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Jules Supervielle



Le portrait - Poéme


Poéme / Poémes d'Jules Supervielle





Mère, je sais très mal comme l'on cherche les morts,

Je m'égare dans mon âme, ses visages escarpés,

Les ronces et ses regards.

Aide-moi à revenir

De mes horizons qu'aspirent des lèvres vertigineuses,

Aide-moi à être immobile,

Tant de gestes nous séparent, tant de lévriers cruels!

Que je penche sur la source où se forme ton silence

Dans un reflet de feuillage que ton âme fait trembler.

Ah ! sur ta photographie

Je ne puis pas même voir de quel côté souffle ton

regard.
Nous nous en allons pourtant, ton portrait avec

moi-même,
Si condamnés l'un à l'autre
Que notre pas est semblable
Dans ce pays clandestin
Où nul ne passe que nous.

Nous montons bizarrement les côtes et les montagnes
Et jouons dans les descentes comme des blessés sans

mains.
Un cierge coule chaque nuit, gicle à la face de l'aurore,



L'aurore qui tous les jours sort des draps lourds

de la mort,
A demi asphyxiée,
Tardant à se reconnaître.

Je te parle durement, ma mère;

Je parle durement aux morts parce qu'il faut leur parler dur,

Debout sur des toits glissants,

Les deux mains en porte-voix et sur un ton courroucé,

Pour dominer le silence assourdissant

Qui voudrait nous séparer, nous les morts et les vivants.

J'ai de toi quelques bijoux comme des fragments de

l'hiver
Qui descendent les rivières,

Ce bracelet fut de toi qui brille en la nuit d'un coffre
En cette nuit écrasée où le croissant de la lune
Tente en vain de se lever
Et recommence toujours, prisonnier de l'impossible.

J'ai été toi si fortement, moi qui le suis si faiblement,
Et si rivés tous les deux que nous eussions dû mourir

ensemble
Comme deux matelots mi-noyés, s'empêchant l'un

l'autre de nager,
Se donnant des coups de pied dans les profondeurs

de l'Atlantique
Où commencent les poissons aveugles
Et les horizons verticaux.

Parce que tu as été moi ,

Je puis regarder un jardin sans penser à jtutre chose,



Choisir parmi mes regards,
M'en aller à ma rencontre.
Peut-être reste-t-il encore

Un ongle de tes mains parmi les ongles de mes mains,
Un de tes cils mêlé aux miens;

Un de tes battements s'égare-t-il parmi les battements de mon cour,
Je le reconnais entre tous
Et je sais le retenir.

Mais ton cour bat-il encore?
Tu n'as plus besoin

de cour,
Tu vis séparée de toi comme si tu étais ta propre

sour,
Ma morte de vingt-huit ans,
Me regardant de trois quarts,
Avec l'âme en équilibre et pleine de retenue.
Tu portes la même robe que rien n'usera plus,
Elle est entrée dans l'éternité avec beaucoup de

douceur
Et change parfois de couleur, mais je suis seul à

savoir.

Cigales de cuivre, lions de bronze, vipères d'argile,

C'est ici que rien ne respire!

Le souffle de mon mensonge

Est seul à vivre alentour.

Et voici à mon poignet

Le pouls minéral des morts,

Celui-là que l'on entend si l'on approche le corps

Des strates du cimetière.








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Jules Supervielle
(1884 - 1960)
 
  Jules Supervielle - Portrait  
 
Portrait de Jules Supervielle


Biographie / Ouvres

Ses parents, français, se sont expatriés en Uruguay pour fonder une banque. De retour en France pour des vacances, l'année même de la naissance de Jules, il meurent tous les deux : il devait y avoir quelque chose dans l'eau du robinet. C'est son oncle et sa tante qui l'élèvent et qui s'occupent de la banque en Uruguay.
Ce n'est qu'à l'âge de 9 ans qu'il apprend qu'il est adopté.

Chronologie

De 1880 à 1883 : Bernard, oncle du poète, fonde en Uruguay une banque avec sa femme Marie-Anne. Cette entreprise devient rapidement familiale : Bernard demande à son frère Jules, père du poète, de venir le rejoindre en Uruguay. Jules fait du trio un parfait quatuor en épousant sa propre belle-soeur, Marie, soeur de Marie-Anne et mère du poète.

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