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Le Prince Charmant du Romantisme






« Le voilà, jeune et beau, sous le del de la France. »

Combien est différent Musset de Vigny! Imaginerait-on ce dernier, poète de la maturité, écrivant :



Mes premiers vers sont d'un entant,

Les seconds d'un adolescent,

Les derniers à peine d'un homme.



A l'intérieur du mouvement romantique, apparaissent donc les personnalités les plus diverses qui soient. Encore une fois, il n'y a pas, en France, un romantisme, mais des romantismes. Avec Musset naît la saison vernale de la vie, la jeunesse et la passion, les V caprices enfantins, les orages adolescents, les atteintes douloureuses de l'âge d'homme. De tous, il est le plus séduisant, le plus libre, le plus désespéré aussi, non pas par l'aboutissement raisonné d'une pensée philosophique, mais parce que son cour s'use plus qu'il ne se bronze au contact de l'existence.



Alfred de Musset (1810-1857) naquit à Paris, près du Quartier latin, d'un père et d'une mère appartenant l'un et l'autre à ces milieux cultivés issus du XVIIIe siècle, avec l'héritage de Voltaire et le culte de Rousseau. Aucune malédiction familiale ne semble peser sur lui : le père est un homme aimable et respecté, la mère une femme aimante et aimée, et le foyer est le plus uni qu'on puisse imaginer. En remontant dans la généalogie, selon Musset, on trouve, nous l'avons dit, Cassandre Salviati, la Cassandre de Ronsard, et le ménestrel du XIIIe siècle Colin Muset serait un ancêtre. Que l'enfant Musset soit impulsif, d'une nature nerveuse ne semble pas bien grave. Enfant gâté, il vit dans un milieu où tous, et même le frère aîné Paul qui sera son biographe, lui passent ses caprices. De plus, Alfred possède tous les dons : élève à Henri-IV, ayant des condisciples appartenant aux meilleures familles (un de ses amis est le duc d'OrléanS), ses études sont excellentes.

A quelle carrière est-il promis? Il étudie le droit, la médecine sans s'y fixer; il est musicien, il dessine : ce n'est pas là son avenir. Doué en toutes choses, il choisit la poésie. A dix-huit ans, il fréquente déjà les salons littéraires. Paul Foucher, le beau-frère de Victor Hugo, l'a introduit dans la célèbre famille, l'a présenté au Maître qui lui a fait bon accueil. Il va aussi chez Nodier, il est le prince diarmant du jeune romantisme. Si ses premiers essais ne se différencient guère de ce que publient ses amis, avec ce qu'il làut de couleur historique et locale, de ton moyenâgeux, d'exotisme et d'acrobaties verbales, s'il écrit avec facilité, maîtrise un style déjà élégant et souple, sa personnalité n'est pas encore affirmée. Il écrit des madrigaux, des couplets, des évocations antiques dans le goût d'André Chénier, en montrant partout sa virtuosité sans qu'apparaisse encore rien de très personnel.

Son indépendance d'esprit plaît à Vigny, la finesse de sa psychologie enchante Sainte-Beuve. Musset est flatté, mais ne leur préfère-t-il pas au fond les amis d'une joyeuse vie? Ce sont des jeunes gens riches, cultivés, de bons viveurs, ce qui n'empêche nullement leurs qualités humaines comme c'est le cas pour Ulric Guttinguer, par exemple, si romantique. Parmi les noms de cette jeunesse dorée, on trouve Alfred Tattet, les comtes de Bel-giojoso et d'Alton-Shée.



