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Pierre de Ronsard



Sonnets et madrigals pour astrée - Poéme


Poéme / Poémes d'Pierre de Ronsard





I



Dois-je voler, emplumé d'espérance,
Ou si je dois, forcé du désespoir,
Du haut du
Ciel en terre laisser choir
Mon jeune amour avorté de naissance?

Non, j'aime mieux, léger d'outrecuidance,
Tomber d'en-haut et fol me décevoir,
Que voler bas, dussé-je recevoir
Pour mon tombeau toute une large
France.

Icare fi t de sa chute nommer,
Pour trop oser, les ondes de la mer
Et moi je veux honorer ma contrée

De mon sépulchre et dessus engraver :
Ronsard, voulant aux astres s'élever,
Fut foudroyé par une belle
Astrêe.



II



Le premier jour que j'avisai la belle
Ainsi qu'un
Astre éclairer à mes yeux,
Je discourais en esprit si les
Dieux
Au ciel là-haut étaient aussi beaux qe'elle.

De son regard mainte vive étincelle
Sortait menu comme flamme des
Cieux,
Si qu'ébloui du feu victorieux,
Je fus vaincu de sa clarté nouvelle.

Depuis ce jour mon cour qui s'alluma.
D'aller au
Ciel sottement présuma,
En imitant des
Géants le courage.

Cesse, mon cour, la force te défaut;
Bellérophonl te devrait faire sage :
Pour un mortel le voyage est trop haut.



III



Belle
Erigone,
Icarienne race *,
Qui luis au
Ciel et qui viens en la terre
Faire à mon cour une si douce guerre.
De ma raison ayant gagné la place;

Je suis vaincu, que veux-tu que je fasse
Sinon prier cet
Archer qui m'enferre,
Que doucement mon lien il desserre,
Trouvant un jour pitié devant ta face?

Puisque ma nef au danger du naufrage
Pend amoureuse au milieu de l'orage,
De mât, de voile assez mal accoutrée,

Veuille du
Ciel en ma faveur reluire.
Il appartient aux
Astres, mon
Astrée,
Luire, sauver, fortuner et conduire.



MADRIGAL
I

L'homme est bien sot qui aime sans connaître.
J'aime et jamais je ne vis ce que j'aime;
D'un faux penser je me déçois moi-même,
Je suis esclave et ne connais mon maître.

L'imaginer seulement me fait être
Comme je suis en une peine extrême.
L'oil peut faillir, l'oreille fait de même,
Mais nul des sens mon amour n'a fait naître.

Je n'ai ni vu, ni ouï, ni touché,
Ce qui m'offense à mes yeux est caché,
La plaie au cour à crédit m'est venue.

Ou nos esprits se connaissent aux
Cieux
Ains que d'avoir notre terre vêtue,
Qui vont gardant la même affection
Dedans les corps qu'au
Ciel
Us avaient eue;

Ou je suis fol; encore vaut-il mieux
Aimer en l'air une chose inconnue
Que n'aimer rien, imitant
Ixion,
Qui pour
Junon embrassait une nue ».



IV



Douce
Françoise , ainçois * douce framboise,
Fruit savoureux, mais à moi trop amer,
Toujours ton nom, hélas pour trop aimer,
Vit en mon cour quelque part que je voise.

Ma douce paix, mes trêves et ma noise,
Belle qui peux mes
Muses animer,
Ton nom si franc * devrait t'accoutumer
Mettre les cours en franchise
Françoise.

Mais tu ne veux redonner liberté
Au mien captif que tu tiens arrêté,
Pris en ta chaîne étroitement serrée.

Laisse la force :
Amour le retiendra;
Ou bien,
Maîtresse, autrement il faudra
Que pour
Françoise on t'appelle ferrée.

De quoi te sert mainte
Agate gravée.
Maint beau
Rubis, maint riche
Diamant?
Ta beauté seule est ton seul ornement,
Beauté qu'Amour en son sein a couvée.

Cache ta perle en l'Orient trouvée,
Tes grâces soient ces bagues seulement :
De tes joyaux en toi parfaitement
Est la splendeur et la force éprouvée.

Dedans tes yeux reluisent leurs beautés,
Leurs vertus sont en toi de tous côtés;
Tu fais sur moi tes miracles, ma
Dame.

Sans eux je sens que peut ta
Déité :
Tantôt glaçon et tantôt une flamme,
De jalousie et d'amour agité,
Pâle, pensif, sans raison et sans âme,
Ravi, transi, mort et ressuscité.



