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Essais littéraire

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Poète Leconte de Lisle






Comment décrire le mouvement de la pensée chez un poète comme Leconte de Lisle ? Y a-t-il d'ailleurs chez lui une pensée véritablement personnelle, qui se relierait, avant tout, à l'expérience sensible, à la vie intérieure et à la présence active de la conscience de soi ? L'on est presque tenté d'en douter. Quand on est sous l'influence d'un de ces somptueux poèmes qu'on qualifiera sur le tard de parnassiens en raison de leur richesse plastique, on a souvent le sentiment de se trouver mis en rapport avec une création purement objective, par un grand amateur de beauté formelle, impassible, et se gardant d'accorder la moindre place à la subjectivité. Aussi l'ouvre de ce parnassien n'est-elle que trop souvent décrite comme une collection de tableaux reproduisant les formes éclatantes du monde externe dans tout ce qu'elles ont de rutilant et d'exotique.





Mais ces distinctions sont plus apparentes que réelles. Pour autant qu'il soit possible de distinguer dans l'ouvre du poète les pensées qui y jouent un rôle, de l'ensemble formel qui risque de les masquer, l'on se rend compte que, dans l'esprit du poète, il n'y a pas d'extériorité sépa-rable d'une intériorité, secrète parfois, mais toute-puissante. Il est vrai que le poète fait un grand étalage d'objets, mais ceux-ci servent d'écran à des manifestations, moins visibles, celles de la vie intérieure. La présence d'une subjectivité très forte est indéniable. S'il ne s'agit pas là d'une pensée abstraite, retranchée dans ses profondeurs (comme la pensée de Mallarmé, par exemplE), elle apparaît souvent comme une réflexion continue, d'une grande élévation et d'une grande noblesse, associée étroitement à la description d'un monde proprement objectif qui lui sert de soutien et a, en même temps, un rôle ornemental. Dans tous les tableaux poétiques dressés par Leconte de Lisle, on peut toujours distinguer l'action d'une réflexion songeuse, encadrée par un univers objectif dont elle est le reflet en même temps que le principe. Cette pensée n'est nullement refermée sur elle-même. Elle semble planer sur l'ensemble cosmique comme une vaste activité méditative couvrant le plus large champ possible, avec une capacité de généralité telle qu'on ne saurait la confondre avec les préoccupations plus restreintes d'une pensée se développant dans les limites étroites de la conscience individuelle. Ce qui s'y trouve exprimé, ce n'est pas l'état d'âme d'une personne déterminée, fût-ce le poète lui-même, mais l'ombre presque indéfinissable d'un être intérieur, à qui le poète se serait scrupuleusement abstenu d'attribuer une figure concrète, et qui ne se manifesterait que sous la forme dépersonnalisée d'une pensée presque abstraite. Ainsi le poète, dans ses écrits, substitue-t-iî à la révélation directe de sa personnalité une présence quasi toujours anonyme. Au lieu d'une intervention directe de l'auteur sur la scène, une rigoureuse abstention qui trahit la répugnance qu'il éprouve à jouer un rôle personnel. Il préfère rester dans l'ombre et laisser la place à une présence divine impersonnelle qui est censée devoir occuper toute la scène, déterminer toutes les actions, et cela sans cesser d'être totalement indéterminée. Leconte de Lisle la désigne sous le nom de Néant divin ; appellation parfaitement négative, que Mallarmé pourrait reprendre à son tour, et qui suggère une sorte de négativité initiale, antérieure à toute réalité et de qui cependant toute réalité recevrait l'existence.



Lorsque Leconte de Lisle donc fait allusion, comme il lui arrive souvent, à certaines entités absolument premières qu'il appelle « marée noire », « mer immobile et sombre », ou d'autres termes encore, il semble faire allusion à ces obscures et toutes-puissantes forces insubstantielles résidant dans on ne sait quelle région première de l'existence, infiniment en deçà de toutes les formes concrètes qui pourtant en dérivent, et dont le pouvoir créateur est antécédent à tous les développements du monde. En un mot, pour le poète comme pour les bouddhistes, le monde positif dépendrait d'un monde inverse, négatif, qui en serait à la fois le berceau, le principe originel et le lien final. Par un de ces grands mouvements dramatiques qui donnent à ses poèmes l'aspect d'une Genèse, inverse d'ailleurs de la Genèse biblique, Leconte de Lisle représente l'histoire du monde sous la forme d'un drame en deux temps, dans le premier desquels on voit le monde sortir du néant, mais dans le second desquels il se trouve fatalement prévu que le monde rentrera dans le vide, revenant ainsi à la nullité première. Toute une série de poèmes décrivent ce retournement de la création, où l'on passe du vide à une sorte de plénitude, pour repasser ensuite de cette plénitude à l'absence d'être initiale. Il y a là une conception grandiose, presque digne de la genèse chrétienne. Elle fait suivre l'essor excentrique de la création par son contraire, un mouvement purement négatif qui ne peut s'achever, comme dit le poète, que dans le silence, l'oubli et la tombe. Le mouvement vers la vie se trouve donc décrit comme se prolongeant et s'achevant dans un mouvement exactement contraire. Il devient un mouvement négatif vers le vide, vers le rien, vers la mort. De la sorte, le cycle se complète et se referme sur lui-même. La pensée créatrice surgissant initialement du néant devient d'abord de plus en plus féconde et expan-sive, mais c'est pour abandonner ensuite tous les gains positifs qu'elle avait pu faire, et reprendre son initiale nullité. Finalement on serait enclin à croire que dans l'imagination du poète l'historique cosmique se développe sous la forme d'un gigantesque interlude où s'enchaînent les unes aux autres une longue suite de déterminations passagères, ayant pour terme dernier un retour au Rien, à l'informe, c'est-à-dire à l'antique indétermination originelle.



LECONTE DE LISLE : TEXTES



... ton oil cave a vu l'essaim des choses du vide primitif soudainement écloses.



Pourquoi jaillissez-vous du vide originel ?

Celui qui va goûter le sommeil sans aurore... s'emplit des visions qui hantaient son berceau.

La nuit efface absolument

Le temps, l'étendue et le nombre.

Que ne puis-je, couché sous le chiendent amer,

Chair inerte, vouée au temps qui la dévore,

M'engloutir dans la nuit qui n'aura pas d'aurore,

Au grondement immense et morne de la mer.

Monte, monte et perds-toi dans la nuit éternelle.

Tel qu'un lourd et muet décembre

L'esprit plonge au vide dormant,

Dans la mer immobile et sombre...

Qu'il est loin, le matin des temps intarissables

Où rien n'était encor, ni les eaux, ni les sables.

L'inévitable Mort, d'abîmes en abîmes

Vous entraîne à jamais vers le Néant divin.

Rentre dans ton néant

... la noire marée Va te verser l'oubli de son ombre sacrée. Adieu. Je vais rentrer dans l'éternel silence. Et ce sera la Nuit aveugle, la grande Ombre Informe, dans son vide et sa stérilité. Dans ton sépulcre vide il faut enfin rentrer.





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