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Essais littéraire

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Joris-Karl HUYSMANS 1848-1907






Le parcours de Huysmans-écrivain a eu des inflexions inattendues et elles traduisent les incarnations successives, les sincérités d'un homme. Le premier Huysmans est naturaliste. Après la guerre qu'il décrira dans Sac au dos (1877 puis dans les Soirées de Médan, 1880), et dont il a connu le cortège de misères, il devient un petit fonctionnaire et surtout un écrivain : le Drageoir aux épices (1874) doit le lancer, avec quelques articles dans les revues, et il s'intègre à la mouvance réaliste ; il connaît à cette époque Flaubert, Goncourt, Zola et leurs disciples (Alexis, Henni-que, Céard et Maupassant avec lesquels il forme le « groupe des Cinq »). Zola est son maître en littérature et Huysmans commente l'Assommoir dont les romans de cette époque partagent l'esthétique : Marthe, histoire d'une fille (1876), les Sours Vatard (1878) et, plus tard, En marge (1881) et À vau-l'eau (1882). À rebours (1884), à travers le portrait-charge de Des Esseintes, montre ces décadents qui précédèrent les symbolistes, tandis qu'avec Un dilemme (1887), En rade (1887) fait la description de « l'ordure des âmes et du néant des choses », dans une sorte de paroxysme névrotique et pessimiste qui laisse la place pour autre chose que « cette porcherie de naturalisme ».



D'autres curiosités semblent alors le retenir : l'art, bien sûr (Certains, 1889 après l'Art moderne, 1883), avec une sensibilité particulière pour les impressionnistes et les symbolistes, mais surtout la religion sous toutes ses formes. Là-bas (1891), à mi-chemin entre le satanisme et la haute mystique, poursuivi par En route (1895), oppose au réalisme les visions surnaturelles et une foi dont le personnage autobiographique de Durtal fait l'expérience dure et enrichissante ; quant à Huysmans, il fait des retraites, en particulier chez les bénédictins, et cette conversion débouche sur les romans « catholiques » que sont la Cathédrale (1898), l'Oblat (1903), sur l'hagiographie même (Sainte-Lydwine de Schiedam, 1901). Huysmans, qui est lui-même devenu oblat, disparaît le 12 mai 1907.



« Le plus forcené des réalistes » ?...



L'opposition entre le Huysmans naturaliste et le Huysmans mystique a trop caché l'unité profonde d'une démarche d'écrivain. Un passage de Là-bas permet de comprendre et de dépasser l'apparente contradiction : Huysmans évoque le célèbre retable d'Issenheim et y montre successivement à l'ouvre, dans le même tableau, le plus forcené des réalistes et le plus forcené des idéalistes. Le peintre Grûnewald exhibe en effet les plaies purulentes du Christ, son corps verdâtre en décomposition, il a trempé son pinceau « dans les godets sanguinolents des trous », mais il est aussi celui qui, dans cette « charogne éployée », a sublimé la détresse infinie de l'âme, a, d'une triomphale ordure, « extrait les menthes les plus fines des dilections ». De même, on trouve dans l'ouvre de Huysmans de nombreux passages délibérément provocateurs, à la limite de la nausée : la description, par exemple, de certains repas pris dans des gargottes, de telle boutique de boucher où l'on a pendu un quartier de bouf à la Rembrandt : « la tête avait été violemment arrachée du tronc et des bouts de nerfs palpitaient encore, convulsés comme des tronçons de vers, tortillés comme des lisérés »... Mais il y a dans l'excès même de cette vision quelque chose d'irréaliste qui mène de la physiologie au fantastique. À fouiller la réalité, et spécialement des objets les plus répugnants, Huysmans y fait naître le surnaturel, l'inouï, nous propose aussi une sorte de voyage métaphysique. Et, entre autres thèmes que retient Huysmans, celui de la mort et de la corruption domine, il semble s'accorder tout particulièrement à cette entreprise métaphysique ; dans le corps du Christ comme dans le quartier de boucherie, il y a un départ vers l'infini, la source d'une fascination : le spectacle horrible est dépassé par le tableau qui en est donné. La rédemption du laid par le « beau » a bien ici les valeurs qu'elle prend dans l'esthétique moderne : non seulement élargir le champ de la réalité décrite (c'est la revendication explicite du naturalismE), mais aussi montrer que l'écriture peut esthéti-ser ce qui y semble le plus rebelle : « à droite, tout le quai de Javel hérissé de tuyaux d'usines, de tuyaux en brique, carrés et cerclés de fer, de tuyaux ronds à la bouche colletée de noir, de cheminées en fonte et à soupapes, attachées à des toits voisins par des fils qui se croisent » (le Drageoir aux épiceS).



