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Julien Green

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Frère François


Poésie / Poémes d'Julien Green





C'est beaucoup plus qu'une énième «vie de saint François d'Assise». On en lirait le signe, délibéré ou non, dans le titre : la dévotion de Julien Green invoque le saint sous l'appellation choisie d'emblée par le « Petit frère » pour soi-même et ses premiers compagnons, et entérinée officiellement sous le sigle OFM, ordre des Frères mineurs, désignant les Franciscains. Il nous en avertit d'entrée, dès la seconde phrase du premier paragraphe : Vers la fin du XIIe siècle apparaît [...] un enfant qui réussit presque à faire triompher l'idéal.



Mélancolique adverbe presque, qui, en suggérant la possible réussite, accentue l'échec d'un miracle divin dans les affaires humaines ! Ce qu'aussi bien exprime en clair - « l'auteur parle » - le commentaire final. D'où il apparaîtra évident que ce livre s'enchaîne intimement au précédent sur la religion et qu'en l'intitulant Frère François Julien Green témoigne d'une très ancienne et profonde fraternité : Je me rends compte que, pendant des jours et des jours, j'ai vécu dans la compagnie merveilleuse de l'homme que j'ai toujours le plus admiré. D'une certaine façon, j'ai senti qu 'il se tenait près de moi, fraternel et souriant. Et d'une façon certaine cette compagnie date de bien plus longtemps, de l'enfance, d'avant la conversion au catholicisme : Aux jours lointains de la rue de Passy où nous habitions, j'entendais parfois prononcer son nom avec cette tendresse qui l'accompagne toujours. Ma mère surtout, toute protestante qu'elle fût, lui vouait une affection qui me faisait croire qu'elle l'avait connu. Julien, personnellement, le découvrit grâce à un ouvrage populaire d'Arvède Barine : Je devins fou d'amour pour ce monde merveilleux. Je rêvais de devenir comme François d'Assise, et sans hésiter le choisit pour saint patron à son baptême catholique.

Mais il y eut la fausse vocation bénédictine, puis la crise religieuse, et François d'Assise s'éloigna, emportant même la médaille que François;Julien, un temps, gardait au cou. Il resurgit, avec le retour à l'Église, quand la Seconde Guerre mondiale me secoua l'âme comme on secoue quelqu'un par l'épaule.



Livre de ferveur, plein de résonances intérieures, Frère François, littérairement, n'en est pas moins, d'abord, une passionnante biographie qui ne laisse rien à envier aux mieux documentés, aux plus rigoureux ouvrages d'historiens. A elle seule, l'importante bibliographie l'attesterait : Pendant dix-huit mois j'ai travaillée ces pages qui demandaient beaucoup de recherches et parfois de longs efforts pour essayer de découvrir la vérité sous les variantes que les chroniqueurs lui ont fait subir. En commençant, comme il se doit, quant à la personnalité de François, par la critique des sources les plus vénérables. Premier témoin, premier biographe accrédité, Thomas de Celano, un frère et un poète de génie (auteur de l'admirable et terrifiant Dies irae, meilleur écrivain qu 'on puisse trouver sur l'ordre du pape Grégoire IX, ami de François qu'il vient de canoniser (1228). Celano aussi a connu le saint, quand il est entré dans son ordre en 1215, puis dans ses dernières années. Il l'aime et l'admire certes, mais il sait des choses - sur la jeunesse, voire l'enfance de celui qui sera le plus grand saint de la chrétienté -, des choses rien moins qu'édifiantes pour donner du nouveau saint, selon la volonté du pape, une image en quelque sorte officielle. Mais quoi ! Le souvenir.n'est pas oublié, à Assise, des grandes dissipations - que par la suite Celano et ses successeurs envelopperont du terme pudique de « farandoles » - on ne saurait tout dissimuler. Ce n'est du reste pas le naturel de Celano qui, dans la Vita prima, du moins, pousserait presque le souci de la vérité jusqu'à tenir l'emploi d'« avocat du diable » ! Vingt-deux ans plus tard, la Vita secunda atténuera, ou même idéalisera.



Moins que ne le fit (sainT) Bonaventure, qui n'a jamais connu François et qui, trente-cinq ans après sa mort, maître général de l'ordre, prôna l'hagiographie jusqu'à oser déclarer : «Jamais il ne se laissa entraîner par la fougue des passions. » Contrevérité sourde aux confessions noyées de larmes : «Je vivais dans le péché... Au temps où j'étais encore dans les péchés. » Et, en 1263, on brûla une masse de documents... compromettants pour le «saint en plâtre» qu'on a voulu confectionner et à qui, avec vigueur, Julien Green restitue toute son humanité, pécheresse jusqu'à vingt-cinq ans et d'autant plus proche de nous ; d'autant plus prodigieux le miracle soudain de la conversion et jusqu'à la mort, à quarante-six ans, la fidélité exemplaire à suivre, comme personne encore et depuis, l'Evangile de Jésus-Christ.

