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La littérature de 1643 à la fronde - BADINAGES ET BURLESQUE






A. CONDITIONS GÉNÉRALES



La faiblesse du pouvoir, la fatuité des opposants, l'antihumanisme frappent d'inflation des langages héroïques, qui dérapent dans le romanesque. Corneille et Rotrou y insèrent un machiavélisme dont ils tirent des effets vigoureux. Mais il devient invtaisemblable chez La Calprenède et Mlle de Scudéry, en attendant Quinajalt et Th. Corneille.

Cette tendance générale est confirmée par l'évolution du mécénat et du public. Louis XIII « raya après la mort du Cardinal toutes les pensions des gens de lettres » (TallemanT). Mazarin ne rétablit pas le système : seul le chancelier Séguier, protecteur de l'Académie distribue quelques subsides. Le mécénat des Grands se ranime, chacun cherchant à se faire valoir. En dehors de Retz, autour duquel se regroupent la majorité des partisans d'une littérature intellectuelle et morale, la plupart de ces protecteurs et commanditaires poussent au spectaculaire, au romanesque ou au galant, dans une époque avide de divertissements en réaction aux contraintes de l'époque précédente. Mazarin fait venir des Italiens pour de somptueuses représentations de pièces à machines (première le 14 décembre 1645). Condé aime l'héroïco-romanesque ; il donne des fêtes magnifiques à Chantilly et son hôtel parisien passe pour « le temple de la galanterie et des beaux esprits ». Tandis que le salon de Mme de Rambouillet entre en veilleuse après 1645, celui de Mme de Sablé passe au premier rang, imposant le culte de la femme et la galanterie. Le public mondain l'emporte sur les gens sérieux du Parlement et de l'Université. « Les ruelles des femmes sont les tribunaux des plus beaux ouvrages » (Sarasin, 1639). Profitant de la détente et pressentant la crise, on cherche son plaisir dans le divertissement romanesque, la frivolité galante ou la facétie burlesque, celle-ci réagissant contre ceux-là. Les Scudéry et La Calprenède se tournent vers le roman en 1641-1642 ; Scarron lance la mode burlesque en 1643.





B. LA POÉSIE : BADINAGES ET BURLESQUE



L'ample poésie malherbienne ne convient plus :

Il est vrai. Je le sais. Mes vers sont méprisés.

Leur cadence a choqué les galants et les belles,

Grâces à la bonté des orateurs frisés

Dont le faux sentiment règne dans les ruelles. (Mainard, 1645)



Maintenant, « il ne suffit pas d'être grand écrivain, il faut aussi être grand courtisan et [...) cabaler dans les ruelles », déclare en 1648 Tristan, qui publie ses derniers recueils. L'Office de la Sainte Vierge (1646) et Les Vers héroïques (1648). Une poésie de maîtrise lucide, de confidences, d'effusions. Mais, pour une époque éprise de légèretés, Tristan reste trop fidèle à la noblesse morale et rhétorique de naguère. Saint-Amant publie sa Rome ridicule (1643), écrite en 1633-1636 (cf. p. 116), une longue Épître héroï-comique (1644) et la Troisième partie de ses Ouvres (1649), faite surtout de sonnets et d'épigrammes de circonstances. L'ensemble est moins bon que ses ouvres précédentes et il devient hors de mode. Gombauld l'est encore plus. Le vieux Racan est tout à fait à l'écart. Mainard meurt en 1646, Malleville en 1647. Personne n'assure la relève : les Poésies de Scudéry (1649) sont médiocres.

Voiture (p. 117-118), qui mourra en 1648, le plus spirituel des versificateurs mondains, lance la mode rétro, avec ses rondeaux et ballades (à partir de 1635) puis ses vers en vieux langage à partir de 1640. Il s'intègre de mieux en mieux ; gentilhomme de Monsieur* (1642), maître d'hôtel du Roi (1643), premier commis du Surintendant* (1643). Parallèlement à des badinages charmants par leur subtile variété, il s'adresse, souvent avec humour, à un Grand ou à Mazarin :

Prélat passant tous les prélats passés... L'ironie poétique lui permet de prendre ses distances : La Fontaine l'appréciera. La mode est à une poésie légère (notamment aux Épîtres, comme celles de Boisrobert, 1646) qui oppose aux « fausses beautés du style enflé » « la belle raillerie et la naïveté des pensées » (Mas-caron, 1646). Le meilleur poète de cette décennie est Sarasin (1615-1654). Il égale Voiture par ses virtuosités badines et ses ballades en vieux langage. Il donne le ton dans les épîtres familières. Ses odes et stances valent parfois celles de Malherbe. Il se distingue surtout par ses églogues et élégies inspirées de Théophile (vers 1639), puis de L'Astrée, enfin de Virgile, rêveries vagabondes à travers charmes et mélancolies de la nature et de l'amour.