Une écriture artiste



Le style de Huysmans donne souvent l'impression qu'un certain dandysme est à l'origine de cette recherche littéraire. Le Des Esseintes d'À rebours viendrait sûrement confirmer une telle interprétation ; l'ambiguïté du personnage et du sens même de l'ouvre peut nous y faire voir tantôt la satire des clichés pré-symbolistes, tantôt la perception très claire de ce que Huysmans porte en lui-même et qu'il projette sur un personnage caricatural. C'est bien cette « sincérité »-là qui nous importe dans le Des Esseintes de Huysmans. Ses goûts le portent en littérature vers la latinité du Bas-Empire et, en ce qui concerne les contemporains, vers le poème en prose baudelairien qui serait le « suc concret, l'osmazôme de la littérature, l'huile essentielle de l'art », rejoignant à un millénaire de distance l'agonie du latin faisandé des derniers âges. Au fond, cette esthétique de Des Esseintes répond dans le domaine du signifiant aux thèmes de mort évoqués plus haut : dans les deux cas, le sentiment qui domine est celui d'une fin de siècle, d'une décadence qui fut non seulement une idée à la mode vers 1880, mais aussi une poétique : le mot érudit ou compliqué sera privilégié, avec une faveur particulière pour les références rares, les noms compliqués ou les consonances étrangères, les néologismes. La syntaxe aussi semble prendre plaisir à la difficulté, aux guirlandes infinies d'images, de subordonnées, d'énumérations, un peu dans la manière que les Goncourt ont pu illustrer ailleurs. Ce style ne recule pas devant l'outrance chargée, mais peu importe dans la mesure où il est délibérément « artiste », c'est-à-dire en rupture avec la commune manière de parler, et donc « artificiel » ; il montre de toute façon une recherche qui prendra d'autres formes, il est vrai plus simples, en débouchant sur la siritualité.



La « conversion » de Huysmans



Cette conversion est une rupture mais dont on sent bien, désormais, la logique : au même titre que l'art exprimait le mépris de la vie et rachetait celle-ci par une transcendance esthétique (l'écriture artistE), la religion, à son tour, et l'Église, hôpital des âmes, peut offir un remède au désarroi de vivre. Le modèle, cette fois-ci, ne sera pas celui de la décadence latine, mais celui de la chrétienté médiévale, de la cathédrale et du plain-chant ; et alors que l'artiste moderne tient à « exhiber sa science, à exalter sa gloire », omettant Dieu par là-même, l'artiste médiéval est anonyme lorsqu'il disparaît derrière son ouvre qui n'est elle-même qu'une louange adressée à Dieu, une preuve de foi. Il se produit alors un curieux accord entre le symbolisme médiéval et ce que l'époque contemporaine a gardé d'imagination mystique. Chartres, par exemple, est le « grand répertoire peint et sculpté du Moyen Âge, mais la cathédrale est surtout un espoir pour remédier aux misères des hommes d'aujourd'hui : pour un artiste, surtout, elle est le lien entre rédemption esthétique et rédemption tout court ; la célébrer, c'est se sauver et peut-être sauver la littérature, dont Huysmans, d'ailleurs, fait moins un but en soi qu'une voie : après En rade. En route...



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