Mais l'enfant terrible, le jeune dandy, le Parisien qui a hérité de la gouaille locale, l'héritier de toute une tradition d'équilibre et de mesure, le rire de la satire toujours prêt à fleurir sur ses lèvres, ne peut-il sourire devant certaines boursouflures du romantisme? On peut croire qu'il imite quand, souvent, il parodie, il pastiche, semblant dire : « Voyez comme c'est facile de jouer au grand poète! » Lorsqu'en 1829 paraissent les Contes d'Espagne et d'Italie, tous les espoirs sont dépassés. Musset, l'enfant Musset, étonne, émerveille, scandalise. Répandant tous ses dons, fantaisie, art, impertinence, on se demande s'il ne se moque pas autant des deux parties poétiques en présence : le classicisme bourgeois dont il heurte les goûts aussi bien que les romantiques qu'il semble railler en exagérant leurs défauts, en caricaturant leurs tics et leurs outrances. Il badine, il joue, il s'amuse, il rit de tous et de lui-même, surprend en ces temps de sanglots et d'aventures du cour par son détachement. On dirait même qu'il se hâte d'écrire comme pour profiter pleinement de sa jeunesse et l'on ne retirera jamais à Musset d'être le plus jeune de tous, ce qui n'est pas seulement un fait chronologique mais une vérité humaine.



Tu te frappais le Iront en lisant Lamartine.

Ah! frappe-toi le cour, c'est là qu'est le génie.



Durant ces années, il joue le détachement, mène une vie libre de jeune gandin, de personnage à la mode dans le plaisir fugace des amours de boulevard, des valses avec quelque grisette. Il ne sait pas qu'au détour du chemin, le vrai mal romantique le guette, celui qui est éternel et non pas de mode, non pas de convention. Dans son corps, dans son esprit, dans son cour, parce que le plus fragile, il sera le plus frappé. La douleur ne frappe pas que les maudits.

Alfred de Musset multiplie les ouvres : la Quittance du Diable, pièce tirée d'un roman de Walter Scott, 1830, qu'on ne joue pas; la Nuit vénitienne, 1830, qu'on siffle. Le poète prend pour résolution de ne plus affronter le public et il s'y tient. Il donne Un Spectacle dans un fauteuil, 1832, recueil formé de deux pièces à lire et non à jouer. La première, la Coupe et les lèvres, est précédée d'une Dédicace en vers qui est un véritable manifeste. Il nous dit le peu de cas qu'il fait de la critique, sa haine de l'état de plagiaire : « Mon verre n'est pas grand, mais je bois dans mon verre. » Il n'est pas un écrivain politique; il aime sa patrie et en aime d'autres; il est catholique et sait que d'autres religions ont peut-être des réponses; il aime la sagesse, mais aussi le tabac et le bordeaux; il aime la nature, mais aussi les arts et la peinture; il affirme surtout son indépendance à l'égard du romantisme et ses amis reçurent de ce jeune homme quelques traits satiriques fort blessants :



Mais je hais les pleurards, les rêveurs à nacelles,

Les amants de la nuit, des lacs, des cascatelles,

Cette engeance sans nom, qui ne peut faire un pas

Sans s'inonder de vers, de pleurs et d'agendas.



Sait-il alors que romantique, il l'est profondément? La Coupe et les lèvres, comme la seconde pièce, A quoi révent les jeunes filles? trahissent la naissance du dégoût d'une débauche de laquelle on peut difficilement s'extraire, d'un scepticisme face à l'amour, des aspirations idéales qui se refusent à un cour malade de trop servir, du désir de retrouver dans l'art une pureté perdue dans la vie. Le recueil est complété par le beau poème Namouna où se reflète, dei rière une fausse désinvolture, un approfondissement humain.

En fait, le meilleur de l'ouvre de Musset sera écrit avant sa trentième année. Il commence en 1833 un Roman par lettres, publie deux pièces, Andréa del Sarto (les rapports de l'amour et de l'aN) et les Caprices de Marianne (la rencontre d'un idéalisme amoureux et de la femme dont le poète a une conception pessimistE). Ces années 1830-1833 sont le temps où Musset, déjà las d'une vie désouvrée de jeune viveur, connaissant la lassitude du plaisir, le dégoût de la débauche et de la bamboche, connaissant sa faiblesse et ne sachant lui résister, désabusé tout en ayant conscience de ne pas parvenir à devenir un homme, est sans cuirasse. C'est alors que George Sand intervient dans sa vie. « Le voilà se noyant dans des larmes de femme. »

