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LA DISCIPLINE - le centralisme monarchique






Richelieu veut maîtriser la. société, Descartes la nature, Saint-Cyran la concupiscence, les doctes l'art, les honnêtes gens le comportement. Tous veulent imposer une discipline. Tous veulent l'ordre, la méthode et se réclament de son principe : la raison. « La venu n'est qu'ordre, comme le vice n'est que dérèglement » (Saint-CyraN). « Il faut faire toutes choses par raison », « je veux ce que veut la raison », « mes colères ne sont fondées qu'en raison » (RichelieU). La discipline de la vraisemblance, des bienséances, du moralisme, des règles et du goût va marquer une littérature soumise au pouvoir, aux doctes et aux mondains.





1. Une nouvelle méthode de gouvernement : le centralisme monarchique



Richelieu s'est donné pour but d'imposer à tous l'autorité de l'État. Cela demande une nouvelle méthode de gouvernement, surtout à partir du moment où les besoins de guerre exigent une politique de « salut public » (c'est le cardinal qui lance la formulE), des décisions draconiennes rapidement exécutées. Les officiers* sont trop indépendants dans leurs charges héréditaires, trop respectueux des formes et coutumes, trop liés aux populations. D'où le développement des « intendants de justice, police et finance », « commissaires départis pour l'exécution des ordres du roi », avec leurs subdélégués et commis qui stimulent et contrôlent les officiers, voire les remplacent.

Ce n'est là que la forme politique d'une mutation générale : la nécessité d'une nouvelle méthode pour maîtriser un monde nouveau où la technique l'emporte sur la nature ; cela fonde une nouvelle rationalité, qui se manifeste en politique même par le triomphe du machiavélisme malgré condamnations et dénégations.



2. Une nouvelle méthode de pensée : vers la technologie



Même si notre raison est une faculté innée, cette capacité d'analyser, de calculer, de juger se développe différemment selon les exercices que demande la conjoncture. En Grèce pour organiser la vie de la cité au terme de débats argumentes. A Rome pour édicter des lois, discipliner des légions. Fin XVI' siècle, début XVII' siècle, la raison c'est le souci d'équilibre du sage et des politiques du Tiers Parti. Puis c'est la raison conquérante du technologue et du militant qui l'emporte, en attendant que triomphe la raison centraliste, autoritaire de l'Etat et de la conscience religieuse.

Jusqu'à la Renaissance, la science (spéculation d'une élite qui la croyait d'autant plus pure que plus dégagée des sens et du monde matérieL) et la technique (pratique d'artisanS) s'étaient développées indépendamment. Les besoins d'une économie en développement (navigation océanique, fonderie, mécanique, transports, balistique, fiscalité) requéraient leur conjonction dans une technologie qui se développe lentement. Le grand démarrage intervient quand l'Italien Galilée tourne vers le ciel la lunette inventée par des artisans (1609), quand l'Anglais Bacon, à partir de 1605, veut entreprendre la « grande restauration des sciences » (1625) pour < rendre les hommes maîtres de leur sort » par « le développement de leur pouvoir sur la Nature » (1620), par l'« élargissement des limites de l'empire humain jusqu'à l'accomplissement de tout ce qui est possible » (1627). Quand Descartes refuse des mathématiques préoccupées « de nombres vides et de figures imaginaires » et autres « pareilles bagatelles » (1628, IV), pour entreprendre de « donner au public [...] une science aux fondements nouveaux permettant de résoudre en général tous les problèmes » (26 mars 1619), « une science universelle qui puisse élever notre nature à son plus haut degré de perfection » (mars 1636). Quand il refuse les « spéculations qui ne produisent aucun effet » pour rechercher une théorie « pratique » pat laquelle nous puissions « distinguer le vrai d'avec le faux », « nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature », améliorer notre santé, nous rendre « plus sages » (Discours de la Méthode, I et VI) « et ainsi jouir de la béatitude naturelle » (6 août 1645). La science cartésienne, du moins de 1628 à 1637 se veut avant tout « une technologie du réel » (N. GrimaldI). Savoir, c'est savoir faire, pouvoir maîtriser le monde et soi-même. Dieu, créateur de notre raison et des lois de l'univers, reste le fondement de la possibilité de la connaissance. « Si l'on ignore Dieu, on ne peut avoir de connaissance certaine d'aucune chose » (1644, I, 13). Mais la science n'a plus rien d'une divinatio ; elle se mesure à son utilité plutôt qu'à sa conformité à un dogme. « Toute la philosophie est comme un arbre dont les racines sont la métaphysique, le tronc est la physique et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences. » Or, « ce n'est pas des racines ni du tronc des arbres qu'on cueille les fruits » - entendez les effets concrets des sciences qui seules importent pour nous (1647). Cela ne pouvait encore se concrétiser dans une révolution industrielle, mais c'est une transformation du rapport entre l'homme et le monde, une révolution mentale.



