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LA LITTÉRATURE DE 1653 À 1659






Contre la défaite des nobles, les désordres, les compromissions du burlesque, les années 1653-1658 sont marquées par une vive réaction idéaliste (épopées, préciosité, romanesquE) qui tourne bientôt à l'analyse morale et à la poésie élégiaque. La littérature devient décidément mondaine. D'où une expression recherchée, une prédominance de la vie sentimentale et relationnelle. Et la vogue des genres brefs, du style rapide : stances, ballades, épîtres, chansons, portraits ; nous voici sur la voie des Provinciales et des Pensées, des Maximes, des Satires, des Fables, des nouvelles. Publiant, en 1656, les Ouvres de Sarasin, Pel-lisson dit sa préférence pour « un entretien libre, familier, naturel, semé partout des jeux de la gaieté et de la civilité des honnêtes gens », qui ne va « à l'utilité que par le plaisir » mais dont les « traits ingénieux, subtils, fins, délicats, descendent quelquefois plus avant dans l'âme que les préceptes les plus sérieux ». En effet, cette légèreté n'est pas incompatible avec la rationalité. Après les extravagances romanesques et précieuses, elle l'emporte à la fin de la décennie, dans la vision, la structure, le style. La princesse Rhétorique, dont le « premier ministre s'appelait Bon Sens », triomphe de Galimatias (Furetière, Nouvelle allégorique ou Histoire des derniers troubles arrive's au royaume d'éloquence, 1658).





1. Un avortement d'épopées



L'élan héroïque du règne de Louis XIII demandait le plus noble des genres : l'épopée. Chapelain est au travail depuis 1625 sur Jeanne d'Arc : La Pucelle ou la France délivrée. Le duc de Longueville, dont il doit célébrer l'ancêtre, lui donne 2 000 livres par an. Il travaille lentement et cultive le suspense. Dans les années trente, Godeau ISaint PauL) et Desmarets (Clovis ou la France chrétiennE) emboîtent le pas ; puis Saint-Amant IMoyse Sauvé), Scudéry lAlariC) et Le Moyne (Saint LouiS). Saint-Amant a fini en 1642, Godeau en 1644. Ils ne publient pas : conscients de leur médiocrité ou de l'inopportunité ? De 1648 à 1653, on travestit huit fois diverses parties de l'Enéide, modèle du genre, et les héros sont définitivement assujettis. C'est alors, de 1653 à 1656, que nos épopées se mettent à pleuvoir. Leur froideur didactique n'avait pourtant nul besoin d'être discréditée par avance. Tous partent de l'idée que l'épopée a pour but de « former les mours par des instructions déguisées sous les allégories » (Le Bossu, 1675) : « l'allégorie doit régner partout dans le poème épique » (ScudérY). Chez Chapelain, la France représente « l'âme de l'homme en guerre avec elle-même, (...] le roi Charles la volonté [...], l'Anglais et le Bour-guinon [...] les divers transports de l'appétit irascible, Amauri et Agnès [...] de l'appétit concupiscible, [...] et la Pucelle [...] la grâce divine ». Mais ils sont incapables de donner vie à une telle entreprise : l'époque, les règles, les empêchent de vibrer. Compilations pédantes, idéalisme creux, sentiments conventionnels, intrigue invraisemblable, composition mécanique, longs discours, style pompeusement prosaïque. De quoi « anesthésier l'imagination » (J.-P. ChauveaU) malgré quelques belles formules chez Scudéry, de l'agrément chez Godeau, de la finesse chez Saint-Amant. C'est le naufrage dans le ridicule. Chapelain ne publiera jamais la seconde partie du grand ouvre, achevé en 1670.



