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DE QUINCEY






Avant de tâcher de définir la pensée de De Quincey, à supposer que cette tâche soit réalisable, il convient d'accorder la plus grande attention à toutes les idées, images, impressions de toutes sortes qui, arrivant du dehors ou du fond de son esprit, viennent occuper celui-ci et peupler son existence.



On pourrait faire l'inverse : s'efforcer d'abord de préciser ce que pourrait être cette pensée initialement, et se demander ensuite comment celle-ci aurait été modifiée par les influences qui se seraient exercées sur elle. Mais cela supposerait qu'avant ces modifications, il y eût déjà chez De Quincey une pensée formée, nettement reconnais-sable. Or cela est douteux. D'ailleurs la question pourrait se poser dans les termes les plus généraux : que sommes-nous tant que nous sommes, avant de recevoir les impulsions et inspirations qui viennent animer notre pensée ? Sommes-nous au fond de nous des êtres définis ou ne dépendons-nous pas entièrement d'un apport extérieur ou intérieur pour avoir une authentique existence mentale ? Sans essayer de répondre à cette question sur le plan général, constatons simplement que dans le cas de De Quincey, vouloir y donner une réponse ferme serait bien aléatoire. De Quincey était-il un de ces êtres révélant inopinément une personnalité déjà formée ? N'était-il pas au contraire un de ces poètes qui presque aussitôt se révèlent comme n'existant que grâce aux rapports variés, entretenus constamment par eux, soit avec le monde externe, soit, plus confusément, à l'intérieur d'eux-mêmes, par des poussées obscures venant du fond de leur personne ? Quoi qu'il en soit, une chose semble certaine. C'est que la vie profonde de De Quincey n'apparaît jamais comme un état stable, où les influences à l'ouvre, externes comme internes, n'auraient jamais qu'un rôle superficiel et éphémère. Il apparaît, au contraire, que cette pensée ne s'ébranle jamais que lorsqu'elle se sent envahie et déterminée - à supposer qu'il s'agisse là de détermination - par des forces difficilement définissables qui, tour à tour, ou toutes ensemble, et sans qu'on puisse clairement en percevoir les origines déferlent sur elle, s'en emparent, l'animent et la débordent. Impulsions, impressions, souvenirs, désirs semblent venir vers elle d'une région imprécise, en tout cas de très loin. On pourrait les comparer à des formes plus ou moins indistinctes perçues dans le ciel par un contemplateur se situant au bord de la mer sur un promontoire, et qui, de là-haut, passerait son temps à les voir venir du fond de l'horizon. De Quincey compare cet arrivage à celui de grandes bandes d'oiseaux de différentes races, certains exotiques ou d'espèce rare, venant s'abattre sur terre après un vol collectif au-dessus des eaux. On les dirait porteurs d'un message : message qui pourrait être constitué d'idées enchevêtrées, confuses, provenant de lieux, d'époques, de races différents, mais emportées pour quelque obscure raison dans le même remous et atterrissant dans le désordre au même moment. De plus, mêlées à d'autres images, ces dernières n'ayant pas d'origine déterminée, ni de signification particulière, mais tournées vaguement vers le futur. Les unes se mouvant par groupes, les autres détachées, et réalisant un atterrissage, collectif ou solitaire, sans que celui qui les accueille puisse jamais nous faire comprendre pourquoi elles abordent plutôt dans tel ordre que dans tel autre.





C'est ainsi qu'on pourrait décrire l'assaut varié mais multiple et constant des images dans la pensée de De Quincey. Ne cherchons pas à y mettre de l'ordre. N'espérons pas non plus en dégager des significations définies. La pensée de De Quincey, affectée comme elle l'est presque continuellement par les fumées de la drogue, est ouverte à tous les vents. Remarquons seulement que le caractère incontestablement indéterminé que présente cette vie spirituelle n'est nullement le fait d'un vide intérieur, ni d'une incapacité congénitale à déterminer nettement ses pensées, mais, au contraire, de l'extraordinaire profusion avec laquelle toutes les tendances, toutes les images, tous les sentiments exacerbés le plus souvent par l'opium s'épanouissent dans le cerveau du poète sans contrôle. Dans une telle pensée, il n'y a jamais pénurie, il y a toujours pléthore. Et par-delà ce foisonnement du détail, il y a quelque chose d'autre encore : c'est l'étrange facilité avec laquelle tous les éléments composants de cet ensemble en apparence disparate s'associent les uns aux autres, pour former dans la conscience un cortège somptueux, se déroulant avec splendeur. Cortège fait d'idées, d'images, de formes rêvées, mais surtout de mots. La parole, ici, démesurément gonflée, constitue un discours continu d'une exceptionnelle éloquence (personne n'a jamais su mêler avec autant d'ampleur toutes les qualités de l'art oratoire à celles de la poésiE), s'il n'y avait d'autre part dans le déroulement de cette theoria un manque surprenant de suite dans les idées et l'absence de quelque principe déterminant que ce soit. Tantôt ce qui apparaît dans cet étrange discours, ce sont des appels anonymes émanant du plus profond lointain; tantôt c'est une pluralité discordante d'expériences sensibles enchevêtrées; tantôt des silences rompus par des exclamations, ou des extases profondes ; enfin de longues digressions oiseuses et étonnamment pesantes en dépit de la puissance de leur déploiement.

Et pourtant tout cela, digressions et discours, appels divers et contradictoires, longues périodes solennelles, réussit à créer autour de celui qui parle et qui rêve, une sorte de dilatation verbale qui ne laisse pas d'être grandiose. Au centre, la présence indubitable d'une pensée qui disparaît dans la multiplicité des formes dont elle s'entoure : exemple parfait de l'Ego involutus dont parlent les Anciens.



DE QUINCEY : TEXTES



Parfois l'on arrive à une capacité d'extension et de multiplication de soi véritablement infinie.

Des processions fantasmagoriques peuvent se dérou1er dans le cerveau de certains enfants. Des projections obscures y ont lieu, timbras et penumbras, que les profondeurs inexplorables de la nature humaine sont susceptibles, en de certaines circonstances, de faire surgir au-dehors.



Multiplication sans fin d'un simple visage dans une pièce pleine de miroirs.



L'on s'enfonce de plus en plus profondément dans l'infini, comme dans une série de gouffres qui béent les uns en dessous des autres.

Pouvoir que possède l'esprit de s'enfoncer dans son propre abîme intérieur.



Quand le soleil est perçu à travers un brouillard, dit Sarah Coleridge, il ressemble, si resplendissant qu'il puisse être d'ordinaire, à une orange terne ou à une bille rouge. C'est ainsi, selon la même analogie, que certains sentiments de souffrance ou de joie atteignent leur expression la plus émouvante quand ils sont réverbérés dans les rêves.



Parfois, en rêve, l'on se sent dormir à grande distance de toute présence amie, dans une chambre sans mur, sans portes, au-dessus de gouffres inconnus... Au milieu de tout cela, on est le centre d'un réseau d'appels, qui en rompant le silence se muent en forces positives et terribles.



... Pendant certaines nuits il m'est arrivé de rester immobile, pétrifié, sans conscience de moi-même, sinon en tant que partie intégrante d'un drame multiforme se déroulant autour de moi.



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