3. Le mécanisme



On a vu l'importance de l'animisme pour la poétique à l'époque où Sully pouvait encore affirmer contre Laffemas et Montchrestien que « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Maintenant, il n'y a plus de doute : quoique fortement minoritaires, les mécanismes de la manufacture, du commerce, des finances, de l'administration sont déterminants. C'est une révolution de la condition humaine. Au heu d'être soumis à des processus naturels qu'ils ne comprenaient même pas, les hommes commencent à maîtriser la nature et à vivre dans un univers de plus en plus technique, urbanisé, culturel : un monde d'artefacts. « La statique, l'hydraulique et la pneumatique produisent des effets si prodigieux qu'il semble que les hommes puissent imiter les ouvres les plus admirables de Dieu » (Mersenne, 1625). On vit dans les mécanismes abstraits de la monnaie, de l'échange, de l'administration. On commence à pouvoir modifier son statut par son travail. Horloges et autres machines travaillent mieux que l'homme. On perfectionne des automates, qui frappent l'imagination.

D'où un nouveau modèle explicatif, le mécanisme, apparu pour la première fois dans La science nouvelle de l'italien Tartaglia (1537).



Cette théorie correspond à la mécanique, science de l'action des forces et de la transmission des mouvements. Seconde science en date après la géométrie euclidienne, elle a progressé au xv* siècle et se consolide de Galilée (1597) à Newton (1697). Comme la technique et la comptabilité, la Nature même < est écrite en langage mathématique » (Galilée, 1623). Plus de quiddité, d'âme spécifique de chaque chose : « Tous les corps sont faits d'une même matière » (Descartes, 1633). Seules les distinguent les différences « des grandeurs, des figures et des mouvements » (3 octobre 1637). « Toute ma physique n'est autre chose que géométrie » (27 juillet 1638). Auparavant, même les minéraux avaient une âme. Maintenant l'univers est un mécanisme et même les animaux sont des machines. «Je ne reconnais aucune différence entre les machines que font les artisans et les divers corps que la nature seule compose, sinon que [...] les tuyaux ou ressorts qui causent les effets des corps naturels sont ordinairement trop petits pour être aperçus de nos sens » (1644, IV, 203). Même notre « corps n'est autre chose qu'une [...] machine » où Dieu a mis « toutes les pièces qui sont requises pour faire qu'elle marche, qu'elle mange, qu'elle respire» (1633). Descartes peut «expliquer les passions [...] en physicien » (1649, préfacE), expliquer mécaniquement tout notre fonctionnement psychophysiologique par des effets physiques venus de l'extérieur ou de la chaleur du cour et transmis à travers nerfs et vaisseaux par de subtiles particules matérielles, les « esprits animaux » (cf. 19 juin 1643). Dieu n'est plus l'âme de la Nature, mais l'horloger de l'Univers.



4. Du génie à la méthode



Le mécanisme ne concerne pas seulement les objets. Dans le sujet pensant aussi, ce n'est plus la nature qui importe, mais le fonctionnement. L'essentiel n'est plus le génie, d'autant que « la raison est naturellement égale en tous les hommes » (Descartes, 1637). C'est la méthode : « ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien » (1). Le monde nouveau est dominé par la méthode de l'administradon, de la technique, de la rationalité, de la finance. La Nature n'est plus une mère mais un mécanisme à maîtriser.

Ce changement concerne l'ensemble de la vie mentale : la technique et l'art l'emportent sur la nature et la spontanéité. Le génie ne peut suffire : « L'art seul [...] peut porter les productions humaines à leur perfection », écrit Chapelain, reflétant l'opinion dominante. La création d'une ouvre devient surtout l'application de règles, d'une méthode, sa qualité dépend de sa logique. La composition l'emporte sur l'invention et le théâtre, mécanisme dramatique, sur la poésie, expression lyrique. Ceci d'autant plus que la nouvelle pensée est dualiste. Elle pose une radicale différence (nécessaire à l'autonomie de la sciencE) entre l'esprit et la matière, le sujet et l'objet, ruinant les possibilités poétiques du vitalisme animiste. Elle désacralise le monde, rend la nature insensible, et refuse aux choses cette âme qui permettait une sympathie entre elles et nous. La nouvelle connaissance n'est plus participation analogique, mais distinction, analyse, mise à distance du réel, devenu objet froid.



5. « L'honnêteté », discipline du comportement



L'assujettissement n'est pas seulement imposé par les pouvoirs. Il résulte de l'adhésion à une forme de pensée et à un modèle de conduite. L'évoludon économique et politique entraîne le développement des villes et surtout de la capitale (200 000 habitants en 1590, le double en 1635) et de la Cour. D'où une urbanité, une courtoisie, une civilité ou, comme on disait alors une « honnêteté » accrues, tandis que la prud'hommie, vertu du sage qui prend ses distances, décline jusqu'à disparaître dans les années trente. Deux ouvrages révélateurs : La Cour sainte (1624), du P. Caussin, remaniée et complétée sur quatorze édidons jusqu'en 1645, et L'honnête homme ou l'Art de plaire à la Cour de Nicolas Faret (huit éditions de 1630 à 1660). Le premier prétend concilier vie de cour et religion ; mais chez Faret on voit bien que la nouvelle vertu est une intégration sociale et une soumission politique plutôt qu'une élévation morale.