2. « Clélie » : confirmation de la galanterie



Du 31 août 1654 au 1" mars 1660 parurent les 7373 pages de Clélie où Mlle de Scudéry, tout à fait seule cette fois, confirme l'orientation de la seconde moitié d'Artamène aux dépens de l'intérêt dramatique. Artamène projetait dans le passé l'entourage de Condé et de Mme de Rambouillet ; ici, c'est l'entourage de Fouquet et de Mlle de Scudéry. La dimension historique, politique, guerrière se réduit. La vraisemblance, la morale se renforcent : nous sommes après l'échec de la Fronde et nous approchons du classicisme. Jusqu'à la première partie du tome 3 (1655), descriptions, conversations, réflexions et divertissements galants (La Carte du Tendre...) s'entremêlent à une action aux schémas bien conventionnels. Ensuite, toute cette psychologie - « matière romanesque nouvelle », exception faite de L'Astrée, « mais inerte et restant en marge de l'action » - l'occulte de plus en plus (H. CouleT). A partir du tome 4, les péripéties n'ont qu'une importance secondaire, tandis que les portraits deviennent envahissants : 55 pour les tomes 5 à 10 (1657-1660), contre un jusque-là. Artamène était une intrigue fort bien concertée ; Clélie tend vers la juxtaposition de dissertations. « Le romanesque n'est plus que le support d'un propos didactique » (R. GodennE), les héros des porte-parole idéologiques. Ce n'est plus un roman d'action, une épopée (6), mais une analyse morale et une fresque sentimentale (teintée parfois de mélancoliE), pour le divertissement et l'éducation d'une société où l'affirmation héroïque est remplacée par l'assujettissement de la morale, des bienséances, de la galanterie : voyez toutes les épreuves à subir pour être reconnu parfait amant. L'un des poncifs du roman héroïque était que le héros y prenait les armes contre son père, son roi, sa patrie. Une époque qui frondait l'absolutisme et passait du dévouement féodal au père au dévouement libéral à l'objet de son choix, pouvait s'offrir ce frémissement odipien. Chez La Calprenède, on ne craignait « point d'être fils dénaturé pour être parfait amant ». La victoire de l'absolutisme change les choses. La donnée de base de Clélie reste potentiellement subversive. Telle la Camille de Corneille, elle aime Aronce, le héros ennemi, alors que son père veut la marier à Horace, le héros national. Mais nous ne sommes plus en 1640 : les deux rivaux se sauvent mutuellement la vie, Clélie épousera son bien-aimé, le moralisme sentimental enveloppe toutes les contradictions. «J'aurai du respect pour mon père, de la pitié pour ma patrie, de l'estime pour Horace, de la tendresse pour Aronce et de l'innocence en toutes mes actions » (LX, 142) (7).

L'intérêt de Clélie est dans l'anatomie du cour, subtile, quoique limitée par un fade idéalisme et un moralisme étroit. Artamène faisait place aux bizarreries de l'amour, aux frustrés, aux extravagants, aux déséquilibrés ; ils ont quasiment disparu, au profit des platitudes édifiantes : plus d'audaces ni d'ambiguïtés. « Les romans [...] doivent [...] servir non seulement au plaisir mais encore à polir l'esprit et à insinuer insensiblement tous les sentiments vertueux dans le cour de ceux qui lisent » (Mlle de Scudéry, 1661). Artamène célébrait l'amour d'affirmation héroïque : « cette noble passion est plutôt une venu qu'une faiblesse puisqu'elle porte l'âme aux [...] actions les plus héroïques » (1649, Au lecteuR). « L'amour était l'âme de l'armée de Cyrus » (V, 513). Clélie préfère l'amour de soumission morale. «Je veux qu'un amant ne donne jamais lieu de penser qu'il soit aimé [...] et je veux pourtant qu'il ait une peine [...] horrible à cacher sa passion » (VIII, 1130). Cette évolution entraîne une promotion de la femme. L'héroïne est une femme, ainsi que trois des cinq autres protagonistes. Ce ne sont pas seulement des reines de salon. Sous la soumission galante et morale, cette ouvre aspire au bonheur et comporte une revendication (amorcée au dernier tome A'ArtamènE) contre une condition féminine qui pousse aux « grimaces » de la coquetterie, à la sensualité, aux jalousies mesquines, à une pruderie affectée, à toutes sortes de « sottes affectations » (III, 1215), dans une vie limitée à des bagatelles. On flatte les femmes comme des enfants (X, 954), tout en leur imposant une « excessive contrainte » (III, 111). On les marie contre leur gré, pour en faire les « premiers esclaves de toutes les familles », condamnées à ne savoir « rien faire autre chose que d'être femme de son mari, mère de ses enfants et maîtresse » de maison. Il faut ieur permettre de s'épanouir dans « une honnête liberté » (III, 111) et pour commencer leur donner une autre éducation. « Y a-t-il rien de plus bizarre que de voir comment on agit, pour l'ordinaire, en l'éducation des femmes ? On ne veut point qu'elles soient coquettes ni galantes et on leur permet pourtant d'apprendre soigneusement tout de qui est propre à la galanterie, sans leur permettre de savoir rien qui puisse fortifier leur vertu ni occuper leur esprit [...]. Vu la manière dont il y a des dames qui passent leur vie, on dirait qu'on leur a défendu d'avoir de la raison et du bon sens, et qu'elles ne sont au monde que pour dormir, pour être grasses, pour être belles, pour ne rien faire et pour ne rien dire que des sottises » (X, 393-398). Mlle de Scudéry veut que les femmes soient, autant que les hommes, des êtres sociaux et raisonnables ; et en même temps elle défend les passions contre l'antihumanisme dominant. « Ne les combattez pas, abandonnez-vous à elles et au lieu de vous amuser à les vouloir vaincre, cherchez plutôt à les satisfaire et vous n'en serez point si tourmenté [...]. Elles donnent des plaisirs infinis à ceux qui cherchent à les satisfaire et elles ne font presque jamais de mal qu'à ceux qui les veulent détruire ». « Il faut être d'un tempérament passionné pour être véritablement vertueux ». Le malheur, c'est que ces déclarations condamnent l'esprit général de l'ouvre, bien que Bérélise, Cesonie ou Clidamire y donnent des modèles d'honnête liberté.

