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Essais littéraire

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Jules VALLÈS 1832-1885






La trilogie de Vallès ne permet pas de faire l'économie d'une biographie : elle est un travail littéraire et non un compte rendu, malgré toutes les convergences. Jean-Louis Valiez (siC) est instituteur, mais il deviendra professeur grâce aux concours. S'il est féru d'antiquité, il a épousé une campagnarde très terre à terre qui leur fait la vie dure, à lui et à leur fils Jules qui les suit du Puy à Saint-Étienne et à Nantes. Bon élève mais turbulent, celui-ci participe aux mouvements de 48, s'insurgeant particulièrement contre l'opposition parentale et scolaire dont il est lui-même victime puisque son père le fait interner quelque temps ! Il est vrai que Vallès devient voyant et dangereux puisqu'il a voulu s'opposer au coup d'État et que la police l'incarcère en 1853.





Après son baccalauréat, finalement obtenu, il s'inscrit en droit et commence à publier quelques articles, quelques chroniques. Mais la littérature ou le petit journalisme ne nourrissent pas leur homme et lui qui est souvent dans la misère la plus noire fait avec cette ouvre alimentaire qu'est l'Argent (1857, à Jules MiréS) la physiologie apologétique et humoristique de la finance. Pour autant, il n'abandonne pas ses convictions ou sa plume : dans un style virulent et neuf, il écrit pour Rochefort et Villemessant (le FigarO), pour d'autres encore, mais qui ne le payent pas assez pour le dégager des dettes ou de ses emplois subalternes de répétiteur ou d'expéditionnaire. Ces années du second Empire se ressemblent assez pour lui : sans arrêt, par obligation et par tempérament, il lutte, sans qu'il y ait de cloison étanche entre l'écrivain, l'homme privé et l'homme engagé politiquement. Vallès continue à collaborer aux journaux (les Réfractaires, 1865, la Rue, 1866, les Enfants du peuple, 1879, avec des textes de cette époque, sont les recueils des meilleures chroniqueS), il en fonde même (la Rue, 1867-68 ; le Peuple et le Réfractaire, 1869), mais toute cette activité est mal vue de l'autorité : il est obligé de démissionner de son travail et sera même condamné en justice pour ses articles.

Au moment de la guerre et de la Commune, il a un rôle politique important (l'émeute du 31 octobre 1870, son élection dans le xv* arrondissement et sa participation à la commission de l'enseignemenT) qui l'obligera à s'exiler jusqu'à l'amnistie : pour beaucoup, il reste d'abord le « rouge », le directeur honni du Cri du peuple pendant la période qui va de février à mai 1871. De Londres et de Bruxelles, où il essaie toujours de faire paraître un journal à lui, il fait parvenir alors en France des chroniques ainsi que les grands textes qui constituent aujourd'hui l'essentiel de son ouvre : l'Enfant (annoncé par le Testament d'un blagueur, 1869 ; sous le titre Jacques Vingtras en 1878 ; en vol., 1881), puis le Bachelier (les Mémoires d'un Révolté, 1879 ; en vol., 1881) avant l'Insurgé (première version en 1882, reprise par Séverine et publiée en volume après sa mort, 1886). Entre-temps, Vallès a pu revenir à Paris où il relance le Cri du peuple qui sera comme d'habitude une victime désignée du pouvoir et de la police. Mais Vallès, déjà très atteint par une vie de luttes et de tribulations, souffre d'un diabète qui l'emporte en 1885.



Révolte...



Les Réfractaires, l'Insurgé... : c'est évidemment sous le signe de la révolte que se placent les livres de Vallès, et en particulier la trilogie de Jacques Vingtras ; le trajet de ce personnage autobiographique est en effet marqué par l'injustice et l'oppression. Tout commence avec cette mère-tyran dont on retrouverait un peu le profil dans la Madame Lepic de Jules Renard ou dans la Folcoche d'Hervé Bazin. Prenant la place d'un mari timide et mis sous la pantoufle, c'est elle qui représente l'autorité ou plutôt l'arbitraire poussé jusqu'à l'absurde ou à la cruauté : par économie, elle oblige son fils à s'habiller de façon ridicule ou à manger des bonbons passés, elle le prive de ses plaisirs, lui apprend la haine et le mensonge et le bat, bien sûr, pour son bien : « Aussi, plus elle m'arrache de cheveux, plus elle me donne de taloches, et plus je suis persuadé qu'elle est une bonne mère et que je suis un enfant ingrat. » Mais cette attaque ne vise pas qu'une mère dénaturée et la société est une autre forme de marâtre : dans l'univers scolaire, ce sont les agrégés prétentieux, les directeurs et ces inspecteurs qui terrorisent le père autant que le fils ; ailleurs, ce seront les directeurs de journaux, les patrons, les sergents de ville et les honnêtes gens dont on sait depuis Zola que ce sont des gredins.