Caussin sait que la Cour « a été de tout temps décriée touchant ce qui concerne la vertu » et il en fait lui-même un assez sombre tableau. Mais il affirme que, fatale aux esprits faibles, c'est au contraire « une belle école de vertu à ceux qui en savent bien user ». Selon Faret, « corruption » et « servitude » caractérisent ce milieu : « lorsque je considère [...] le mépris que je fais de la Cour, j'ai peine à concevoir comment l'envie m'est jamais tombée en l'esprit d'écrire sur ce sujet ». Mais « tout homme de bien est obligé de suivre la Cour » pour « être utile à sa patrie et [...] ne profiter pas seulement à soi-même, mais encore au public ». Les inconvénients moraux seront effacés ou sublimés chez celui qui se donne pout but « la gloire de bien servir son prince » et qui doit donc « se conformer à la meilleure et plus forte de ses inclinations », ne « témoigner jamais de chagrin », ne « donner jamais que des conseils timides » sans pour cela « devenir flatteur ». Tout au long de la période, l'élan de sociabilité tendra à l'emporter sur les scrupules de moralité. « Il est presque aussi essentiel à l'homme d'eue sociable que d'être doué de raison. Nous devons mépriser le monde et avoir du respect pour lui. Il ne se faut pas emporter à une complaisance vicieuse, mais on ne doit pas aussi choquer une honnête bienséance » (Grenaille, L'honnête garçon, 1642). Voilà le terme décisif : l'honnêteté, c'est la bienséance, c'est-à-dire la conformité au modèle idéologique. Il ne s'agit plus de s'affirmer, selon une mentalité nobiliaire mais de se contrôler et de s'adapter. < L'une des plus infaillibles marques d'une âme bien née, c'est d'être ainsi universelle et susceptible de plusieurs formes pourvu que ce soit par raison [...]. Il y a du rustique et du stupide d'être tellement pris à ses complexions » (FareT) qu'on ne puisse se modeler selon la demande sociale.

La civilisation, transformation de l'être naturel en sujet social, se fait par la Cour et les salons. Celui de Mme de Rambouillet exerce, depuis 1625, une influence majeure sur la vie littéraire. Gens du monde et beaux esprits s'y exercent mutuellement à l'art de plaire, forme subtile de soumission, qui l'emporte peu à peu sur une spontanéité plus grossière mais plus libre. Par le même mouvement, la nouvelle culture des élites continue à se distinguer de la culture populaire, centrée sur le corps, l'affectivité, la fête. Vers 1640 com'mence une seconde vague de répressions contre la sorcellerie. « Tout ce qu'il y a de bien né, de raisonnable et de savant dans les États bien policés est séparé d'avec le peuple », cet « animal si stupide » (La Ménar-dièrE), « cet animal à tant de têtes » (ScudérY), « l'indocte et stupide vulgaire » (DesmaretS). L'élite se replie sur elle-même. Nous voici loin de Rabelais. Et aussi de Montaigne. La vie mondaine s'impose progressivement aux écrivains. Beaucoup ont une solide « aversion pour tous les solitaires » enfermés parmi les livres. « Je préférerais volontiers l'entretien d'un paysan ignorant [...] à celui de Platon et de Sénèque » (Boisrobert, 1634).



6. Le moralisme



Dans une société stable, solidement hiérarchisée, comme celle de l'ère féodale, les modes de vie personnels ne peuvent menacer les structures : le moralisme n'y est pas nécessaire. Il le devient dans une société ouverte, concurrentielle, où les gens ne sont plus enracinés, où financiers, courtisans et autres profiteurs doivent être entreprenants où l'argent libère les désirs, où chacun suit son intérêt, où le statut ne dépend plus seulement de la naissance mais du comportement et de la considération des autres. C'est chez Descartes que morale prend le sens d'éthique (1637) et chez Pascal celui d'ensemble de règles de conduite (vers 1660). Moraliste, au sens d'écrivain qui analyse les mours, n'apparaît que chez Furetière (1690). Le moralisme nécessaire à l'assujettissement est parallèle aux autres disciplines que sont l'absolutisme, le rationalisme, le classicisme, réputation du langage. Il s'affirme particulièrement dans la bourgeoisie, composée de légistes et administrateurs portés à la discipline et de négociants et financiers soucieux d'économiser pour accumuler les moyens de leur puissance. La morale aussi est une économie, restriction des désirs dépensiers. De plus, soucieuse d'être reconnue comme élite, la bourgeoisie veut se montrer parfaite et oppose la supériorité de la vertu à celle de la naissance. La littérature, écrite et régentée par des bourgeois, susceptible d'être censurée par l'Église et le pouvoir, commence à éliminer tout ce qui pourrait choquer. Les libertins de maintenant ne sont plus les brillants provocateurs du premier quart de siècle, mais de graves éru-dits, confinés dans leurs bibliothèques et leur latin, mais en contact avec toute l'Europe savante : les frères Dupuy, autour desquels se réunit une libre et savante académie, La Mothe Le Vayer, Naudé, Diodati. Gassendi est croyant mais sa pensée philosophique et scientifique est inspirée des continuateurs d'Épicure et de Copernic.






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