Répare-t-on jamais un cour en morceaux - Poéme Tristesse

Elle bâtit, folle,
Sa vie sentimentale
Sur le sable mouvant
Des aventures hasardeuses
Batifolant, par-ci par-là,
Rongée par la peur du vide

Ainsi qu'un voile dans la bourrasque
Elle s'accroche au premier mat dressé
À ses échardes se déchire un peu plus,
s'agrippant vainement, laissant ses lambeaux
Dans les draps ternis de l'oubli

Âme éperdue à la dérive
Comment trouver un port
à l'abri des chicaneuses marrées
Loin des cotes déchiquetées
Par les assauts de la houle

Les marins qui dans son anse s'échouent
Après de douloureux et sombres naufrages
N'y font que reprendre des forces
Et fuient vers d'autres périlleux périples

Ces oiseaux de grands larges
Rescapés de milles tempêtes
jettent l'ancre de ci de-là
Dans toutes les eaux glauques

Ils espèrent aux dépens de leurs hôtes
Réparer d'irréversibles avaries
Mais répare-t-on jamais
Un cour, une vie en morceaux ?

Elle folle, désireuse, défait sa vie
Étoffe décousue, défraîchie
Buvant sa brume jusqu'à plus soif
Sirène affalée dans son lac d'ennui.