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SAINT-LAMBERT






Il n'est pas sans intérêt de s'arrêter un instant au cas de Saint-Lambert. A l'époque où il a vécu, le type qu'il représentait n'était pas rare. C'était celui de l'hédoniste soucieux d'arranger son existence de telle sorte qu'elle comprît le plus grand nombre possible de moments heureux. Remarquons d'abord que l'hédoniste, surtout l'hédoniste vivant à l'époque de Saint-Lambert, n'avait nullement l'ambition - peut-être même pas le désir - de mener de façon continue une existence heureuse. Son ambition n'allait probablement pas jusque-là. Il se contentait le plus souvent de moments heureux. A cela il y avait différentes raisons, mais la principale, c'est qu'au XVIIIe siècle le bonheur auquel on aspirait semblait moins un état dans lequel on pût s'installer qu'une suite assez lâche de moments distincts qu'on espérait voir se succéder les uns aux autres. D'où, chez les gens de cette époque, une tendance à guetter l'arrivée de chacun de ces moments et à apprécier plus particulièrement ceux qui contrastaient par l'intensité du sentir avec les expériences plus ternes de la vie ordinaire. On pouvait donc trouver en ce temps-là nombre de personnes à la recherche surtout de moments d'une rare intensité. Mais il y avait aussi un autre type d'être humain, moins direct, plus subtil, plus nonchalant aussi peut-être, qui ne menait pas avec une ardeur aussi vive la chasse au bonheur. Vers la fin du xvni6 siècle, ce n'était plus l'intensité de l'expérience sensible qui paraissait la chose la plus séduisante aux hommes de ce type. On serait même tenté de dire que c'était l'inverse, et que pour leurs goûts plus délicats un plaisir modéré, même à son déclin, pouvait avoir un grand charme. Au lieu d'un crescendo vers une cime, plutôt quelque chose comme un diminuendo qui, imposant à l'expérience un ralentissement insensible, donne à celui qui en perçoit les nuances une jouissance plus délicate. C'est évidemment le cas de nombreux épicuriens à l'époque de Saint-Lambert. Alors il n'était plus tout à fait nécessaire de se comporter sans cesse en amant passionné. Souvent, ce qui importait, ce n'était pas tellement la passion elle-même que le sentiment apaisé que l'on en gardait. On en voit des exemples chez tous les écrivains de l'époque, Rousseau d'abord, mais aussi un peu tout le monde. Saint-Lambert apparaît sans conteste comme un des meilleurs représentants de cette conduite lucide et modérée que les êtres délicats prolongent au terme d'une longue liaison.





Il convient aussi de remarquer que ce ralentissement du tempo pratiqué par les amateurs du type de Saint-Lambert ne va pas sans une certaine sérénité de l'être. C'est avec un abandon sans trouble qu'il cède à l'émotion dont il a le temps maintenant d'apprécier la douceur. Alors ce n'est plus de passion qu'il faut parler. L'expérience vécue ne se présente plus sans nuance comme un événement qu'il s'agirait de vivre aussitôt à son plus haut degré d'intensité. Au contraire, le phénomène qui se manifeste alors apparaîtrait plutôt comme appartenant à la catégorie des affections négatives ou, plus exactement, tempérées, et tirant de leur ralentissement une douceur qu'elles n'avaient pas à leur apogée. Cela est vrai pour les passions en elles-mêmes : cela semble plus particulièrement vrai au temps du xviiie siècle déclinant. Les amours de ce siècle, un peu avant que se montre la grande ombre de la Révolution, marquent cette fidélité fragile et pourtant indéfiniment prolongée. Saint-Lambert et celle qu'il aimait appartiennent évidemment à cette catégorie. On y voit les êtres accepter de vivre et de sentir avec moins d'ardeur, moins de vivacité, moins d'esprit peut-être aussi qu'auparavant. Une confusion délicieuse amollit alors les sentiments. La pensée vague est mieux accueillie. Nous sommes bien près de la fin du siècle.



SAINT-LAMBERT : TEXTES



Quand les rayons du soleil s'affaiblissent à l'automne, nous sentons moins notre existence. (Les Saisons.)



Dans un état d'apathie et de langueur la vie nous échappe, l'âme paraît usée. Cet état est pour nous le passage de l'être au néant. (Ibid.)



Quand il y a sous l'effet de la chaleur un relâchement modéré dans notre corps - relâchement semblable à celui que l'on éprouve après le plaisir, l'esprit s'abandonne à la rêverie et jouit d'un repos délicieux. (Ibid.)



Les temps humides de la fin de l'automne affaiblissent en nous la vivacité des perceptions. On sent moins son existence. (Ibid.)



[Par une journée très chaude] l'esprit en repos, l'on se sent heureux par le seul plaisir d'être. (Les consolations de la vieillesse.) L'âme après la jouissance Dans un voluptueux silence Se rend compte de son bonheur

(Pièces fugitives.)



Elle éprouve sans rien connaître Une aveugle félicité Son âme est sans idée et n'a que des désirs.






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