wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 

Louis Aragon



Le 19 juin 1954 - Poéme


Poéme / Poémes d'Louis Aragon





A ce point de mon rêve à ce point de vertige
Ce fut comme une fleur dont on brisa la tige



Elle est dans la poussière et qu'est-ce que j'en tiens
Mes yeux se sont rouverts au monde quotidien



C'est une ville d'eaux où je suis par hasard
Les coblas des ruisseaux bruissent de toute part



L'air couronné d'oiseaux de feuilles murmurant
Respire la douceur des tilleuls odorants



Et sortant de la gorge où tourne une eau profonde
Il monte une rumeur des viscères du monde



Je vois de la terrasse où j'écris sur un banc

Dans les marronniers verts l'ormeau doublé de blanc



Une légende traîne ici son ombre injuste
Aux dentelles de bois du pavillon vétusté



Aux accoudoirs de ce balustre abandonné
Comme si fugitifs après quarante années



Un
Francisco
Ferrer regardait la cascade
Et toujours à son bras songeait sa
Soledad



Les verdures déjà de la tapisserie

Leur dérobaient le ciel leur sort et leur patrie



Déjà le jeune été brûlait 6ur les platanes
Le vent de la vallée y dansait la sardane

Déjà sous le torrent comme un voleur surpris
Ils voyaient un poisson fuir dans les galets gris



Et par le chèvrefeuille au cri sec des cigales
La roche était partout proche à leur pas égal



Dans le sentier qui grimpe et dit en catalan
L'éléphant de
Carthage et le pied de
Roland



Ah c'est par cette entaille au cour de la montagne
Que je l'entends comme eux venir ce chant d'Espagne



Flamenco douloureux roulant avec l'écho
Qui depuis dix-huit ans pleure
Federico



Et le lys orangé qui pousse au creux d'un mur
N'est que l'or pâlissant de l'ancienne blessure



O prochaine et lointaine
Espagne mon souci
Je suis donc revenu pour t'écouter d'ici



N'es-tu pas ma limite et ma leçon première
Avons-nous deux amours avons-nous deux lumières



N'es-tu pas le miroir torride et le matin
Où mon peuple aperçoit le soir et son destin



Tu nous appris la mort et ses étranges modes
Et nous pensions à toi sur les routes d'exode



Et nous pensions à toi quand on mangeait si peu
O pays des yeux noirs et des ouvriers bleus



Et nous pensions à toi quand il fallut apprendre
A ranimer les feux en soufflant sur les cendres



Et nous pensions à toi quand saignait la patrie
Et nous pensions à vous mineurs des
Asturies



Quand aux soldats tués on reprenait les armes
Et vous étiez présents pour la joie et les larmes



Et dans ceux qui tombaient frappés par trahison
Et le jour tout d'un coup qu'on ouvrit les prisons



Musique déchirante
Espagne sour du
Sud
Fille de longue attente et chère inquiétude



Ma captive sans qui sont tristes les étés
Et les amours amers sombre la liberté



Je 6uis comme un parent qui te crie au parloir
Par les grilles des mots insensés sans savoir



Si l'entendre aujourd'hui te peut être donné
A travers les barreaux que sont les
Pyrénées



Vois
Je suis revenu comme les hirondelles
Le croyais-tu vraiment que j'étais infidèle



Tu chantes et ta voix s'égare en me cherchant
Que ne puis-je passer vers toi ce mur du chant



Que tu saches enfin quelle moisson se lève
Combien de jeunes gens au bout du monde rêvent



Entre eux parlant de toi comme font les amants
Qui portent des rubans au lieu de diamants



Mais dans la maison tiède et douce
Où sous le toit de tuiles rousses
Un enfant nu dort sur son lit
Le petit poste en galalithe
Dit soudain des mots insolites
Qu'on croyait tombés dans l'oubli



La fenêtre obscure est ouverte
Au contre-jour de vigne verte
Où le vent pousse le rideau
Ses contrevents pâles s'accrochent
Au mur qui s'appuie à la roche
Avec un figuier dans son dos



On entend marcher sur la sente

Sans doute la mère est absente

Qui laissa son fils endormi

Et c'est comme un essaim de mouches

Ces vocables d'aucune bouche

L'enfant se retourne et gémit



Sans oreilles à ses paroles
L'ombre fait le maître d'école
Devant la cuvette et le broc
Et leur dit comme un fait vulgaire
Qu'à l'aurore aujourd'hui la guerre
A levé son front de taureau



Il faut recommencer qu'on meure
Des gens dormaient dans leur
Comme ici dort cet enfant-là
L'armoire se tait mais la porte
Proteste
Après tout peu m'importe Ça se passe au
Guatemala

Je saisis mal toutes ces choses
Notre voisine est peinte en rose
Il faisait si beau ce matin
Sur la terrasse on pouvait voir
Sécher du linge et des bas noirs
Devant les volets bleus déteints

Fermez les journaux et les livres
Ah laissez laissez les gens vivre
Indifférents indifférents
A tout ce qui n'est pas leur pierre
Comme le lézard et le lierre
Dans le grand soleil ignorant



Hélas tu te souviens de ces heures maudites
O mon
Espagne es liens et des propos tenus
Quand tes enfants faisaient avec la dynamite
Sauter les chars d'Allemagne venus



Ainsi tout recommence et les gens vont nous dire
Qu'il était dangereux cet homme mis en croix
Et que n'y est pour rien le
Proconsul d'Empire
Et
Cabot
Lodge aura pour lui le droit



On annonce déjà que tes aérodromes
Mettront l'aigle à pied d'ouvre au milieu des requins
Dans la mer antillaise où va battre l'atome
Désormais pavillon américain



Vous pouvez bien masquer ce meurtrier habile
Qui dès le premier pas fait un mort d'un enfant
Lui donner le laurier de la guerre civile
Libertador sûr d'être triomphant



Vous pouvez mobiliser sur toutes les routes
Les chenils tropicaux que vous avez gammés
Le sang et l'or auront odeur d'United
Fruit



Ces armées
Yankees ce sont vos armées

C'est à l'heure où mourut sur la chaise électrique
Le couple
Rosenberg ça fait tout juste un an
Que vous avez crié
Rapporte
Et de la trique
Frappé vos chiens sur les deux flancs



Ah craignez qu'un beau jour dans une chambre ardente
Pour le sang de
Corée et pour ce crime après
Les peuples souverains ne s'inspirent de
Dante
Au
Nuremberg où c'est vous qui paierez



Et que vous soit bien lourd jeté sur leur balance
Comme à
Franco ce grain de grenade
Lorca

O villes que les feux tirèrent du silence

L'enfant guatémaltèque avec ses yeux muscats





Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.

Louis Aragon
(1897 - 1982)
 
  Louis Aragon - Portrait  
 
Portrait de Louis Aragon

Biographie

Louis Aragon, que son père, un haut fonctionnaire et député, n'a jamais voulu reconnaître, montre très jeune un don pour l'écriture. Il est étudiant en médecine lorsqu'il rencontre André Breton en 1916 avec lequel il se lie d'amitié. En 1918, il publie ses premiers poèmes, puis part, en tant que médecin auxiliaire, au front des Ardennes. Son courage lui vaut d'être décoré de la Croix de Guerre.

Principales oeuvres

POÈMES ET POÉSIES

Citations de louis aragon


mobile-img