En face, il y a les autres, c'est-à-dire la grande masse des victimes, de ceux qui ne commanderont jamais et à qui va la sympathie de Vallès : les compagnons de classe, parfois, lorsqu'ils ne sont pas encore plus sadiques que leurs professeurs, les compagnons de misère, plus tard, qui font comme lui partie des déclassés, incapables de travailler de leurs mains et refusés en même temps par une société où ils croyaient parvenir, grâce à leur savoir et à leurs diplômes. Le narrateur de l'Insurgé se souvient de ses jeunes années lorsqu'on lui donne la charge de surveiller des élèves : le pion brusquement se métamorphose en meneur de révolte : « Je pense être plus utile à votre avenir en vous conseillant de jouer aux dominos, aux dames, à l'écarté. Les plus jeunes seront autorisés à planter du papier dans le derrière des mouches ! » Plus généralement, la parole de Vallès est toujours un cri : de révolte, de tendresse et de pitié pour les humbles, les misérables. L'Enfant est dédié « à tous ceux qui crevèrent d'ennui au collège ou qu'on fit pleurer dans la famille, qui, pendant leur enfance, furent tyrannisés par leurs maîtres ou rossés par leurs parents », tandis que l'Insurgé s'adresse « à tous ceux qui, victimes de l'injustice sociale, prirent les armes contre un monde mal fait et formèrent, sous le drapeau de la Commune, la grande fédération des douleurs ». En solidarité avec les malheureux parce qu'opprimé lui-même, le narrateur (et le parallèle est souvent possible avec la voix très présente d'un auteuR) veut faire l'histoire de ceux qui n'ont pas d'histoire, des irréguliers, des marginaux et des bizarres.



Et poésie ?



Mais Vallès ne se contente pas de faire l'inventaire d'un univers social négligé, il désire surtout faire passer une émotion et, dès lors, le réaliste qu'il est devient peintre ou poète. Une petite scène, une silhouette est décrite avec la précision d'une vignette ou la légèreté d'une esquisse, à la fois pittoresque et riche d'humanité : le philhellène pique-assiette, le passeur d'examens qui se substitue au vrai candidat, la femme sans jambes ou à barbe, le bachelier géant, le saltimbanque, plus généralement tous ceux qui couchent sous ou dans un arbre, mangent à l'occasion, font des brochures pour les Valaques et des sermons pour les curés de banlieue...

On ne peut donc enfermer l'écriture de Vallès dans une quelconque idéologie, dans un genre ou une attitude, polémique ou politique : ce style est loin, en effet, de toute langue de bois et, à chaque instant, une nouveauté, une image, une ellipse, une phrase biscornue ou familière vient surprendre, amuser et retenir le lecteur. On devrait aussi parler de la forme courte et fragmentaire que choisit souvent Vallès : la chronique et l'article furent son genre et les romans eux-mêmes sont constitués de brefs chapitres, les chapitres de paragraphes de quatre lignes, interrompus souvent par des bouts de dialogues, des interjections, des phrases nominales... Mais cette écriture libre, encore une fois, est une révolte dans la mesure où elle s'oppose à l'écriture sage des dissertations de lycée, des vers latins, des exercices ennuyeux et serviles qu'on pratique au Concours Général ou à l'agrégation. Souvenons-nous en effet que le Bachelier est dédié « à ceux qui, nourris de grec et de latin, sont morts de faim ». A cette culture irréaliste et déphasée, Vallès oppose la vie et c'est la tâche, justement, qu'il assigne à son style : traduire une vérité, faire bouger le langage comme la société.

Car Vallès ne s'enferme pas dans la revendication négative. S'il y a critique, c'est parce qu'à côté de la laideur existe la beauté, à côté de la peine, l'espoir d'un bonheur. L'Enfant est ainsi éclairé par quelques passages roses, par quelques fêtes, quelques rencontres aussi : les jolies cousines, par exemple, vivent « au pays » et on peut mener auprès d'elles une existence simple et sans crainte. Au-delà, il y a les camarades de lutte et par-dessus tout le peuple en général que ce lettré contre son gré veut retrouver. Auprès des paysans et des ouvriers seulement, auprès de ceux qui sont en blouse, il pourra retrouver cette authenticité et ce bonheur que les bourgeois ne connaissent pas : elle tient à une certaine générosité que Vallès, lui aussi, met dans son engagement et son écriture.



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