Dans cette première moitié de vie, la plus colorée, la plus mouvementée à lire, l'historien doublé du romancier campe avec un vrai bonheur son héros, ce fils de drapier, né (septembre 1181 ou début 1182, date incertainE) durant un voyage de son père Pietro di Bernardone, lequel en rentrant récusa coléreusement le nom de baptême de Giovanni (Jean-BaptistE) choisi par la mère, Jeanne dite Pica (Picarde ?), d'origine française, croit-on, prophétisant que ses mérites feraient de lui un fils de Dieu. Le père lui substitua celui, insolite, de Francisco, Français (orthographié François et prononcé Françoué jusqu'au XVIIIe sièclE). Parce que Bernardone était féru de la France et de tout ce qui était français. Il transmit ce goût à son fils, lui parlant de bonne heure en langue d'oc comme en langue d'oïl, l'emmenant dès l'âge de douze ans dans ses voyages d'affaires, de Provence à la Champagne, d'où François rapportera un répertoire de cantilènes, celles des troubadours comme celles des trouvères, complétées par les chansons de Dame Pica qui, elle aussi, parlait français. Ce qui mettait déjà les Bernardone très au-dessus de leur condition.

Sous la plume de Julien Green, nous entendrons toute sa vie, dans les rues d'Assise et plus tard sur les routes, François chanter d'une voix douce et véhémente qui ensorcelait hommes et femmes. Nous le voyons rieur, toujours en joie, séduisant, élégant, faisant honneur à la fortune paternelle qu'il aurait su accroître en exploitant ses succès auprès de la pratique. Le bonhomme Bernardone, habile commerçant et spéculateur, ne lésinait pas dans cette perspective. Mais, derrière le comptoir du drapier, on caressait d'autres rêves, on cultivait d'autres ambitions. Les fins de siècle vont vite. Celle du XIIe ne fait pas exception. La majorité est alors à quinze ans. Regardez ce gracieux adolescent, ce fringant cavalier, qu'on remarque et qu'on ne peut oublier, qui subjugue toute la jeunesse dorée et va l'entraîner, dix ans durant, dans la dolce vita. Ne dirait-on pas... oui, un seigneur. Et qui veut le devenir en titre, grâce à la guerre, à la chevalerie...

Voici maintenant l'Histoire tumultueuse qui encadre un destin exceptionnel. Julien Green évoque avec la même précision et le même bonheur le bouleversement qui suit, saluée en Italie par des cris de joie, la mort inattendue d'Henri IV d'Allemagne, la difficile succession qui oppose Philippe de Souabe et Othon de Brunswick, que soutient le pape Innocent III, la révolte d'Assise contre la citadelle de la Rocca, le pouvoir impérial et le pape. François est le premier à faire l'escalade... qui atterrit dans les geôles de Pérouse. En attendant la tentative de départ en croisade, armé de cap en pied comme écuyer d'un grand seigneur et le cuisant échec - coûteux pour papa Bernardone - de l'aspirant chevalier.

Dans l'intervalle, c'est la grande, brillante, étourdissante débauche. Dire que l'auteur nous restitue avec bonheur la personnalité, les vingt-cinq premières années de François dans son cadre de vie, c'est éprouver littéralement une respiration heureuse, comme une secrète identification de Julien Green - autre qu'un dédoublement de romancier - avec son modèle.

Pour le deuxième versant de l'âge, après la conversion foudroyante - ce fut bel et bien un coup de foudre, au sens passionnel du terme -, en pleine « farandole », le ton du narrateur se fera plus grave, écho de la joie du fou de Dieu, non moindre, aussi constante que naguère celle du roi de la jeunesse, mais différente, cette joie folle du converti, lui-même pareil et différent. Chez Julien Green rapportant les hauts faits de la sainteté miraculeuse, la prédication irrésistible par la parole autant que par les actes, ce qui gagne le lecteur, c'est son émerveillement, de la même nature que lorsque, enfant, il se sentait enveloppé de lumière et d'amour de Dieu. On dirait que la grâce rayonnante de François et la luminosité des paysages italiens se communiquent à lui.



L'historien, lui, nous fait assister, progressivement, à la grande aventure franciscaine qui faillit changer le monde à jamais, ce monde de la chrétienté médiévale, de ce grand, fabuleux xmc siècle dont il nous éclaire les traits contrastés. Au centre ceux de l'Église de Rome, scandaleuse et édifiante, en proie aux trois fameuses concupiscences : puissance, savoir, richesse et ce qui s'ensuit, mais fondant en larmes, pape et cardinaux, au sermon d'un Poye-rello qui n'est même pas clerc, admis par eux à leur rappeler la vérité nue de l'Évangile à l'enseigne impérieuse de la Pauvreté. Église qu'en rêve, à ses tout débuts, François reçut mission de réparer - ce qu'il comprit d'abord dans le sens matériel de restaurer un sanctuaire délabré.

Julien Green nous communique son angoisse devant l'échec du rêve mystique de François, inscrit dans le trop grand succès des trois compagnons « hippies » à l'origine, puis de l'humble fraternité sans statut, pour devenir dès avant la mort (3 octobre 1226) du fondateur malgré lui - exception faite pour la vocation sublimée de sainte Claire - une famille monastique prospère, essaimée en de nombreux couvents, qui conduisait la sagesse réaliste de l'Église à mettre l'amour de Dieu, des hommes et de la Création entière, le plus libre qui fût, en ordrel





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Julien Green
(1900 - 1998)
 
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