L'excès de tension héroïque et disciplinaire suscite la réaction d'un style familier qui pousse le mélange des tons au-delà du badi-nage. Scarron lance la mode avec un Recueil de quelques vers burlesques (8 juillet 1643) (1). Il s'inspire des libertés de Voiture et Saint-Amant et de la tradition bernesque, importante en poésie italienne au XVI' siècle et au début du XVIIe siècle- Mais il a ses raisons propres : des rhumatismes l'ont transformé en caricature d'être humain :



Je suis, depuis quatre ans, atteint d'un mal hideux

Qui tâche de m'abattre :

J'en pleure comme un veau, bien souvent comme deux,

Quelquefois comme quatre.



Il ne s'agit plus de badinage gratuit, mais de l'expression humoristique d'une déchirure intime.

La soudaine décompression de la Régence favorise ce style libertaire et facétieux, caractérisé par la discordance entre le tJième et le style et par la dissonance stylistique : un langage d'une variété badine ou familière, émaillé d'expressions pompeuses et vulgaires, de termes désuets, étrangers, ridicules, techniques ou inventés. Refusant l'assujettissement à la raison, aux normes, valeurs, modèles et bienséances, le burlesque est l'expression d'une décennie anarchiquement joyeuse, qui compense ainsi la perte des engagements et le malaise qui conduit à la Fronde. Saint-Amant publie sa Rome ridicule (août 1643), écrite en 1633, où le Tibre devient



Bain de crapauds, ruisseau bourbeux,

Torrent fait de pissat de boufs.



En 1644, c'est Typhon ou la Gigantomachie épopée burlesque de Scarron :



Je chante, quoique d'un gosier

Qui ne mâche point de laurier, ce géant qui renverse les dieux d'un rot plus éclatant que le tonnerre de Zeus.



L'héroïsme romanesque de La Calprenède renforce la réaction burlesque, qui affecte de présenter les « choses les plus sérieuses par des expressions tout à fait plaisantes » (Naudé). Scarron publie l'Enéide travestie (1648-1653) où Didon devient « une grosse dondon ». Sept autres travertissements partiels de la plus célèbre des épopées suivent dans les cinq ans. D'Assoucy, un bohème que ses problèmes préparent à l'écriture burlesque et peut-être son homosexualité au travestissement, publie Le Jugement de Paris (1648) et L'Ovide en belle humeur (1650). La bouffonnerie grossière n'est qu'un pôle extrême du burlesque ; l'autre rejoint le fin badinage des galanteries. Scarron ou d'Assoucy sont souvent proches des subtils poèmes héroï-comiques de Sarasin (auteur d'un Coq à l'âne, ou lettre burlesque de Voiture ressuscite', 1649) : Galanterie à une dame à qui on avait donne' en raillant le nom de Souris (1648), Dulot ou la défaite des bouts-rimés (1654).

La Fronde favorise l'écriture libertaire et le mélange des tons, à un moment où, du duc de Beaufort, dit « le roi des halles », au démagogue cardinal de Retz, les Grands s'encanaillent un peu. Les mazatinades utilisent volontiers le style burlesque, le gauchissant vers la satire.

Le rétablissement de l'ordre sera rapidement fatal à la disson-nance burlesque, qui s'arrête progressivement en poésie après 1653, au théâtre après 1655- La première partie du Roman comique (1651) est marquée par le burlesque ; la seconde (1657) ne l'est plus.



C. LE ROMAN PSEUDO-HÉROÏQUE



L'affirmation de la littérature régulière et du drame héroïque s'est faite aux dépens du roman. Il n'en paraît en moyenne que 5,4 par an de 1636 à 1657 contre 10,6 de 1600 à 1636 et 13,2 de 1658 à 1700 ; un bref redressement en 1642-1644 (10 par aN) mais sans lendemain. Le roman pastoral et le roman d'aventures ont vécu ; le roman d'analyse ne s'affirme pas encore. On dirait qu'en ces années de crise, l'imagination n'a plus assez de souffle et la raison pas encore assez de maîtrise pour de longues fictions. On préfère la poésie ludique.

