wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 

Louis Aragon



La nuit de moscou - Poéme


Poéme / Poémes d'Louis Aragon





Ah dans ses propres pas que marcher est étrange
Comme tout a changé et comme rien ne change
Cette ville n'est plus la même après vingt ans
Et c'est toujours la même et c'est la même neige
Les étoiles des tours les longs murs le
Manège
Mais la nuit n'est plus noire et j'ai les cheveux blancs



Je ne reconnais plus les endroits où je passe
Pouchkine a traversé depuis longtemps la place
Et maladroitement comme des mots écrits
Les grilles des jardins sur la candeur d'hiver
Semblent recopier pour les couples ses vers
Le long des boulevards faits pour la flânerie



Devant
Tchaïkovski la rue est jaune et blanche
Décembre a souligné sa carrure et sa manche À peine les frimas ont-ils poudré son front
Et le geste d'airain vient à jamais suspendre
Un air que la sculpture est seule pour entendre
Qu'un glissement de
Zim pas même n'interrompt



Des sautoirs de clarté tracent les perspectives
L'ombre fuit sur les toits à cette heure tardive

Et multiple
Babel a 1 assaut du néant
Au-dessus du lacis familier des venelles
Des édifices blonds postés en sentinelle Étoilent la ténèbre à leur front de géant



ô maisons de rondins
Auvents verts
Palissades
Le voyageur ici reconnaît les façades
La cour où le dvornik alors fendait du bois
Le décor a gardé la même architecture
Mais tout y a changé d'échelle et de mesures
Jusqu'à l'homme de chair et le son de sa voix



Ici tout a grandi tout a changé de rôle

Les ponts mêmes ont pris de la largeur d'épaule

Pour passer par-dessus la nouvelle
Moskva

Les quais majestueux dans la pierre l'escortent

La rivière est profonde aux vapeurs qu'elle porte

Et naturellement à la
Volga s'en va



Moscou ne cesse pas de croître et de bâtir
Et comme sur son lit se retourne et s'étire
Une femme en rêvant qui trahit ses pensées
Et cherche en son sommeil de nouvelles amours
Moscou de tous côtés étend ses membres lourds
Par les chantiers échelonnés de ses chaussées



Elle tient dans ses bras qu'en tous sens elle allonge

L'avenir son amant l'avenir dans ses songes

Et d'où
Napoléon
Bonaparte l'a vue

Sur la
Butte-aux-Moineaux aujourd'hui
Monts
Lénine

L'avenir son enfant lui rit et s'illumine

Dans l'Université porteuse de statues



Ici j'ai tant rêvé marchant de l'avenir
Qu'il me semblait parfois de lui me souvenir
Et ma fièvre prenait dans mes mains sa main nue
Il chantait avec moi les mêmes chansons folles
Je sentais son haleine et déjà nos paroles
Traduisaient sans effort les choses inconnues



Ici j'ai tant aimé la nuit et le silence

Tant de fois égaré mes pas comme une enfance

Tant de fois à plaisir j'ai perdu mon chemin

Tant de fois retrouvé mes fantômes en loques

Ombres de mon passé dans un pereoulok

Dont le nom m'échappait comme l'eau de la main



Que j'ai finalement au fond de ma rétine
Confondu ce qui vient et ce que j'imagine
Sans savoir que tout songe est le deuil d'aujourd'hui
Que l'homme voit la flamme et ne peut pas la dire
Et s'il ne se perd plus où nos yeux se perdirent
Plus tard par d'autres feux ses yeux seront séduits



L'histoire entre nos doigts file à telle vitesse
Que devant ce qui fut demain dira
Qu'était-ce

Oublieux des refrains ou notre cour s est plu
Comment s'habituer à ce qui nous dépasse
Nous avons appelé notre cage l'espace
Mais déjà ses barreaux ne nous contiennent plus



Pour borner l'existence à notre témoignage

En vain de nos tombeaux nous marquons les gagnages

La luzerne franchit la pierre et se déploie

Et nos miroirs polis auront à reconnaître

Non les flambeaux défunts mais ceux-là qui vont naître

Et non pas notre songe et non pas notre loi



Dans ce siècle où la guerre atteignait au solstice
Les hommes plus profonde et noire l'injustice
Vers l'étoile tournaient leurs yeux d'étonnement
Et j'étais parmi eux partageant leur colère
Croyant l'aube prochaine à toute ombre plus claire
A tout pas dans la nuit croyant au dénouement



Étoile on oubliait les douleurs et la crainte
Le minotaure à ce détour du labyrinthe Étoile comme une eau dans notre aridité
Toi qu'on pouvait toucher en montant la colline Étoile si lointaine étoile si voisine Étoile sur la terre étoile à ma portée



Je mettais son contraire au lieu de toute chose
J'imaginais la vie et ses métamorphoses
Comme une féerie énorme et machinée
C'était un jardin bleu tintant comme un cristal
Où les pieds fabuleux marchaient sur des pétales
Et cependant les fleurs jamais n'étaient fanées



J'attendais un bonheur aussi grand que la mer
Et de l'aube au couchant couleur de la chimère

Un amour arraché de ses chaînes impies
Mais la réalité l'entend d'une autre oreille
Et c'est à sa façon qu'elle fait ses merveilles
Tant pis pour les rêveurs tant pis pour l'utopie



Le printemps s'il fleurit et l'homme enfin s'il change
Est-ce opération des elfes ou des anges
Ou lignes de la main pour les chiromancies
On sourira de nous comme de faux prophètes
Qui prirent l'horizon pour une immense fête
Sans voir les clous perçant les paumes du
Messie



On sourira de nous pour le meilleur de l'âme
On sourira de nous d'avoir aimé la flamme
Au point d'en devenir nous-mêmes l'aliment
Et comme il est facile après coup de conclure
Contre la main brûlée en voyant sa brûlure
On sourira de nous pour notre dévouement



Quoi je me suis trompé cent mille fois de route
Vous chantez les vertus négatives du doute
Vous vantez les chemins que la prudence suit
Eh bien j'ai donc perdu ma vie et mes chaussures
Je suis dans le fossé je compte mes blessures
Je n'arriverai pas jusqu'au bout de la nuit



Qu'importe si la nuit à la fin se déchire
Et si l'aube en surgit qui la verra blanchir
Au plus noir du malheur j'entends le coq chanter
Je porte la victoire au cour de mon désastre
Auriez-vous crevé les yeux de tous les astres
Je porte le soleil dans mon obscurité






Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.



Louis Aragon
(1897 - 1982)
 
  Louis Aragon - Portrait  
 
Portrait de Louis Aragon


});

Biographie

Louis Aragon, que son père, un haut fonctionnaire et député, n'a jamais voulu reconnaître, montre très jeune un don pour l'écriture. Il est étudiant en médecine lorsqu'il rencontre André Breton en 1916 avec lequel il se lie d'amitié. En 1918, il publie ses premiers poèmes, puis part, en tant que médecin auxiliaire, au front des Ardennes. Son courage lui vaut d'être décoré de la Croix de Guerre.

Principales oeuvres

POÈMES ET POÉSIES

Citations de louis aragon


mobile-img