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Othon de Grandson



La complainte de saint valentin - Poéme


Poéme / Poémes d'Othon de Grandson





Je vois que chacun amoureux

Se veut ce jour apparier,

Je vois chacun être joyeux,

Je vois le temps renouveler,

Je vois rire, chanter, danser,

Mais je me vois seul en tristesse

Pour ce que j'ai perdu mon per *

Non pas per, mais dame et maîtresse.

J'en ai perdu ma contenance,



J'en ai perdu toute ma joye,

J'en suis déserté de plaisance

Trop plus que dire ne pourroie,

J'en suis, quelque part que je soye,

Trop douloureux outre mesure.

J'en suis tel que mourir voudroie

Quand je sens ma douleur si dure.



Mourir, voire, certainement,

Car j'ai perdu ma plaisant vie,

Mon espoir, mon avancement,

De tous biens ma droite partie.

J'ai tant perdu que j'entroublie

Tout plaisir et toute liesse,

Et toute plaisante compagnie

Me tourne à trop grant détresse.



Jamais ne ferai que languir

Pleurer sera mon réconfort,

Quand je pourrai être à loisir

Or ne requerrai que la mort.

Mon cour et moi sommes d'accord

De vivre ainsi piteusement.

Je ne quiers que hâter bien fort

La mort pour mon allégement.

Pleurez pour moi, je vous prie.

Tous cours qui aimez loyaulment.

Mais assez plus, je vous supplie.

Pleurez très douloureusement

Ma dame et son très bel corps gent

Que la mort a fait definer *

Par son dard outrageusement.

Que mon cour maudit sans cesser.

Hélas ! il n'était pas saison

Si tôt en son département.

Ce a bien été contre raison.

Mais il n'en peut être autrement.

Quand est à moi, tant seulement.

C'était tout mon bien en ce monde

Que la servir humblement

Seule sans nulle autre seconde.

Sans plus, cette douce pensée

Me tenait en ris et en jeux,

Toute joye m'était donnée

D'en être bien fort amoureux

Je me tenoye plus heureux

Cent fois que dire ne pourroye,

Quand de ses très doux riants yeux

Un doux regard sans plus avoye.



Plus me valait l'aimer ainsi
En aucune bonne espérance

D'en avoir aucun temps merci.

Que d'être roi de toute
France.
C'était la seule souvenance

De tous le bien de ma jeunesse.

Pour la choisir très mon enfance
Prit mon cour l'amoureuse adresse.

Or vois-je que j'ai tout perdu,

Et si ne se peut amender,

Dont je me vois si éperdu

Qu'âme ne le pourrai penser

De dire que puisse autre aimer

Après celle parfaitement,

Mon cour ne s'y peut accorder

A le désirer nullement.

Aussi crois-je bien, par ma foi,

Qu'âme ne le prendrait en gré,

Car mon cour voudrait, à part soi,

Choisir selon le temps passé,

Non jamais ne serai aimé

De nulle qui approchât celle,

Si trop grant débonnaireté

Ne se mêlait en la querelle.

Ainsi seul et plein de douleur

Demourrai ', je le vois trop bien.

Jamais ni plaisir ni douceur

N'approchera à moi de rien.



Je serai du simple maintien,

Comme tout dolent et honteux.

Ja * nulle ne me voudra sien,

Par quoi il me soit ja de mieux.

Ainsi que je me complaignoye,

Je vis saint
Valentin venir,

Venant à moi la droite voye

Ainsi que pour moi réjouir.

Et, pour mieux son fait accomplir,

Le dieu amoureux amena,

Qui par la main me vint saisir

Et doucement m'arraisonna,

En moi disant : «
Beau doux ami,

Te veux-tu de tous points défaire ?

Tu sais que pieça * te soumis

Sous ma puissance débonnaire.

Mais celle pour qui ce fait faire

Ne te peut plus réconforter.
Pour ce te veux à moi actraire '
Et te veux bon conseil donner. »

«
C'est que tu choisisses de nouvel

Une dame gente et jolie.

Car à ce faire je t'appel ',

Et saint
Valentin t'en déprie.

Aussi
Loyauté te l'octrie ',

Car tu as loyaulment servi

Jusqu'à fin ta dame et amie,

A qui je t'avoye asservi. »



Hélas !
Comment se peut-il faire,

Ce lui dis-je piteusement,

Que nulle autre me puisse plaire

pour servir amoureusement ? »

Mais
Amour, qui si puissament

Seigneurit mon cour en jeunesse,
Répond qu'il ne veut nullement
Que je demeure sans maîtresse.

«
Et comment te veux-tu défendre,

Dit-il, contre ma volonté ?

Ne le fais plus, mais viens t'en rendre,

En très grant débonnaireté,

A la non pareille beauté

Qu'on pût en ce monde veoir *,

A qui tu seras présenté.

Pour quoi ?
Pour l'aimer et servir. »

«
Hélas ! sire, pardonnez-moi,

Et me laissez souffrir ma peine.

Je ne quiers qu'être en un recoi '

Pour regretter ma souveraine,

De qui ma plaisance mondaine

M'était venue entièrement,

Dont jamais liesse certaine

Ne puis avoir aucunement. »

«
Plus me plaît plaindre et soupirer,
Et regretter mon grand dommage,

Que veoir rire ni chanter
Gens qui sont de joyeux courage.