C'est dans ces années-là pourtant que La Calprenède et les Scudéry quittent le théâtre pour continuer l'écriture héroïque dans l'inflation romanesque. Ils obtiennent un immense succès. Car s'il y a peu d'auteurs de romans, il y a beaucoup de lecteurs potentiels : « les femmes et les filles et hommes de la cour et du monde » et tous ceux qui se plaisent « aux vanités du siècle » ; les romans, « ouvrages de plaisir », « charment tout le vulgaire » et « les hommes sans étude » (Sorel, 1671).

De 1629 à 1643, Georges de Scudéry a fait jouer deux tragédies et douze tragi-comédies. Il s'arrêtera là. Mais en 1641 paraît sous son nom un roman écrit surtout par sa sour, Ibrahim ou l'Illustre Bassa. Le Génois Justinian, devenu grand vizir du sultan sous le nom d'Ibrahim, obtient un congé pour revoir la princesse qu'il aime. Puis il retourne à Constantinople, seul. Touché, le sultan fait venir la princesse. Mais il en tombe amoureux. Finalement, il accorde la liberté aux deux amants. Les protagonistes ont toutes les vertus et tous les malheurs avant de recevoir la récompense due à leur constance.



Un autre petit noble, Gautier de Costes, sieur de La Calprenède (v. 1610-1663), qui avait fait jouer neuf tragédies ou tragi-comédies de 1635 à 1641, quitte aussi le théâtre et publie de 1642 à 1645 les 5 483 pages de Cassandre, prototype du roman héroïco-galant qui va dominer jusqu'en 1661, remplaçant enlèvements, naufrages et reconnaissances du roman de péripéties par les deux occupations de la nouvelle période : la guerre et l'amour. Fini le désordre de Polexandre, le nouveau roman se donne des règles : il se veut une épopée en prose, mais il est encore loin de la sobriété.



D. LE THÉÂTRE



Tragédie romanesque et pathétique ; comédie et burlesque



Le théâtre est toujours en vogue. La Régente l'apprécie. Un prêtre lui ayant dit que c'était péché mortel, elle consulte la Sorbonne : la majorité approuve un théâtre bienséant (1647). Mais la crise pousse la tragédie à l'horreur romanesque et la comédie au burlesque. Après la discipline des années trente, dramaturgie, psychologie et style retrouvent une liberté « baroque ».



Du Ryer écrit une seconde tragédie centraliste et classique, Thémistocle : la patrie est la valeur suprême, même si elle est provisoirement gouvernée par des tyrans (hiver 1647-1648). Mais il revient ensuite au romanesque de la tragi-comédie. Tristan, qui abandonne le service de Monsieur* en 1645, se rapproche du centralisme dans La Mort de Chrispe (1644) et l'adopte dans Osman (1646-47 ?), où le sultan est exalté, les rebelles fort critiqués. Mais la part de l'irrationnel est importante dans ces ouvres : descriptions de la nature, inconstance de la Fortune, renversements surprenants, merveilleux, magie, spectacles d'horreur, cauchemars. Ce retour du romanesque et de la violence se confirme chez Corneille et Rotrou, qui montrent les affrontements pour le pouvoir conduisant au crime, même, selon Rotrou, chez les héros vertueux.



Comment le créateur de Rodrigue, d'Horace, de Polyeucte pourra-t-il continuer à étonner son public en période de « démobilisation politique » (G. CoutoN) et de pessimisme religieux ? Par « du sang à la une » (id.), par la violence des passions, l'insolite des situations, l'imprévu des retournements. D'où Rodogune, Théodore, Heraclite. Nous quittons la Rome héroïque, dont Pompée exprimait déjà la nostalgie, pour les fourberies et les violences de l'Orient et de l'Empire, entrevues avec Décie et Félix, dans Polyeucte, puis à la cour de Ptolémée. Au débat politique, aux exploits héroïques succèdent les féroces querelles familiales pour le pouvoir : nouds de vipères qui rappellent Médée. Le héros positif devient une victime, soutenue par l'amour et l'amitié fraternelle. Du Cid à Polyeucte, la foi, patriotique, étatique, religieuse, disciplinait intrigue et caractères dans une limpidité fonctionnelle. La disparition des objectifs désoriente les signifiants : ne pouvant plus nous exalter, Corneille veut nous étonner ; l'extraordinaire devient étrangeté, l'énergie violence, les passions se déchaînent, la structure et la langue sont « implexes » ou « embarrassées » (CorneillE) car l'action recule devant un expressionnisme où chacun parle son langage et que l'auteur brouille par sa réflexion critique. Pièces fort riches, mais obscures à la représentation : on ne peut se laisser porter, il faut les déchiffrer.