V



Jamais
Hector aux guerres n'était lâche
Lorsqu'il allait combattre les
Grégeois;
Toujours sa femme attachait son harnois,
Et sur
Parmet lui plantait son pennache.

Il ne craignait la
Pélienne * hache
Du grand
Achille, ayant deux ou trois fois
Baisé sa femme, et tenant en ses doigts
Une faveur de sa belle
Andromache.

Heureux cent fois, toi
Chevalier errant,
Que ma
Déesse allait hier parant,
Et qu'en armant baisait comme je pense!

De sa vertu procède ton honneur,
Que plût à
Dieu, pour avoir ce bonheur,
Avoir changé mes plumes à ta lance



Vi



Il ne fallait,
Maîtresse, autres tablettes
Pour vous graver que celles de mon cour,
Où de sa main
Amour, notre vainqueur,
Vous a gravée et vos grâces parfaites.

Là vos vertus au vif y sont portraites,
Et vos beautés, causes de ma langueur,
L'honnêteté, la douceur, la rigueur,
Et tous les biens et maux que vous me faites.

Là vos cheveux, votre oil et votre teint
Et votre front s'y montre si bien peint,
Et votre face y est si bien enclose,

Que tout est plein : il n'y a nul endroit
Vide en mon cour, et quand
Amour voudrait,
Plus ne pourrait y graver autre chose.



VII



Au mois d'avril, quand l'an se renouvelle,
L'Aube ne sort si belle de la met.
Ni hors des flots la
Déesse d'aimer
Ne vint à
Cypre en sa conque si belle,

Comme je vis la beauté que j'appelle
Mon
Astre saint, au matin s'éveiller,
Rire le ciel, la terre s'émailler.
Et les
Amours voler à
Fentour d'elle.

Beauté, jeunesse, et les
Grâces qui sont
Filles du
Ciel, lui pendaient sur le front;
Mais ce qui plus redoubla mon service,

C'est qu'elle avait un visage sans art.
La femme laide est belle d'artifice,
La femme belle est belle sans du fard.



Depuis le jour que je te vis,
Maîtresse,
Tu as passé deux fois auprès de moi :
L'une, muette et d'un visage coi,
Sans daigner voir quelle était ma tristesse;

L'autre, pompeuse, en habit de
Déesse,
Belle pour plaire aux délices d'un
Roi,
Tirant de l'oil tout à l'entour de toi
Pour voir ton voile une amoureuse presse.

Je pensais voir
Europe sur la mer *,
Et tous les vents en ton voile enfermer,
Tremblant de peur, te regardant si belle,
Que quelque
Dieu ne te ravît aux
Cieux,
Et ne te fît une essence immortelle.

Si tu m'en crois, fuis l'or ambitieux.
Ne porte au chef une coiffure telle.
Le simple habit, ma
Dame, te sied mieux.



VIII



L'Astre divin, qui d'aimer me convie,
Tenait du
Gel la plus haute maison ,
Le jour qu'Amour me mit en sa prison,
Et que je vis ma liberté ravie.

Depuis ce temps j'ai perdu toute envie
De me ravoir, et veux que la poison
Qui corrompit mes sens et ma raison,
Soit désormais maîtresse de ma vie.

Je veux pleurer, sangloter et gémir,
Passer les jours et les nuits sans dormir,



IX



Le premier jour que l'heureuse aventure
Conduit vers toi mon esprit et mes pas,
Tu me donnas pour mon premier repas
Mainte dragée et mainte confiture.

Jalouse après de si douce pâture,
En mauvais goût tu changeas tes appas,
Et pour du sucre, ô cruelle, tu m'as
Donné du fiel qui corrompt ma nature.

Le sucre doit pour sa douceur nourrir.
Le tien m'a fait cent mille fois mourir.
Tant il se tourne en fâcheuse amertume.

Ce ne fut toi, ce fut ce
Dieu d'aimer
Qui me déçut, poursuivant sa coutume
D'entremêler le doux avec l'amer.



X



Adieu, cheveux, liens ambitieux.
Dont l'or frisé me retint en service,
Cheveux plus beaux que ceux que
Bérénice *
Loin de son chef envoya dans les
Cieux.

Adieu miroir, qui fais seul glorieux
Son cour trop fier d'amoureuse malice.
Amour m'a dit qu'autre chemin j'apprisse,
Et poutce adieu belle bouche et beaux yeux.

Trois mois entiers d'un désir volontaire
Je vous servis, et non comme forçaire *,
Qui par contrainte est sujet d'obéir.

