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WORDSWORTH - poème intitulé le Prélude






Le poème wordswordien - nous pensons ici surtout au célèbre poème intitulé le Prélude, mais cela est vrai aussi de beaucoup d'autres textes du poète - est caractérisé par une grande unité de ton. La pensée s'y concentre sur un seul thème : la relation du poète avec la nature environnante. Cela forme généralement le seul sujet auquel il se consacre. C'est ainsi, à première vue, que le poème wordswordien apparaît comme une ouvre rigoureusement homogène, dont le poète décrit fidèlement, sans grandes variations, les aspects profonds, mais peu nombreux. D'où une certaine monotonie. Et pourtant, si l'on y regarde de plus près, l'on se rend compte, que, comme une série de tableaux du même peintre consacrés par lui à nous donner des versions différentes d'un seul paysage, le poème de Wordsworth se présente comme un tout, mais un tout composé de vues soigneusement isolées les unes des autres, dont chacune révèle un aspect particulier. Chaque épisode, on pourrait presque dire chaque fragment, apparaît sans liaison évidente avec ceux qui précèdent ou ceux qui suivent. Il existe, détaché, comme s'il se recueillait en lui-même, à l'écart. D'où, dans le poème, un effet perceptible de discontinuité. Nous en avons un exemple dans un épisode fameux où l'on voit un être dans une barque descendant au fil de l'eau. Voici qu'en se penchant par-dessus bord il découvre au-dessous un paysage mystérieux qui reflète, mais en la transformant, la vue qu'il découvrait à la surface. Cela suffit pour qu'il soit étrangement touché. Ce monde occulte, où le connu et l'inconnu se superposent et se mêlent, lui présente des images inversées. Elles sont tremblantes et fragmentaires. Il n'en a lui-même qu'une brève vision, sans pouvoir fermement les relier entre elles et avec celles qu'il avait perçues à la surface des eaux. Ainsi affranchies de la continuité qui relie d'ordinaire obligatoirement les choses avec lesquelles on se trouve en relation, elles semblent flotter dans le vide, à grande distance de celui qui les regarde. Telle est, chez Wordsworth, l'expérience de la profondeur. Elle ne se manifeste jamais directement, comme les rapports de plain-pied que nous entretenons avec l'actuel. Elle nous incite plutôt à y chercher une similarité émouvante avec telle période lointaine de notre enfance, dont notre mémoire imparfaite ne posséderait pas de représentation précise, rien peut-être qu'une obscure réminiscence. Si le souvenir, comme nous le croyons volontiers, n'est qu'une reproduction plus ou moins exacte du passé dans le présent, ce que nous éprouvons ici ne ressemble pas exactement à un souvenir. Il s'agirait plutôt d'une mise en rapport fortuite, hésitante, peut-être imaginaire, de notre être actuel avec un autre lieu que celui où nous sommes, avec une autre époque, avec un autre moi. Nous les avons peut-être déjà connus, vécus, perçus, mais, en ce cas, ils nous paraissent maintenant très éloignés de nous, malgré l'intensité curieuse avec laquelle nous les distinguons dans la distance : distance d'ailleurs singulièrement aggravée, puisqu'elle est devenue à présent plus verticale qu'horizontale. C'est en effet au fond de nous-mêmes, en nous penchant sur le passé, comme du bord d'un bateau, que nous pouvons distinguer l'objet de notre attention dans une sorte de brume, au sein de la profondeur liquide. Si vives d'ailleurs que soient à nos yeux ces images retrouvées, elles se trouvent à demi voilées par le tableau confus que présentent les régions où elles baignent. Un hiatus se creuse entre elles et nous. Il nous apprend que vivre, c'est se retrouver toujours d'époque en époque, mais se retrouver toujours à distance de soi-même. Notre être vrai n'est jamais à proximité de notre moi actuel. Il est là-bas. Nous ne pouvons espérer être en contact immédiat avec lui. Entre lui et nous, il y a un lien, mais il y a aussi une distance.





De la sorte, différemment de Proust, mais non sans quelque analogie avec lui, Wordsworth nous présente une section de notre existence, soustraite au temps présent, et qui, en marquant combien elle en est éloignée, se désactua-lise. Pour comprendre tout le sens de ce démarquage, il nous faut renoncer à considérer le passé comme de même nature que le moment où nous sommes, et par conséquent comme entièrement dépendant des déterminations du temps présent. Notre redécouverte du passé a donc des côtés négatifs aussi bien que positifs. Elle nous permet de nous dérober à l'empire exclusif que le moment présent veut exercer sur nous. Elle nous donne les moyens de localiser au fond de nous quelque chose de très secret, qui est nous. Nous rejoignons de la sorte, pour un temps, par une faveur exceptionnelle, non plus une simple tranche de notre existence, mais notre être vrai, notre permanence occulte. Tout Wordsworth se trouve contenu dans cette jonction du fortuit, du lointain, d'une part, et de l'éternel, de l'autre. Le temps vécu nous apparaît, de façon inespérée, comme notre bien propre, le seul authentique, dès qu'il nous est donné, non pas de le ranger parmi nos acquis, parmi nos richesses actuelles et positives, mais au contraire d'en revivre au moment voulu certaines expériences si simples qu'on peut les considérer comme négatives. Le critique anglais Walter Pater, qui, mieux qu'un autre, a compris Wordsworth, nous énumère les impressions toutes négatives que ce dernier nous rend merveilleusement perceptibles : le silence, l'obscurité, l'immobilité absolue. Constatons que toutes trois impliquant le passage du déterminé à l'indéterminé.



WORDSWORTH : TEXTES



Emotions éprouvées en de certains lieux ou moments isolés, détachées de la continuité des temps et des choses, perçues incomplètement.



Cela se manifeste sous la forme d'obscurs sentiments, souvent représentatifs de joies oubliées. (Prélude.)



L'on ne se souvient pas, l'on éprouve simplement l'impression obscure d'une sublimité possible, d'une relation établie dans notre enfance entre nous-mêmes et la beauté éternelle. (Prélude.)



Pour un instant, un bref instant surpris dans la mobilité des temps, quelque chose comme une sérénité divine. (A la vue d'un portrait.)



Tous les moments, quoique séparés les uns des autres, baignent dans le même silence, font partie de la même trame. (Intimations de l'immortalité.)



Ils surgissent brusquement de lieux cachés depuis bien des années. (Le Charretier.)



Etats d'âme fugitifs, faits d'exaltations confuses mais comparables à un pivot fixe, formant le centre d'un monde troublé. (L'Excursion.)



Pater disait de Wordsworth : « Il a le pouvoir de percevoir et de transmettre à la conscience du lecteur certaines impressions abstraites et élémentaires : silence, obscurité, immobilité absolue. » (Appréciations, p. 44.)






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