wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 

Ahmed Balbadaoui



à ma fille fadwa - Poéme


Poéme / Poémes d'Ahmed Balbadaoui





Lorsque j'ai écrit ton nom sur le poignet d'un minaret, celui-ci

s'est écroulé.
J'ai alors réparti les lettres du nom sur des palmes.

Cela m'a donné une lune verte.
J'ai essayé d'écrire le même

nom sur la cuisse d'un minaret.
Il s'est écroulé.
J'ai de nouveau

écrit le nom sur des palmes.
Une pluie de dattes vertes m'a

surpris et m'a ouvert la porte de la mer.

Fadwa, porte de la mer !

Lorsque j'ai commencé à tracer la première lettre de ton nom

mes doigts se sont comme étranglés

Je me suis rappelé une femme vidant d'en haut

un seau d'ordures

sur la tête d'un enfant de deux ans

qui marchait paisiblement sous le balcon

J'ai ri, car dans mon pays

les enfants sont une vigne sauvage

une rivière de bananes et de mûres

Fadwa, porte de la mer

billet de douce union avec le monde

sais-tu ce que coûte le voyage dans les îles de la pureté ?

Ne crains rien, j'ai tout consigné

.depuis les douleurs de l'enfantement jusqu'à ce jour

J'avais pour plume le soufre, la pluie pour encre

et les fleuves pour encrier

J'ai noté que tu étais comme les enfants de mon pays

tu as tété

le lait d'un sein importé

et à mesure que le prix du lait augmentait

le taux du refus

montait dans le sang

C'est pourquoi le « non » fut le premier mot

qui sortit tel un babil

de ton index

des hochements de ta tête

de tes yeux couleur de feu

C'est pour cela aussi que tu es venue au monde

le soleil ce jour-là en était témoin

Fadwa, ô oiseau né de nos espérances

et de notre détermination

Mehdi est mort

Son cadavre se nourrit toujours de conjectures

et de promesses trompeuses

« pluie, pluie

O fils de laboureurs »

ont chanté les fils de laboureurs

Voilà que des branches et des mains

ont poussé à la faucille

et
Mehdi est mort

Son cadavre se nourrit toujours de conjectures

et de promesses trompeuses

« pluie, pluie

fils de laboureurs »

Voici que la faucille remue les plaies du
Rif

Parle donc aux enfants de leur résidence

dans les douleurs de la pluie

car
Mehdi est mort

Viens reposer sur mon épaule, que je te raconte une histoire

ma tête, cette tête que je mets maintenant entre tes mains

est une station

où les routes de gauche se tordent de rire

Bien sûr, tu ne sais peut-être pas

comment une tête, celle de ton père en l'occurrence

peut devenir une station

Bon

je vais tout t'expliquer :

Tu vois cette ligne qui saigne

eh bien elle recoupe le carrefour des braises

s'étire à gauche jusqu'à la capitale de la menthe

traverse tous les balcons affamés

au front desquels poussent des mûres

et finit par s'unir à toi

car tu es une vigne sauvage

car les enfants sont une rivière de bananes et de mûres

car l'aboutissement ou le fin fond de ce monde

est soit une vigne soit un palmier

Écoute,
Fadwa : que dit cette radio dans son délire ?

«
Au quatrième top il sera exactement »

Ce temps putride dégueule ses passagers

au point le plus reculé

de l'univers

«
Au quatrième top sera le
Jugement dernier »

Le chah
Allah est accroupi, seul dans la place

Le fil de la genèse lui glisse entre les mains

et ton père

cet Odipe sorti du ventre de la baleine

a tué père et mère

Dans ses pupilles, les yeux de
Zarqa se sont allumés

Mais le sphinx dressé à l'entrée de
Thèbes

a été épargné, lui

Viens donc ma fille, allons le tuer

«
Au quatrième top sera le
Jugement dernier »

La radio a interrompu une chanson insipide

sur des amours défaites

Fadwa m'a demandé ce qu'elle voulait dire

J'ai répondu :
Je ne sais pas

sauf qu'en l'écoutant j'ai cherché mon cou

et ne l'ai pas retrouvé

Je me rappelle avoir chanté un soir la même chanson

et une forêt de tabac s'est embrasée dans mon gosier

Qui la chantait ? m'a-t-elle demandé

Je ne sais pas. ai-je répondu

puis je me suis repris :
Peut-être
Hafid

ou
Acide peu importe

Ce que tu dois savoir, ma fille

c'est que le vrai amour peut faire mourir

et la terre a besoin, pour accomplir sa révolution

d'un amoureux

en forme de fruit





Note

Certains amis pourront se demander, ô
Fadwa

pourquoi je ne t'ai pas offert de fleurs pour ton anniversaire

Je suis excusable, ma fille

Les fleurs se t'ont rares ces temps-ci

En vérité, j'en ai cherché

mais je n'ai trouvé que des roses armées de serres

et si je t'en avais offert

qui m'aurait garanti qu'elles n'allaient pas s'avérer féroces ?

C'est pour cela que j'ai mis longtemps à choisir

ce qui serait le plus pur

ce qui serait le plus précieux

Alors des nuées de thym sont venues piailler

et se prélasser dans ma paume



Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.

Ahmed Balbadaoui
(1948 - ?)
Portrait de Ahmed Balbadaoui
mobile-img