« Les grands sujets, qui remuent fortement les passions et en opposent l'impétuosité aux lois du devoir et aux tendresses du sang, doivent toujours aller au-delà du vraisemblable », écrira Corneille en 1660. Rodogune, noire et romanesque, est sa tragédie préférée à cause de ses « incidents surprenants qui sont purement de mon invention et qui n'avaient jamais été vus au théâtre » (ExameN). Elle aura un vif succès jusqu'au début du XVIII' siècle.

Cléopâtre, reine de Syrie, protagoniste spectaculaire dans ses comédies (IV, 3) comme dans ses fureurs, a perdu son mari dans la guerre contre les Parthes. En fait, prisonnier, il s'est fiancé à Rodogune, sour du roi parthe et est revenu attaquer la Syrie : Cléopâtre l'a tué de sa propre main (630) et tient Rodogune prisonnière. Régente, elle doit aujourd'hui révéler lequel de ses fils jumeaux, Séleucus et Antiochus, est l'aîné et doit monter sur le trône - et épouser Rodogune dont tous deux sont épris. Mais une intime frustration lui donne un égoïsme féroce et des fureurs sataniques. Méprisant l'amour maternel, « ridicule » et « sotte vertu » (1510), elle veut « se rendre heureuse à force de grands crimes » (1496), garder le pouvoir en éliminant ses propres fils et se venger d'une innocente rivale. L'aîné, l'héritier du trône, dit-elle à ses fils, c'est celui qui m'apportera la tête de Rodogune (644-674). Avertie, celle-ci réagit sur le même plan - ou plutôt Corneille invente un bel effet dramatique. Aux princes qui lui demandent quel est son préféré, elle répond :



Pour gagner Rodogune, il faut venger un père. (1044)



C'est-à-dire tuer sa mère. Séleucus se désiste ; Antiochus hésite ; Rodogune renonce. Cléopâtre proclame Antiochus l'aîné, assassine Séleucus qui l'a devinée et prépare pour Antiochus et Rodogune une « coupe nuptiale » empoisonnée (1591). Ballet mélodramatique : la coupe circule de main en main. On annonce le meurtre de Séleucus : l'assassin, se demande Antiochus, est-ce ma mère ou ma bien-aimée ? La coupe devenant suspecte, Cléopâtre y goûte pour que les amants la boivent. Le poison est trop rapide : elle meurt en les maudissant.

Manichéisme, suspense et emphase : Rodogune est un mélodrame. La noirceur de Cléopâtre est soulignée par la pureté de Rodogune et par « le lyrisme élégiaque de l'affection fraternelle » (G. CoutoN).

L'héroïsme providentiel est révolu. Corneille passe de l'épique au tragique.



« Une vierge et martyre sur un théâtre », est un personnage trop passif. Une sainte condamnée au lupanar, cette histoire est « trop licencieuse pour (...] être supportée ». Voilà comment Corneille explique l'échec de Théodore (1645-1646). Mais quelle richesse dans cette ouvre méconnue I Proscrit par ses ennemis triomphants, Valens, veule et machiavélique, s'est rétabli en devenant le mari ou plutôt « l'esclave » (676) de Marcelle, sour d'un favori tout-puissant. Cette parvenue, ivre d'ambition, veut faire de Placide, fils de Valens, le futur empereur et lui marier sa fille, Flavie. Mais Placide refuse de se prostituer comme son père : il dédaigne Flavie qui « en meurt de jalousie » (63) pour adorer Théodore, qui préférerait Didyme si elle n'avait résolu de se vouer au Christ. Espérant se faire bien voir de l'empereur s'il obtient le reniement d'une chrétienne, Valens condamne Théodore au lupanar ; une foule lubrique s'y précipite :



On se pousse, on se presse, on se bat, on se tue (1287).



Didyme fait échapper Théodore. Marcelle les poignarde puis se tue. Placide, qui venait à leur secours, se frappe à son tour.

Valens et Marcelle : lâcheté sournoise et avidité furieuse, sadisme palpitant jusqu'au vampirisme : un bourgeois de Dau-mier et une sorcière de Goya. La sainteté de Polyeucte sauvait jusqu'au machiavélique Félix. Celle de Théodore est refus absolu du monde qui, de son côté, l'extermine. Corneille craint-il que, face à un absolutisme machiavélique, la noblesse - d'âme ou de naissance - n'ait « plus le choix qu'entre la prostitution et la mort » (A. NidersT) ? Violence et romanesque se combinent encore dans Héraclius (1646-1647).



