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Jules Laforgue



La souris métamorphosée en fille - Fable


Fable / Poémes d'Jules Laforgue





Une
Souris tomba du bec d'un
Chat-Huant :

Je ne l'eusse pas ramassée;
Mais un
Bramin le fit : je le crois aisément;

Chaque pays a sa pensée.

La
Souris étoit fort froissée.

De cette sorte de prochain
Nous nous soucions peu; mais le peuple bramin

Le traite en frère.
Ils ont en tête

Que notre âme, au sortir d'un roi,
Entre dans un ciron, ou dans telle autre bête
Qu'il plaît au
Sort; c'est là l'un des points de leur loi.
Pythagore chez eux a puisé ce mystère.
Sur un tel fondement, le
Bramin crut bien faire
De prier un sorcier qu'il logeât la
Souris
Dans un corps qu'elle eût eu pour hôte au temps jadis.



Le sorcier en fit une fille
De l'âge de quinze ans, et telle et si gentille.
Que le fils de
Priam pour elle auroit tenté
Plus encor qu'il ne fit pour la grecque beauté.
Le
Bramin fut surpris de chose si nouvelle.

Il dit à cet objet si doux : «
Vous n'avez qu'à choisir; car chacun est jaloux

De l'honneur d'être votre époux.

-
En ce cas je donne, dit-elle.
Ma voix au plus puissant de tous.

-
Soleil, s'écria lors le
Bramin à genoux.

C'est toi qui seras notre gendre.

-
Non, dit-il, ce
Nuage épais

Est plus puissant que moi, puisqu'il cache mes traits;
Je vous conseille de le prendre.

-
Eh bien! dit le
Bramin au
Nuage volant,

Es-tu né pour ma fille? -
Hélas! non; car le
Vent
Me chasse à son plaisir de contrée en contrée :
Je n'entreprendrai point sur les droits de
Borée. »

Le
Bramin fâché s'écria :

«
O
Vent donc, puisque vent y a,

Viens dans les bras de notre
Belle! »
Il accouroit; un
Mont en chemin l'arrêta.

L'éteuf passant à celui-là.
Il le renvoie, et dit : «
J'aurois une querelle

Avec le
Rat; et l'offenser
Ce seroit être fou, lui qui peut me percer. »

Au mot de
Rat, la
Damoiselle

Ouvrit l'oreille : il fut l'époux.

Un
Rat! un
Rat : c'est de ces coups

Qu'Amour fait; témoin telle et telle :

Mais ceci soit dit entre nous.
On tient toujours du lieu dont on vient.
Cette fable
Prouve assez bien ce point; mais, à la voir de près.
Quelque peu de sophisme entre parmi ses traits :
Car quel époux n'est point au
Soleil préférable,



En s'y prenant ainsi?
Dirai-je qu'un géant

Est moins fort qu'une puce? elle le mord pourtant.

Le
Rat devoit aussi renvoyer, pour bien faire,

La
Belle au
Chat, le
Chat au
Chien,

Le
Chien au
Loup.
Par le moyen

De cet argument circulaire,
Pilpay jusqu'au
Soleil eût enfin remonté;
Le
Soleil eût joui de la jeune beauté.
Revenons, s'il se peut, à la métempsycose :
Le sorcier du
Bramin fit sans doute une chose
Qui, loin de la prouver, fait voir sa fausseté.
Je prends droit là-dessus contre le
Bramin même;

Car il faut, selon son système,
Que l'homme, la souris, le ver, enfin chacun
Aille puiser son âme en un trésor commun :

Toutes sont donc de même trempe;

Mais agissant diversement

Selon l'organe seulement

L'une s'élève, et l'autre rampe.
D'où vient donc que ce corps si bien organisé

Ne put obliger son hôtesse
De s'unir au
Soleil?
Un
Rat eut sa tendresse.

Tout débattu, tout bien pesé.
Les âmes des souris et les âmes des belles

Sont très-différentes entre elles;
Il en faut revenir toujours à son destin,
C'est-à-dire à la loi par le
Ciel établie :

Parlez au diable, employez la magie.
Vous ne détournerez nul être de sa fin.





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Jules Laforgue
(1860 - 1887)
 
  Jules Laforgue - Portrait  
 
Portrait de Jules Laforgue

Biographie jules laforgue

«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè

Orientation bibliographique / Ouvres

L'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit

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