Sur ce drame amoureux, tout a été dit. Chacun des deux amants l'a conté à sa manière : Musset dans la Confession d'un enfant du siècle, 1836, Sand dans Elle et Lui. Cette étape semble venir à point nommé dans la vie du poète pour lui apporter son mûrissement. Le changement apparaît avec Rolla : aux plaintes vagues, à la tristesse fatiguée et désinvolte va succéder le désespoir s'exprimant en vers de feu avec un grave lyrisme. Cependant le Musset charmant, léger, plein de drôlerie et de fraîcheur ne disparaîtra jamais tout à lait, on le retrouvera jusqu'à la fin de sa vie.



Les amours de George et d'Alfred forment un véritable roman et l'on n'aurait su trouver personnages plus séduisants, plus typés pour le conduire. Par la beauté épanouie de sa personnalité féminine, par son intelligence exceptionnelle, George répond à l'idéal du jeune amant. Célèbre et fêtée, libre et audacieuse, elle a tout pour séduire le jeune désabusé. Elle représente le grand amour qui peut le guérir des griseries. Pour l'un comme pour l'autre, un sens peut être donné à une vie irrégulière. L'enivrement sera de courte durée. On connaît les étapes de cette liaison passionnée qu'une fiction aurait certainement terminée par un suicide : crise nerveuse de Musset la nuit en forêt de Fontainebleau, voyage d'Italie (Gènes, Pise, Livourne, Florence, VenisE) qui marquent la naissance, l'apogée et le déclin de l'amour. D'un commun accord, bien que Musset aime toujours sa compagne, on ira vers l'amitié. A Venise, alors que le poète est gravement malade (sans doute atteint de fièvre typhoïdE), liaison de la femme avec le médecin italien Pagello, jalousie, drame, rupture. George Sand, de tout cela, nourrira non seulement Elle et Lui, mais aussi bien d'autres ouvres psychologiques et sentimentales. On sait que Paul de Musset, soucieux de rétablir la vérité et de défendre son frère, répondra par Lui et Elle. Tout cela appartient à l'histoire amoureuse du xixe siècle.

Alfred de Musset pourra retrouver le travail, le seul consolateur possible : «Jours de travail, seuls jours où j'ai vécu! » Comme chez Vigny, la vie par l'écriture. Car ce paresseux apparent est des plus actifs. Après Fantasio, voici le meilleur de son théâtre avec On ne badine pas avec l'amour, Lorentaccio, 1834, que suivront le Chandelier, 1835, Lljie fautjurer de rien, 1836, Un Caprice, 1837, et plus tard, Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée, 1845.

Après le drame de Venise, la souffrance de Musset n'est pas seulement sentimentale. Elle correspond à une crise intellectuelle et morale. La « femme à l'oil sombre » n'a pu l'arracher à son sort. Celui que Devéria a dessiné en page, âme inquiète et faible, santé chancelante, va retomber dans ses égarements, dans cette débauche qui est pour lui une drogue. Les amours seront nombreuses. Au cours des années, on verra se succéder une femme du monde, Mme Jaubert; une grisette, Louise; une jeune fille, Aimée d'Alton; une jeune actrice célèbre, Rachel. Certaines l'attirent, mais se refusent comme Pauline Garcia, sour de la Malibran, ou la princesse Belgiojoso. Il connaîtra encore des amours tournant à l'orage avec Mme Allan et la poétesse Louise Colet qui écrira Lui.

