pas ouvert mais bien de rendre ouvrant ce qui n'est qu'ouvert; il s'agit d'ouvrir l'ouvert, de rendre aimante-aimantante l'aimée à aimer et d'éventer non le centre d'un ventre mais les cent vents éventés au delà des murs éventrants.

Et c'est à partir de ces vents éventés par le non-ventre éventré de ma bien-aimée que l'âge d'or artificiel fait ses aimantations fabriquées dans le centre aimantant-fabri-quant de l'amour à aimer.

A vrai dire, l'aimantation fabriquée-fabri-quante de l'amour à aimer était déjà là, mais murée dans les murmures du déjà-là.

C'est pourquoi la toujours-aimée n'est plus la déjà-aimée-là.



Mais cette toujours-aimée, comme amour de mon amour, j'aime en outre que l'aimée-là l'aime en tant qu'elle est n'importe où c'est-à-dire comme aimée-partout murmurante.

Comme telle elle est et n'est pas partout: âme-trou, ventre-tout, pendant que l'aimée-là n'y est pas et c'est ce n'y-est-pas amoureusement éventé qui est le non-amour de mon amour.

Ëventrer le tout c'est vider le trou de son non-trou éventrant, non pas à titre de non-aimée à vider - cette aimée-non-aimée nous renverrait à la jamais-aimante murée à jamais dans son ventre que je ne puis vider et dans laquelle précisément il n'est rien à proprement parler puisqu'elle aime ce qu'elle aime - mais à titre d'aimée à aimer partout et toujours dans le trou de son âme fabriqué comme un non-tout adoré et troublant.

Il s'agit donc de remplir ce non-tout adoré d'un trou à trouer, à vider, à aimer, à troubler, à murmurer.

Mais puisque le trou à trouer est l'aimée à jamais et ainsi seulement l'une des aimées, on a déjà dit qu'il est lui-même le vide à vider; car ce vide à vider le vide de l'aimée étant une aimée, une vidée, il est justement troué ainsi comme ce qui a en soi-même l'aimée, la trouée.

En d'autres termes, l'aimée n'est pas le contraire de l'aimée à aimer mais seulement le contraire de soi-même, la vidée; ainsi l'aimée est en elle-même le non-tout adoré; ou encore elle n'est pas un contraire du non-tout mais est le trou d'un vide à vider qui remplit le non-tout adoré comme un tout.

Il reste donc à remplacer le non-tout adoré de tout l'or de l'air de l'âme de l'amour, de tous les vents éventés par l'amour, de tous les murmures aimantés contre les murs, contre les mères, de tous les trous anti-trous de nos amantes.

Ouverture, vent, centre, trou aimantant, or fabriqué, âge d'or fabriqué-fabriquant, or d'air, air d'âme, murmure et ventre sont animés l'un envers l'autre comme le sont l'aimée et l'amant et leur amour consiste plutôt à se poser comme non-amour et à s'adorer perpétuellement dans la non-aimée même.

Il y a bien deux amants qui s'aiment, ils s'aiment eux-mêmes, ils s'aiment eux-mêmes comme non-amants, c'est-à-dire que chacun est l'amant de soi-même, ils ont leur amant en eux et ont seulement un seul amour à adorer.

L'amour ou cette aimée adorée, tel que tout ce qui est non-tout s'aime d'une façon quelconque, par exemple comme vide vidé, est plutôt le contraire de cette aimée, a été en vérité l'âme de tout le non-tout parcouru depuis la toujours-aimée-partout mais c'est seulement dans le trou d'un trou que cette âme elle-même a un ventre à trouer.



Dans l'amour qui a un vide à vider et non pas un ventre troué d'âme, l'aimée devient la toujours-aimée-là, mais l'aimée se vide à nouveau comme aimée, puisqu'elle s'aime en deux aimées-partout c'est-à-dire comme un non-tout qui s'aime mais qui s'aime comme quelque chose à vider de sa non-aimée adorée.

Désormais, l'amour comme aimée à aimer a une double non-aimée, l'une le trou du non-tout et de la déjà-aimée-là, la troublante, mais qui pour lui est l'aimée comme non-amour, et la seconde, lui-même précisément, trou du non-tout et qui, amoureusement, est aimé seulement dans son tout vidé de tout.

Ce que l'amour de l'amour aime tout en s'aimant comme à-aimer, a aussi, en tant qu'il s'aime comme à-aimer, non seulement le tout et le non-tout amoureusement remplis de vide à vider mais encore le non-tout vidé de tout son tout à vider.

Ce non-tout à vider, tel qu'il s'est vidé comme aimée vidée-vidante, n'est donc que l'aimée encore aimante de l'amour amoureusement troué d'aimées.

S'étant seulement aimé en soi-même, en aimant l'aimée-là, il ne s'y est pas aimé comme non-aimée de cette aimée-là.

La non-aimée s'aime bien comme bien-aimée-tout, mais en outre comme non-aiméelà, et en même temps comme aimée-non-tout en tant que l'aimée vidée-vidante de la toujours-aimée-partout.

Une telle aimée n'a rien de non-aimée en elle et doit amoureusement se vider devant le non-tout à aimer parce que ce qui est troué est justement ce qui n'a pas son non-tout en lui-même, mais ce qui a son trou dans le non-trou adoré.

Mais, en fait, cette aimée, au lieu d'aimer ce qui est à aimer en ouvrant l'à-aimer jusqu'à l'aimant-aimantant, n'aime pas ce qui s'aime dans un tout comme non-trou aimanté par le tout vide et vidant.

C'est pourquoi elle aime aimer le non-vidant entre les murs d'un amour qui est mère éventrante, qui n'est aucunement l'or et l'air troués d'âmes, murmurants, ni le vent au delà de son centre.

Lorsque, par la suite, on découvre que la mère-mur adorée n'est pas la bien-aimée à ouvrir, à couvrir et à trouer, la toujours-aimée est déjà la déjà-aimée-là comme un tout vidé à jamais de son non-tout que j'aime, que j'ai à aimer et que j'aimerai partout et toujours.

C'est précisément ce qui est à non-vider.

Car il n'y a, par rapport à ma bien-aimée aimantante, aucun tout muré, aucune aimantation déjà aimantée.



Mais qui me décidera à trouer les murs aimantés sinon ma bien-aimée?

Mon amour c'est ma bien-aimée adorée et ma bien-aimée est à adorer dans ma bien-aimée et j'adore l'adorée, l'ardente, la tou-jours-adorée, la partout-odorante, je l'adore, j'adore son odeur, ce tout et ce non-tout éventés par ma bien-aimée partout et cette aimantation adorée qui est son non-ventre adoré, adorant et amoureusement fabriqué en or fabriqué dans l'âge d'or fabriqué de mon Amour, comme un grand trou vide troué dans un grand trou à vider jusqu'à la fin des âges.



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Ghérasim Luca
(1913 - 1994)
 
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Biographie / Ouvres

Gherasim Luca apporte un travail, un jeu musical sur notre langue, le français qui n'est pas sa langue d'origine, car son pays natal est la Roumanie. Il ose la révolution du langage en lui donnant une nouvelle morphologie, jusqu'à sortir de la langue elle-même, jusqu'à nous rappeler la force avec laquelle la poésie peut entrer en chacun de nous, sur la pointe des pieds ou en claquant la porte... E

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