Je ne quiers nulle autre avantage

Qu'en ce point attendre la mort,

Depuis que la très bonne et sage

Je perdis, qu'amoye si fort. »

«
Et que je veux toujours aimer

Aussi bien morte comme vive.

Non, je ne la quiers oublier

Pour nulle assemblée où j'arrive.

Pour ce s'ainsi vers vous estrive *,

Je vous prie qu'il ne vous déplaise

Si par vous ma douleur m'eschive *,

Mais me laissez en ma mésaise. »

«
Car achoison * ne puis avoir

Que de languir en déconfort.

Non, je ne puis apercevoir

Que ja mon cour en soit d'accord.

Certes ce serait à grant tort

Qu'il fût jamais nul jour actain '

De plaisir ni joyeux confort,

Quand j'ai perdu tout ce que j'aims . »

«
Au moins souffre que te conseille,

Et puis dis ce qu'il te plaira.

Viens vers celle dont la merveille

Vole toujours et volera

Et par tous lieux triomphera

Loù
J on connaît sa renommée.

Ou ta mort t'en abrégera,
Ou grâce t'en sera donnée. »



«
Car en voyant son doux accueil,
Son regard de douce simplesse,

Il te souviendra du cercueil

Qui tient ta première princesse.

Ainsi tu connaîtras l'âpresse '

Du mal qu'il te convient porter,

Ou tu choisiras la richesse

De mon service recouvrer. »

«
Accorde-moi pour mon plaisir

Cette requête-ci au moins,

Accomplis en ce mon désir,

Je t'en prie à jointes mains.

Et pour t'en faire plus contraint

Te commande d'amour l'affaire
Sur la peine d'être retain

De ma seigneurie le contraire. »

«
Sire, je ne sais plus que dire,

Soit pour jouir ou pour douloir,

Ou pour souffrir mort ou martyre,

Je ferai vers vous mon devoir

D'aller partout à mon pouvoir

Vers celle font faites devis *,

Qu'à plein on peut apercevoir

De beauté le droit paradis. »

Adonc me vint
Amour montrer

Une dame tant belle et gente

Comme on pourrait regarder

A y mettre tout s'entente



Et lors me dit que je m'assente '

A la servir humblement

Comme le fieu de droite rente

Et que mieux ne puis nullement.

Et quand je la vis si très belle,
Si jeune et si bien renommée,
Et que chacun bonne nouvelle

Disait de sa beauté louée,

J'entrai en trop forte pensée,

Car aucunement ressemblait

A la belle qu'avoye aimée,

Pour qui mon cour tant se doulait *.

Car tant avait belle manière

Et le regard bel et riant,

Si jeune et si joyeuse chair,

Et tant par était bien duisant *

Que chacun était désirant

A son pouvoir de bien en dire.

Adonc connus tout maintenant

Qu'elle faisait bien à élire.

Au-devant de toutes les belles

Qui sont vivantes à présent,

Entre dames et demoiselles,

La prisait-on outreement.

Sachez de vrai que à tant gent

Le corps et la chair * tant lie,

Que nul ne la voit vivement,

Ce crois-je, qu'Amour ne le lie.



A peine l'eussé-je pu croire,

C'est la merveille de ce monde,

Que nulle autre me put plaire

Tant fût dame plaisant ni blonde.

Le bien d'elle par tout se ronde ',

C'est le trésor d'amour mondaine.

Si de son bel n'avait que une onde ',

Si l'en ferait ou souveraine.

Adonc ne puis-je contredire

D'Amour la très haute puissance.

De grant pièce ne peux mot dire.

De pâmer fut en grant doubtance.

Car
Amour par son ordonnance

Si me surprit soudainement,

Et adonc repris contenance

Et m'assurai aucunement.

J'en devins aussi amoureux,

Comme par grant force contraint,

De ses très grands biens gracieux

Qui m'ont tout droit au cour atteint.

Et pour ce, sans nul penser feint,

La servirai toute ma vie,

Priant pour celle dont j'ai plaint

Si longuement la départie.

Or veuille
Amour sa grâce étendre
Vers moi par son aide piteuse ',
Et qu'il lui fasse bien entendre

Ma volonté très amoureuse,

Qui jamais ne sera joyeuse

Si ce n'est par moyen d'elle,

Qui sur toutes est très heureuse,

Car en croissant se renouvelle.

Et lui plaise, par son vouloir,

Qu'elle prenne en gré mon service,

Et que tant fasse mon devoir

Que tous ses désirs accomplisse.

De tous ennuis convient que je ysse *

Seulement par son réconfort,

Par elle faut que je guérisse

Ou que je reçoive la mort.

Amour l'a ainsi commandé,

A qui veut et doit obéir.

De très parfaite volonté,

Veux tout son vouloir accomplir.

Pour ce, sans jamais repentir,

Le servirai jusqu'à la fin.

Ainsi lui promets sans mentir,

Le jour de la
Saint
Valentin.





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Othon de Grandson
(1340 - 1372)
 
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