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TRADITION ET RÉALISME : RÉGNIER






1. Survie de la tradition



La poétique de la Pléiade survit dans le cercle de la reine Margot ; la tradition est défendue par Billard, Hardy, Schelandre, Régnier et Mlle de Gournay, fille adoprive de Montaigne. Ils aiment la richesse érudite, la variété, l'enthousiasme créateur, l'ampleur rhétorique. Ils protestent surtout contre l'appauvrissement de la langue et l'asservissement de la poésie par les malherbiens, « plus ambitieux du nom de grammairiens et de rimeurs que de la sacrée fureur de Poète » (Billard, 1610). Pour Mlle de Gournay, « l'âme de la poésie [...] consiste en une brusque et généreuse vigueur », manifestée par « l'abondance et magnificence de mots, phrases et rimes », dans un style « métaphorisé jusqu'à l'extrême effort de l'invention » (1619). Jusqu'en 1620, selon Balzac, le Parlement, l'Université et les Jésuites seront pour Ronsard.



La tradition se maintient dans le théâtre du premier quart de siècle, que domine Alexandre Hardy (vers 1572-1632). A la solde de troupes de comédiens, il prétend avoir écrit cinq ou six cents pièces. Il publiera (1624-1628) six pastorales, quatorze tragi-comédies (où le pathétique, le moralisme, l'inégalité sociale des amants annoncent le drame bourgeoiS) et quatorze tragédies qui s'achèvent toutes par le suicide ou le meurtre du héros ou par une sanglante vengeance et insistent sur les ravages de l'ambition et de l'amour. Une interrogation sur la grandeur héroïque et criminelle de l'homme. Une intrigue violente, romanesque, bien construite, résultant de conflits entre des héros aux passions vigoureuses qui défient le sort. Un style ferme, expressif, orné de comparaisons et de sentences, émaillé d'archaïsmes. Tyr et Sidon de Schelandre (1608) est également une tragédie violente et romanesque, de style archaïsant. Les comédies du premier quart de siècle sont peu nombreuses et conformes aux modèles du XVIe siècle. Larivey en publie un recueil adapté de l'italien (1611) (11), Troterel, Les Comvaux (1612), un anonyme Les Ramoneurs (1622-1623). Leur intérêt réside dans leur vigueur satirique, une peinture pittoresque de la vie contemporaine, une langue très riche. La farce est exceptionnellement prospère, de 1609 à 1628 avec, outre les Italiens et leur com-media dell'arte le filiforme Gaultier-Garguille, l'énorme Gros Guillaume, Turlupin (à partir de 1609, 1610 et 1616), le bonimenteur Bruscambille, Tabarin (1619-1625), dont les scénarios sont des rendez-vous d'amour qui tournent en bagarres.

Le style traditionnel se maintient bien en prose, malgré Du Vair puis Coëffeteau. Charron sent le latiniste. Camus imite Montaigne : « tout l'art du monde ne me satisfait pas tant que la simple et grossière naïveté de Nature » (1609). Se voulant gentilhomme, il n'accepte que le style cavalier, « non scolaresque et étiré, mais brusque et soldatesque », refusant « un discours trop affété, lissé, poli, regratté, tiré » dont les « périodes... sentent le pédant à pleine gorge » (1613). François de Sales, comme beaucoup de prédicateurs, se distingue par les reprises et méandres d'une abondance fleurie. Pourtant, il y a une évolution. Les extravagances passent de mode. « Aujourd'hui, les plus célèbres écrivains pour la prose ont un style clair, doux et majestatif et du tout vide de figures étranges » (Deimier, 1610).



2. Derniers éclats de réalisme tragique ou satirique



La violence reste fréquente et la littérature l'accueille avec complaisance. Pas encore de censure du corps. Henri IV, le « vert galant » donne l'exemple. Régnier se vante de ses prouesses sexuelles, Malherbe, dit « le Père Luxure », de ses maladies vénériennes. Le genre des histoires tragiques, inspiré de Bandello et des chroniques des guerres civiles, touche à sa fin quand François de Rosset le couronne en 1614, avec ses Histoires tragiques de notre temps, où sont contenues les morts funestes et lamentables de plusieurs personnes, arrivées par leurs ambitions, amours déréglées, sortilèges, vols, rapines et par autres accidents divers et mémorables. Au moins 34 éditions jusqu'en 1657. La violence passionnelle s'y déchaîne, à partir surtout d'amours illégitimes ou anormales. Fleurie s'est emparée du meurtrier de son amoureux : « elle lui perce les yeux et puis les lui tire hors de la tête [...], lui coupe le nez, les oreilles [...], lui arrache les dents, les ongles » et enfin « prend un grand couteau, lui ouvre l'estomac, lui arrache le cour, qu'elle jette dans le feu ». Jouissance de la transgression et sadisme morbide. Mais l'auteur prétend ne dépeindre l'horreur que pour dégoûter et les coupables sont toujours punis. Toutefois, il n'y a pas encore de perspective morale crédible. Dans un univers désespérant, la véritable grandeur est celle de la transgression passionnelle. A partir de 1620 au contraire. Camus pourra reprendre ces horreurs tragiques dans des histoires édifiantes.

