Essais littéraire |
Boileau est l'homme qui va toujours droit au but et qui affecte de parler sans ambages. Il a horreur des voies détournées, du parler équivoque et des formes incertaines. Aucune ambiguïté, mais une franchise totale, une ouverture d'esprit qui ne tolère ni réserve, ni embarras, ni dissimulation. Il faut se montrer tel qu'on est, tel qu'on pense, sans rien cacher, sans rien atténuer avec une assurance entière. Pas d'hésitation, pas de nuance, pas de mystère. Toute obscurité serait un défaut, sans compter qu'elle serait ridicule, nuisible et condamnable. C'est de cette façon, et de cette façon seule, qu'il faut apprécier la poésie. Non dans ses pudeurs, ses circonlocutions ni ses confusions. La seule poésie tolérable est celle qui dit toujours ce qu'elle a à dire directement, sans détour, en pleine lumière. Si Villon, par exemple, est un meilleur poète que ses prédécesseurs, c'est qu'il ne s'embarrassait pas comme eux d'un langage embrouillé. Il faut écrire, au contraire, dans la simplicité et la clarté maximum. Tout doit « s'énoncer clairement ». Ainsi protégée de tout ce qui pourrait l'encombrer, l'affaiblir, l'ouvre se présente telle qu'elle est, dans sa nudité, absolument nette, en pleine lumière. Elle atteint sans tergiverser ce qu'elle vise : car elle est tout entière dans sa visée. Aucune hésitation, aucune voile, aucune lenteur. Nulle ouvre ne fait montre plus lumineusement de sa qualité maîtresse : la détermination. BOILEAU : TEXTES Je ne puis rien nommer, si ce n'est par son nom. (Sat., I.) Chacun suit dans le monde une route incertaine, Selon que son erreur le joue et le promène Le plus sage est celui... qui... Se regarde soi-même en sévère censeur. Rend à tous ses défauts une exacte justice (Sat., IV.) J'aime un Esprit aisé, qui se montre, qui s'ouvre, Et qui plaît d'autant plus que plus il se découvre ... Le vice toujours sombre aime l'obscurité. (Epttre, IX.) S'adressant à lui-mêmE) :... « Vous cherche^ le grand'jour » (c'est-à-dire la pleine lumièrE). (Epttre, X.) Villon sut le premier Débrouiller l'art confus de nos vieux Romanciers (Art poétique, I.) Il est certain esprits, dont les sombres pensées Sont d'un nuage épais toujours embarrassées. Le jour de la raison ne le saurait percer Selon que notre idée est plus ou moins obscure L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure. Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement... (Art poétique, I.) (Paroles d'un soi-disant ami à BoileaU) . Votre construction semble un peu s'obscurcir : Ce terme est équivoque, il le faut ÉCLAIRCIR. ». (Art poétique, H.) |
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