Autre originalité de Clélie : l'évocation de cette « mélancolie [...] qui fait aimer les beaux endroits de la musique, qui fait écrire des choses touchantes, qui sait joindre ensemble le plaisir et la langueur » dans « une certaine espèce de rêverie douce », qui permet de « laisser insensiblement égarer son esprit en l'abandonnant [...] aux mouvements de son cour » (VI, 1356). A la même date, la poésie redécouvre la tendresse élégiaque (p. 175-176).



3. « Timocrate » et la tragédie romanesque



Le déclin de la noblesse et de la générosité entraîne celle de la tragédie héroïque. De 1648 à 1655, on en crée en moyenne quatre fois moins que depuis 1635. Le relais sera pris, à partir de 1655, par la tragédie romanesque, héroïco-galante, propre à compenser fictivement la crise et à proposer « des escroqueries pour nos bourgeois » amateurs de faux héroïsme (d'AubignaC).



Thomas Corneille (1625-1709), fort habile à sentir le vent, après sept comédies à l'espagnole dans la foulée du burlesque (1650-1655), s'inspire de La Calprenède pour écrire Timocrate (novembre 1656), le plus grand succès théâtral du siècle. Le roi de Crète Timocrate, amoureux d'Eriphile, fille de la reine d'Argos, où il a glorieusement servi sous le nom de Cléomène (8), assiège Argos et exige en échange de la paix la main d'Eriphile, qui est éprise de Cléomène. La reine réunit son conseil : Timocrate, déguisé en Cléomène, y siège. A la surprise générale, et au grand dépit d'Eriphile, il plaide pour la paix. Mais la reine décide la guerre jusqu'à la mort de Timocrate : elle donnera sa fille au vainqueur. Timocrate-Cléomène fait merveille à la tête de l'une et de l'autre armées. Puis Cléomène annonce qu'il tient Timocrate prisonnier. On lui donnera donc Eriphile. C'est alors seulement qu'on découvre qu'il s'agit de la même personne (fin de l'acte III). Timocrate-Cléomène est heureux de périr après avoir épousé Eriphile. Mais les Cretois prennent la ville : la reine n'est plus en mesure d'exécuter son serment. Elle prie Timocrate de vivre, d'être heureux et roi d'Argos.

Thomas Corneille s'oriente dès 1657 vers des sujets plus politiques et plus sombres, à la manière de Rodogune. Mais il a des imitateurs, qui nous montrent par exemple comment Titus finit par épouser Bérénice (Magnon, Vite, 1660). Philippe Quinault (1635-1688), fils de boulanger qui doit une brillante carrière à une charmante habileté et à ses talents de littérateur mondain, fait jouer, de 1653 à 1660, trois comédies, une tragédie romanesque et sept tragi-comédies, dont Ama-lasonte (9 novembre 1657), Le Feint Alcibiade (1658), Stratonice (1660) qui ont un vif succès. Un style fluide, une dramaturgie qui cherche l'émotion sans souci de vraisemblance, moins de mièvrerie que ne l'a dit Boileau, une psychologie assez riche, qui nous montre l'homme conduit par la fortune, ses humeurs, ses passions.' Romanesque, fantaisie, fine comédie font le charme ludique d'Amalasonte où la curiosité, cynique ou passionnelle, côtoie l'idéalisme sentimental.