La nouvelle littérature, soumise à Dieu, à l'État, aux mondains, tourne le dos au réalisme critique (12), que des enracinements concrets et populaires et de violents affrontements avaient développé de Rabelais à Montaigne et d'Aubigné. Il jette ses derniers feux avec Régnier, Verville, le Francion, avec deux romans latins de Barclay, Euphormio (1602) et Argents (1621), satires sociales et politiques; Les Caquets de l'accouchée (1622), peinture de la petite bourgeoisie ; les Extravagances d'amour (1604) et Le Sot amoureux (1607), caricatures des romans sentimentaux ; les Histoires comiques de Du Souhait (1612), centrées sur le cocuage, les Aventures du baron de Faeneste, par d'Aubigné, contre la fatuité (1617).

Notre époque libertaire et curieuse de langages a redécouvert Béroalde de Verville (1556-1629 ?) et son Moyen de parvenir, ouvre contenant la raison de tout ce qui a été, est et sera (vers 1610). A première vue, un labyrinthe d'incongruités satiriques. En fait, une écriture qui fait vaciller logique, grammaire, structures narratives et discursives, convenances, dogmes et vérités. Une facétie corrosive qui désarçonne les maîtres et censeurs de tout poil (alchimistes, médecins, juges, moralistes, théologiens, gens d'églisE) et se rit des épouvantails : la mort, la sagesse et les fins dernières, dont guerres civiles, néo-stoïcisme. Réforme et Contre-Réforme assenaient le sérieux. On voit la raison profonde de la facétie : se barder d'innocence par la gaudriole, condamner toute incrimination à n'être qu'un procès d'intention de la part d'esprits mal tournés. Toute emprise du pouvoir, tout système de contraintes culturelles, tout assujettissement deviennent ici impossibles. Même l'auteur y refuse ses prérogatives : le locuteur est collectif, indéfini ou change sans crier gare ; pour la première fois, je est un autre. Cette ouvre paradoxale, énigmatique prêche d'exemple sans faire la leçon. Au moment où s'amorce le triomphe des normes. Le Moyen de parvenir, ironie poétique (« tout s'y transmue », ch. 91), trésor des parlers vivants et des fantaisies verbales, est l'ouvre la plus étrange de notre littérature jusqu'au surréalisme.

La violence se maintient dans la tragédie et la gaillardise dans la farce. La poésie erotique, gaillarde, bachique fleurit dans une quinzaine de recueils « satyriques » qui connaissent plus de cinquante éditions et regroupent plus de cent cinquante auteurs. Au début, c'étaient surtout des reprises du xvi« siècle. Mais la veine se renouvelle à partir de 1609 avec la volonté de réagir à l'idéalisme pastoral. Tout le monde en écrit : Malherbe, Régnier, Maynard, Motin. Berthelot et Sigogne s'en font une spécialité. Outre une satire vigoureuse, on trouve chez celui-ci une vision tragique qui pousse le voyeurisme sadique jusqu'à l'horreur, notamment dans la peinture de vieilles charognes luxurieuses qui font « peur à la peur ». La satire cocasse et crue fleurira encore chez D'Esternod (1619).



3. Régnier



La tradition réaliste et satirique anime l'ouvre de Mathurin Régnier, neveu de Desportes, « le Montaigne de notre, poésie » (Sainte-BeuvE) (13). Par-dessus les guerres civiles (qu'il a moins connues que d'autres, parti pour Rome dès quinze anS), il garde l'esprit du XVIe siècle : dynamisme encyclopédique, admiration pour les Anciens, naturisme épicurien et sceptique. Pour lui le poète, animé par la verve de son génie, traite de la condition humaine d'un point de vue critique, dans un style vigoureux et pittoresque. Portraitiste et caricaturiste, narrateur enjoué, moraliste, ses maîtres sont Ronsard, Montaigne (dont il a le relativisme critiquE), Horace et Juvénal. Outre l'injustice, la sottise, l'égoïsme intéressé, la prétention néo-stoïcienne, il dénonce la discipline qui commence à s'imposer : conformisme, courtisanerie, bigoterie, discipline rationaliste, notamment chez les malherbiens, législateurs prétentieux et tyranniques mais sans génie. Techniciens et non poètes, ils sont « froids à l'imaginer » et ne savent que « rimer de la prose », arranger des syllabes et « regratter » le sens des mots dans la gratuité stérile d'un jeu formel.



Nul aiguillon divin n 'élève leur courage ;

Ils rampent bassement, faibles d'inventions

Et toute leur beauté ne gît qu'en l'ornement. (Satire 9)



Ce n'est pas qu'il dédaigne la forme : il pratique une poésie savante. Le fond du problème c'est qu'il refuse la pensée nouvelle, qui anime Malherbe avant Descartes. Il n'a pas confiance en la « débile raison » :



Nous jugeons, nous voyons selon la passion.



Nos seuls garde-fous sont la Nature et la tradition. C'est cette vision de l'homme qui fonde l'art de Régnier. Il suit son humeur, change de sujet et de ton, exprime sa pensée, ses émotions en formules vigoureuses ou proverbiales, dans une langue riche et variée, mais qui est en train de vieillir. Il ne se contente pas de caricatures, brosse des tableaux de mours, propose une morale et une philosophie de l'existence : une liberté qui est aussi confiante soumission à l'ordre naturel (14), un scepticisme critique envers autrui et soi-même. Derrière la verve, on sent une amertume devant un monde de sottise et d'injustice régi par l'inconstance et l'absurdité de la Fortune et par l'hypocrisie intéressée - stigmatisée dans le portrait ferme et coloré de l'entremetteuse Macette (Satire 13). Position proche de celle des néo-stoïciens qui dominent alors. Comme eux, mais de façon plus offensive, Régnier veut préserver sa liberté de jugement, seul bien propre du Sage.






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