Dans Belisaire (1643) et Don Bernard de Cabrère (1646), Rotrou que la mon de ses protecteurs laisse indépendant depuis 1642, prône une réconciliation qui rappelle Cinna : l'Etat doit reconnaître et honorer les héros. Mais c'est en revenant aux conflits de la valeur et du pouvoir, qui le préoccupaient dès Antigone (1637) et Iphigénie (1640) qu'il écrit ses chefs-d'ouvre.



Saint Genest (1645, 1647) est baroque par le goût du spectaculaire. C'est, comme Polyeucte, une dénonciation de toute valeur politique ou temporelle. Le comédien Genest, qui joue devant l'empereur le rôle d'un chrétien, se déclare chrétien lui-même. La raison d'État exige sa mort : son martyre rend odieuse la tyrannie.

Venceslas (1647, 1648), inspiré d'une tragédie de l'Espagnol Rojas mais aussi du Cid et d'Horace, a pour sujet la dramatique contradiction entre les valeurs morales (et l'amouR) et les nécessités politiques (et le réalismE). Le roi Venceslas a deux fils : le cadet est « la vertu » même ; l'aîné, Ladislas, c'est le « vice », mais il est l'héritier légitime (270). A l'annonce du mariage de Cassandre, qu'il aime et qui le déteste, Ladislas, dans l'obscurité, tue son rival, c'est-à-dire, sans le savoir, son frère. Que va faire Venceslas, père de la victime et de l'assassin, garant de la continuité dynastique et de la justice ?



La Justice est aux Rois la Reine des vertus. (1777)



Mais « l'intérêt de l'État » réclame la survie de l'héritier du trône (1680).



Sa cause, quoiqu'injuste, est la cause publique. (1743)



Nécessité fait loi. Son crime est aboli et l'on prévoit qu'un jour Cas-sandre l'épousera (2).



Cosroès (1648, 1649) reprend la même question, mais pour montrer le divorce entre la valeur, source et effet de la résistance à la tyrannie, et le pouvoir, dont l'exercice conduit au crime. Cosroès, qui a tué son père pour devenir roi plus vite, égaré par les remords, est sous l'emprise de sa seconde femme Syra, qui le fait abdiquer en faveur de leur fils Mardesane. Elle veut arrêter et assassiner Syroès, héritier légitime. Mais le peuple et l'armée le déclarent roi : c'est à lui de juger les trois autres. Syra et Mardesane sont condamnés à mort. Syroès veut gracier son frère : mais il le traite de tyran et marche fièrement au supplice. Syroès supplie son père de reprendre le pouvoir souverain : Cosroès demande la vie sauve pour Syra et Mardesane. Trop tard : alors, accusant son « traître » de fils de joindre « la fourbe à l'inhumanité », il boit fièrement le reste du poison destiné à sa femme. Les affrontements autour du pouvoir, qui avaient failli faire de Venceslas le meurtrier de son fils, après avoir menacé la vie du vertueux Syroès, le rendent malgré lui fratricide et parricide. La politique, c'est la négation des relations humaines. Sujets paradoxaux, intrigues mouvementées, personnages emportés par des passions qu'ils ne maîtrisent ni ne comprennent, le théâtre de Rotrou est caractéristique de l'esprit du premier dix-septième, ranimé sous la Régence.



La comédie, prospère de 1633 à 1638 (en moyenne six pièces par aN), tombe de 1639 à 1641 (une par aN) et repart en 1642 (trois par an jusqu'en 1650), mais dans une nouvelle orientation. La comédie de péripéties romanesques (substitions d'enfants, enlèvements, reconnaissances : cf. La Sour de Rotrou, 1647) devient rare. D'Ouville, Boisrobert, P. Corneille (p. 137), empruntent à la tradition espagnole des aventures galantes où l'intrigue ne procède plus seulement de surprises mais de la fatuité et des méprises des personnages. Bien qu'il ne s'agisse pas de fâcheuses bévues - sauf chez les domestiques -, c'est le début, à l'heure de l'antihumanisme, d'une vision critique de l'homme.

La forme extrême de cette nouvelle orientation, typique des années 1643-1653, c'est la comédie burlesque, dont le protagoniste, valet ou provincial, est un bouffon prétentieux, un « imbécile heureux » (P. LeraT). Le principal auteur est Scarron, avec neuf comédies.










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