Comme je vins je m'en revais, maîtresse,
Et toutefois je ne te puis haïr.
Le cour est bon, mais la fureur me laisse.



XI

Quand tu portais l'autre jour sur ta tête
Un vert
Laurier, était-ce pour montrer
Qu'homme si fort ne se peut rencontrer,
Dont la victoire en tes mains ne soit prête?

Ou pour montrer ton heureuse conquête
De m'avoir fait en tes liens entrer ?
Dont je te pri' me vouloir dépêtrer.
Peu sert le bien que par force on acquête.

Le
Laurier est aux victoires duisant.
Le
Romarin* dont tu m'as fait présent,
Désespéré m'a fait lever le siège.

C'était congé que je prends maugré moi,
Car de vouloir résister contre toi,
Astre divin, c'est être sacrilège.



XII



Je haïssais et ma vie et mes ans,
Triste j'étais, de moi-même homicide,
Mon cour en feu, mon oil était humide,
Les cieux m'étaient obscurs et déplaisants;

Alors qu'Amour dont les traits sont cuisants,
Me dit : «
Ronsard, pour avoir un bon guide
De l'Astre saint qui maître te préside,

Peins le portrait au milieu de tes gants. »

Sans contredit à mon
Dieu j'obéi.
J'ai bien connu qu'il ne m'avait trahi,
Car dès le jour que je fis la peinture,

Heureux je vis prospérer mes desseins.
Comment n'aurai-je une bonne aventure,
Quand j'ai toujours mon
Astre entre les mains ' ?



XIII



Est-ce le bien que tu me rends, d'avoir
Pris dessous moi ta docte nourriture.
Ingrat disciple et d'étrange nature*?
Pour mon loyer me viens-tu décevoir?

Tu me devais garder à ton pouvoir
De n'avaler l'amoureuse pâture,
Et tu m'as fait sous douce couverture
Dedans le cour la poison recevoir.

Tu me parlas le premier de ma
Dame,
Tu mis premier le soufre dans ma flamme,
Et le premier en prison tu me mis.

Je suis vaincu, que veux-tu que je fasse,
Puisque celui qui doit garder la place,
Du premier coup la rend aux ennemis ?



XIV



A mon retour, hé! je m'en désespère,
Tu m'as reçu d'un baiser tout glacé,
Froid, sans saveur, baiser d'un trépassé,
Tel que
Diane en donnait à son frère,

Tel qu'une fille en donne à sa grand-mère,

La fiancée en donne au fiancé,

Ni savoureux, ni moiteux, ni pressé.

Et quoi! ma lèvre est-elle si amère?

Hàl tu devrais imiter les pigeons,
Qui bec en bec de baisers doux et longs
Se font l'amour sur le haut d'une souche.

Je te suppli', maîtresse, désormais
Ou baise-moi la saveur en la bouche,
Ou bien du tout ne me baise jamais.



XV



Pour retenir un amant en servage,
Il faut aimer et non dissimuler,
De même flamme amoureuse brûler,
Et que le cour soit pareil au langage.

Toujours un ris *, toujours un bon visage,
Toujours s'écrire et s'entre-consoler,
Ou qui ne peut écrire ni parler,
A tout le moins s'entrevoir par message.

Il faut avoir de l'ami le portrait,
Cent fois le jour en rebaiser le trait,
Que d'un plaisir deux âmes soient guidées,

Deux corps en un rejoints en leur moitié.
Voilà les points qui gardent l'amitié,
Et non pas vous qui n'aimez qu'en idées.



XVI



Si mon grand
Roi n'eût vaincu mainte armée *,
Son nom n'irait comme il fait dans les
Qeux;
Ses ennemis l'ont fait victorieux
Et des vaincus il prend sa renommée.



Si de plusieurs je te vois bien aimée,
C'est mon trophée et n'en suis envieux.
D'un tel honneur je deviens glorieux,
Ayant choisi chose tant estimée.

Ma jalousie est ma gloire de voir
Mêmes
Amour soumis à ton pouvoir.
Mais s'il advient que de lui je me venge,

Vous honorant d'un service constant,
Jamais mon
Roi, par trois fois combattant,
N'eut tant d'honneur que j'aurai de louange.


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Pierre de Ronsard
(? - 1585)
 
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Portrait de Pierre de Ronsard

Biographie

1524
- (10 ou 11 septembre) : naissance au château de la Posson-nière (Couture, Loir-et-Cher).

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