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UN DEMI-SIÈCLE DE ROMANTISME - XIX - LES PREMIÈRES VOIX DU ROMANTISME






Grand âge du romantisme, le XIXe siècle, et plus particulièrement sa première moitié, a connu les étapes qui scandent tout mouvement de pensée : le temps des précurseurs et des prémices, l'ère de la maturité et des chefs-d'ouvre, le crépuscule du déclin. A dire vrai les premiers précurseurs du romantisme, ses réels initiateurs - à tel point qu'on les nomme souvent « préromantiques » - sont d'un autre siècle. C'est en effet dans la sensibilité nouvelle de la seconde moitié du XVIIIe siècle - sensibilité qui refuse ou conteste les leçons trop rigoureuses ou illusoires de la raison triomphante des Philosophes - qu'il faut voir les premières traces de cet esprit neuf qui va marquer la génération des écrivains de l'Empire et des premières années de la Restauration. Il y a déjà du romantisme chez ce bohème avant l'heure qu'est Le Neveu de Rameau, il y a du romantisme dans les rêveries exotiques et discrètement sensuelles d'un Bernardin de Saint-Pierre, il y en a plus encore évidemment dans les confidences, les interrogations ou les nostalgies du Rousseau de La Nouvelle Hêloïse et des Confessions. Quand s'ouvre le XIXe siècle les chemins du romantisme sont déjà tracés, ses paysages et ses décors sont esquissés, les subtilités et les angoisses de son analyse du « cour » humain ont déjà été entrevues.





Néanmoins l'apport incontestable de ceux que l'on peut nommer dans les années 1800-1820 les « premières voix du romantisme » est de systématiser les choix, les principes et les obsessions qui seront ceux et celles de toute la future génération romantique. Chez Senancour, chez Mme de Staël, chez Benjamin Constant ou chez Chateaubriand, dans Corinne (1801) et Delphine (1802), dans Oberman (1804), dans Adolphe (1816) comme dans René (1802) s'affirment clairement pour la première fois toute la détermination et tous les déchirements du siècle qui s'ouvre, à travers un certain nombre de prises de conscience et la formulation de quelques exigences essentielles qui toutes ont la même origine et le même objet : le Moi.



La caractéristique première de chacun de ces écrivains et de chacune de leurs ouvres est bien en effet l'affirmation résolue et parfois enthousiaste de l'originalité fondamentale de l'individu que les rigueurs de la raison classique ou le dogmatisme des principes philosophiques avaient souvent négligée, oubliée, ou reléguée comme insignifiante. La production htté-raire sous l'Empire - production qui est d'abord le fait d'opposants au régime et par conséquent contestataire d'un certain « ordre » - est avant tout romanesque et est passée à la postérité par ses titres comme une collection de prénoms. C'est qu'en effet ces romans se présentent comme libres récits ou libres confessions de l'expérience d'une individualité, d'un Moi qui se dit unique. Pétri d'abord de la pensée des Philosophes, séduit ensuite par les doctrines » illuministes », Senancour fait déjà tenir à son héros Oberman un langage nouveau où l'expérience originale de l'individu est posée comme seul fondement de toute pratique et de toute création :



« Je dois rester, quoi qu'il arrive, toujours le même et toujours moi ; tel que je me sens ; tel que je veux être ; tel que je suis dans cette vie intérieure, seul asile de mes tristes affections. ' Je m'interrogerai, je m'observerai, je sonderai ce cour naturellement vrai et aimant, mais que tant de dégoûts peuvent avoir déjà rebuté (...) décidé à ne jamais réprimer en moi ce qui tiendrait à altérer ma forme originelle. »