Pierre Corneille, qui a renoncé au théâtre depuis 1651, prépare à partir de 1656 une romanesque tragédie à machines et à grand spectacle, La Toison d'or, représentée avec grand succès à partir de novembre 1660. Voyant qu'avec Fouquet recommence une période de splendeur et de libéralités, il revient au théâtre. Odipe (20 janvier 1659) est une tragédie romanesque et pathétique, autour d'une enquête proche du roman policier à laquelle, pour se conformer au goût du jour, s'ajoute une fade intrigue sentimentale :



Aux seuls devoirs d'amant un héros s'intéresse- (94)



Mais la réflexion critique n'a pas disparu. Alors qu'on s'affronte sur les problèmes du libre arbitre et de la grâce (Les ProvincialeS), Corneille transforme Odipe, démonstration de la prédestination et de « l'inflexible pouvoir de la divinité » (A. NidersT), en exaltation de notre liberté.



4. Vers le réalisme psychologique : résurrection de la nouvelle



Aucun recueil de nouvelles originales n'avait paru en France depuis 1623. Or voici que Scarron en adapte de l'espagnol dans son Roman comique (1651-1657) et en traduit d'autres, ainsi que d'Ouville et Boisrobert (1655-1657). Segrais publie ses Nouvelles françaises (1656-1657) : six récits suivis de débats. Trois présentent, selon la tradition romanesque, des personnages, événements et sentiments extraordinaires. Les trois autres, centrées sur l'analyse psychologique, dans une perspective pessimiste, racontent des aventures privées contemporaines, en visant la vraisemblance. Le sujet de l'une, Floridon, sera celui du Bajazet de Racine. La Prétieuse de l'abbé de Pure (1655-1658) est une sorte de reportage. L'intrigue de Clélie se relâche au bénéfice d'une juxtaposition de portraits et d'analyses. Deux nouveaux romans-fleuves héroïco-galants, Almahide de Mlle de Scudéry (1660-1663) et Faramond de La Calprenède (1661 et s.) n'ont aucun succès. En 1661, Mlle de Scudéry se tourne vers la nouvelle.

Les nouvelles sont « plus à la portée de l'humanité » que les romans (ScarroN). Ceux-ci tiennent de « la manière du poète », celles-là présentent plutôt les choses « comme d'ordinaire nous les voyons arriver que comme notre imagination se les figure » et veulent nous « divertir par des imaginations vraisemblables et naturelles » (SegraiS). C'est le début du réalisme psychologique, qui va peindre les hommes « tels qu'ils sont », comme le dit La Bruyère en opposant Racine à Corneille.

Parallèlement à la nouvelle apparaît, en 1655, la comédie en un acte avec Quinault, Boisrobert puis des comédiens auteurs : une trentaine de 1655 à 1661, contre vingt en cinq actes.



5. La poésie : futilité, tendresse, ferveur religieuse



La vie de salon interdit un lyrisme personnel ; elle impose le badinage d'une poésie galante, coquette (termes à la modE), jeu de société artificiel, sans intérêt hors de son contexte. « Nous sommes dans le siècle des colifichets » (HueT) : vingt-cinq sonnets pour la mort du perroquet de l'amie de Fouquet. Et les successeurs de Voiture ( t 1648) et Sarasin ( t 1654) sont médiocres. En réaction, Segrais, Mme de la Suze, Mlle Desjardins inaugurent une poésie bucolique, élé-giaque, tendre et simple. Clélie (p. 173) recommande une poésie qui ait « tantôt de la tendresse et tantôt de l'enjouement », voire « encore plus de passion que d'esprit », car son but est « plutôt d'exciter la tendresse et de toucher le cour que de plaire et de divertir ». Si j'avais à écrire pour les gens du monde, dit Chapelain, « j'insisterais sur les passions tendres et les assaissonnerais d'événements divers et surprenants » dans un style « doux » et varié comme « des campagnes fleuries» (8 novembre 1660). Cette esthétique mondaine spirituelle et tendre, gracieuse et gaie, polit le talent de La Fontaine qui mêle dans Le Songe de Vaux le « galant » au « sérieux », le « lyrique » à l'« héroïque ».

Le lyrisme religieux est important et fervent avec Surin et Martial de Brive, les paraphrases des Psaumes par le vieux Racan (1651, 1660) et par Frénicle (1661), la traduction de L'Imitation de Jésus-Christ (1651-1656, six éditions en quatorze anS), où Corneille se console des misères des guerres civiles et de sa retraite théâtrale, rachète ses ambitions, prie, livre beaucoup de lui-même (9) ; les Méditations de Zacharie de Vitré (1659), les remarquables Entretiens solitaires de Brébeuf (1660), où l'ardeur se nourrit de pessimisme.





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