Non - Poéme

Laissons le glaive à
Rome et le stylet à
Sparte.
Ne faisons pas saisir, trop pressés de punir.
Par le spectre
Brutus le brigand
Bonaparte.
Gardons ce misérable au sinistre avenir.



Vous serez satisfaits, je vous le certifie,
Bannis, qui de l'exil portez le triste faix,
Captifs, proscrits, martyrs qu'il foule et qu'il délie.
Vous tous qui frémissez, vous serez satisfaits.



Jamais au criminel son crime ne pardonne;
Mais gardez, croyez-moi. la vengeance au fourreau;
Attendez; avez foi dans les ordres que donne
Dieu, juge patient, au temps, tardif bourreau!



Laissons vivre le traître en sa honte insondable.
Ce sang humilierait même le vil couteau.
Laissons venir le temps, l'inconnu formidable
Qui tient le châtiment caché sous son manteau.



Qu'il soit le couronné parce qu'il est le pire;
Le maître des fronts plats et des cours abrutis;
Que son sénat dérenie à sa race l'empire.
S'il trouve une femelle et s'il a des petits;



Qu'il règne par la messe ei par la pertuisane;
Qu'on le lasse empereur dans son flagrant délit;
Que l'église en rampant, que cette courtisane
Se glisse dans soii antre et couche dans son lit;

Qu'il soit cher à
Troplong. que
Sibour le vénère,
Qu'il leur donne son pied tout sanglant à baiser.
Qu'il vive, ce césar!
Louvel ou
Larenaire
Seraient pour le tuer forcés de se baisser.

Ne tuez pas cet homme, ô vous, songeurs sévères,
Rêveurs mystérieux, solitaires et forts.
Qui, pendant qu'on le lète et qu'il choque les venes.
Marchez, le poing crispé, dans l'herbe ou sont les nions!

Avec l'aide d'en haut toujours nous triomphâmes.
L'exemple froid vaut mieux qu'un éclair de fureur.
Non, ne le tuez pas.
Les piloris infâmes
Ont besoin d'être ornés parfois d'un empereur.



Jersey.
Octobre 1852.