On croit généralement qu'à partir d'août 1833, les poèmes lyriques sont uniquement inspirés par George Sand. Or, les échos d'autres épisodes sentimentaux retentissent dans ces poèmes. Si la passion malheureuse apporte un chant nouveau, une plainte passionnée, l'amour n'est pas le thème unique; il est le point de départ d'intenses méditations sur la souffrance et la création poétique, sur les oppositions du cour et de l'esprit, sur la vie et sur l'art, sur la solitude et sur l'espérance, sur l'apaisement et le pardon, sur Dieu et la mort. Après Rolla, voici des chefs-d'ouvre poétiques incomparables, ces Nuits originales, si différentes de Novalis, si personnelles, que sont la Nuit de Mai et la Nuit de Décembre, 1835, la Nuit d'Août, 1836, la Nuit d'Octobre, 1837, ces longs dialogues entre la poésie personnifiée par une Muse vibrante, humaine, et l'être de chair et de sang, soumis à toutes les faiblesses et luttant désespérément. La Lettre à Lamartine, l'Espoir en Dieu, Souvenir, les Stances à la Malibran sont d'autres hauts moments de cette existence « tout aux tavernes et aux filles », et qui trahissent des préoccupations moins légères qu'il n'y paraît.



« Et le jour que parut le convive de pierre. »

Passent les années. Tandis que le donjuanisme se poursuit, la gloire qui a saisi Musset au sortir de l'enfance, presque scandaleusement, ne le quitte plus, bien qu'après la trentième année les productions soient courtes et légères : de temps en temps un madrigal, un sonnet comme ceux dédiés à Mme Ménessier-Nodier, une chanson. La tristesse, le désenchantement que traversent des éclairs géniaux. En 1847, après l'avoir joué à Saint-Pétersbourg, Mme Allan, la belle actrice, fait prendre Un Caprice au Théâtre français. Et voilà que, alors qu'il ne s'y attendait guère, Musset connaît il la scène le succès qui se refusa à ses débuts. On le découvre, on monte ses comédies. Tout n'est pas bon, si l'on en juge par Bettine, 1851, mais les réussites sont incomparables et l'on sait aujourd'hui quelle avance sur son époque avait Musset dans ce domaine.

En fait, il est poète partout, pas seulement dans ses vers. Auprès de la grande poésie, du roman autobiographique, du théâtre, il existe le Musset des douze Nouvelles et Contes (Frédéric et Bernerette, le Fils du Titien, Margot, Histoire d'un merle blanc, Mimi Pinson, Pierre et Camille, la Mouche, etc.) dont la lecture, à défaut d'être bouleversante, reste fort agréable. On connaît moins le Musset critique, celui d'un livre posthume intitulé Mélanges de littérature et de critique. Ses lecteurs y trouveraient, si besoin était, une nouvelle preuve de l'indépendance, de la sûreté de goût et de jugement de Musset. Y sont réunies quatre Lettres de Dupuis et Cotonet que l'auteur suppose avoir été écrites par deux provinciaux au directeur de la Revue des Deux-Mondes. La première est une critique du romantisme en ce qu'il a d'outrancier, d'extravagant et de variable. Musset annonce que, plagiat pour plagiat, il aime mieux « un beau plâtre pris sur la Diane chasseresse qu'un monstre de bois vermoulu décroché d'un grenier gothique ». L'humanitarisme à la mode, le journalisme-roi, l'esprit du temps font l'objet de ces missives où se montrent le bon sens spirituel et le dédain des conventions d'un homme libre. Rappelons également son essai De la Tragédie à propos des débuts de mademoiselle Rachel, son étude de critique artistique : Un mot sur l'art moderne : Salon de 1836, des articles de journaux très enlevés, des comédies, Une matinée de don Juan et Faire sans dire, mais l'on aimerait oublier son discours de réception à l'Académie française mal inspiré par Emmanuel Dupaty.



En effet, le 12 février 1852, Musset était élu chez la dame respectable. Il devait mourir après avoir « perdu sa force et sa vie », avoir entendu « sonner la mort à ses oreilles » le 2 mai 1857. Ayant perdu « ses amis et sa gaieté », peu de personnes suivirent son cercueil.



Telles sont, à gros traits, les étapes de la vie d'un poète qui se voulait classique et qui était peut-être le plus intimement romantique de tous, le moins stoïque, le plus douloureux, et celui qui avait le plus de charme, nous allons le voir en exposant ses grands et petits poèmes qui éveilleront, nous l'espérons, le désir de lire ses ouvres complètes sans cesse rééditées.



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