Mais il est bien difficile de déterminer une pratique et de donner un sens à l'existence quand on est à soi-même un mystère et une énigme. Or, la seconde révélation paradoxale apportée par les textes des romanciers de l'Empire est qu'en ce début de XIXe siècle les exigences renouvelées du Moi sont contemporaines de la réapparition d'un trouble existentiel qu'une fois encore la transparence de l'âme raisonnable des classiques ou les certitudes brillantes des Lumières avaient masqué. Omniprésent dans tous ces récits, le Moi toujours se cherche et se déchire, en proie à ses doutes, à ses incertitudes ou à ses désirs. Rien d'étonnant par conséquent à ce que Corinne, Oberman, René ou Adolphe soient pour une large part des romans autobiographiques. En eux c'est une identité égarée qui cherche à se retrouver, à se comprendre et à s'exprimer. L'exemple de Chateaubriand est à cet égard le plus significatif : avant d'entreprendre la grande fresque des Mémoires d'où-tre-tombe, où il voudra, dit-il, « expliquer son inexplicable cour » en donnant à lire les hésitations de son propre destin dans le récit des incertitudes de l'Histoire, il avait déjà tenté dans l'Essai sur les révolutions (1795), ouvrage de réflexion sur une histoire « dramatisée », et surtout dans René, d'élucider et d'exorciser cet étrange sentiment, délicieux et dangereux tout à la fois, que l'individu qui naît et réagit au monde « moderne » porte en lui, « le vague des passions » : « J'ai voulu peindre, écrit-il, cet état d'âme des facultés jeunes, actives, entières mais renfermées, qui ne sont exercées que sur elles-mêmes, sans but et sans objet. » Le propos et le projet n'étaient pas autres pour B. Constant quand il écrivait dans la Préface de son Adolphe : « J'ai voulu peindre cette fatigue, cette incertitude, cette absence de force, cette analyse perpétuelle qui place une pensée à côté de tous les sentiments, et qui par là les corrompt dès leur naissance. »



Ennui, insatisfaction, impuissance, complaisance narcissique, sentiment de frustration et d'incom-prébension, autant de sentiments complexes dont l'analyse par l'écriture romanesque ne pouvait se faire sans douleurs et déchirements. Ce que Chateaubriand appelle « vague des passions » il le nomme aussi « mal du siècle », tout comme B. Constant appelle son incertitude et sa faiblesse « l'une des principales maladies morales du siècle ». C'est qu'en affirmant l'originalité de son être et de ses passions le Moi romantique prend le risque d'une rupture avec un monde et une société qui refusent, parce qu'elles les craignent, les valeurs de la singularité et les pouvoirs du cour. Banni au nom des valeurs de la nouvelle « morale des intérêts », rejeté par les pouvoirs de l'ordre et de l'argent, le Moi ressent douloureusement cette rupture qui fait de lui un malade, voire un paria. Delphine et Corinne, les deux héroïnes de Mme de Staël, portent en elles toute l'ardeur des passions supérieures mais toutes deux se perdront et mourront pour avoir voulu passer outre aux préjugés du monde et aux contraintes de la société. Pareillement René, le chantre exalté des fiévreuses amours mais aussi des angoisses de toute une jeunesse égarée dans une Histoire perturbée, devient fatalement un exilé au milieu même des siens, dans un univers moral et social qu'il ne comprend plus et qu'il n'a plus qu'à quitter :



Je me trouvais bientôt plus isolé dans ma patrie, que je ne l'avais été sur une terre étrangère. Je voulus me jeter pendant quelque temps dans un monde qui ne me disait plus rien et qui ne m'entendait pas. Traité partout d'esprit romanesque, honteux du rôle que je jouais, dégoûté de plus en plus des choses et des hommes, je pris le parti de me retirer dans un faubourg pour y vivre totalement ignoré.



C'est dans cette exaltation du Moi qui mène aussi à l'exil du Moi et à une rêverie nécessaire sur un « ailleurs » idéal mais problématique, dans cet enthousiasme qui passe nécessairement par l'inquiétude et la douleur, dans cette volonté de singularité qui se heurte 6ans cesse aux réticences ou aux refus d'un monde qui n'accepte pas ce qui ne lui ressemble pas, que vont se fonder les grandes expériences et les grandes créations romantiques de la première moitié du XIXe siècle.



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