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Essais littéraire

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Henri Michaux (1899-1984)






Après la guerre, Henri Michaux se consacre entièrement à son ouvre poétique et picturale. On sait, par les « quelques renseignements sur cinquante-neuf années d'existence » (1958) que, né à Namur en Belgique, il est envoyé très tôt dans un pensionnat « pauvre, dur et froid » de petits paysans flamands, et que, dès l'âge de vingt et un ans, il part vers des contrées lointaines où il voyage « contre » afin d'« expulser de lui sa patrie, ses attaches de toutes sortes et ce qui s'est, en lui et malgré lui, attaché de culture grecque ou romaine ou germanique ou d'habitudes belges ». C'est en Asie, en 1930-1931, qu'il découvre « enfin son voyage ». De retour en France, contraint de s'exiler au Lavandou pendant l'Occupation, il poursuit avec obstination la quête de lui-même.





Dans toute son ouvre, dont les principaux recueils d'après-guerre ont pour titres Épreuves, exorcismes 1940-1944 (1945), la Vie dans les plis (1949), Passages (1950), Mouvements (1951), Face aux verrous (1954), Misérable Miracle (1956), l'Infini turbulent (1957), Connaissance par les gouffres (1961) Émergences-Résurgences (1972), Poteaux d'angle (1978), Michaux ne cesse de nous entretenir de lui sans que pour autant on puisse parler de biographie. Ce poète reste fondamentalement un voyageur dont les périples sont tout autant réels qu'imaginaires, extérieurs qu'intérieurs. L'après-guerre est l'époque où il se consacre plus particulièrement à l'exploration de P« espace du dedans », du « lointain intérieur », permise entre autres par l'usage de la mescaline. C'est que, pour Michaux, toute exploration nouvelle a valeur de découverte effarante car le monde extérieur, l'imaginaire ou le subjectif, témoignent d'une même réalité, celle de « l'espace, mais vous ne pouvez concevoir cet horrible en dedans en dehors qu'est le vrai espace » (Face aux verrouS). L'écriture permet justement de parcourir cet « en dedans en dehors » avec tous les risques et les bonheurs que l'entreprise suppose. Le retrait et le silence dans lesquels il se confine (il refuse en 1965 le grand prix national des LettreS) s'affirment comme une nécessité vitale pour ce poète dont l'ambition n'avait rien de social dans la mesure où elle se proposait de parvenir aux bords extrêmes de l'expérience personnelle : « J'écris pour me parcourir. Peindre, composer, écrire : me parcourir. Là est l'aventure d'être en vie » (PassageS).

Cette dernière expression est capitale : elle caractérise exactement la vie et l'ouvre d'Henri Michaux. Le dépaysement absolu n'est pas tant suscité par les voyages lointains que par la conscience aiguë d'être au monde qui fait de lui un véritable émigré de l'intérieur. Hors de lui, en lui-même, Michaux cherche l'inconnu et tous les moyens ici lui sont bons : poésie, peinture, musique, observation clinique. En 1957, par exemple, une fracture du coude droit rend sa main inutilisable : il découvre alors avec étonnement l'« homme gauche ». Lorsque Michaux tente de trouver une unité à la diversité de ses expériences, les termes spatiaux s'imposent spontanément pour désigner un mouvement exploratoire qui ne se contente jamais d'un résultat même provisoire : « Je fais surtout de l'occupation progressive », dit-il dans Passages. Constamment inquiet, il poursuit cette « aventure d'être en vie » avec, pour seul et impossible horizon, l'espoir d'enfin « savoir ».



D'où le recours à la drogue. En 1956, Michaux absorbe pour la première fois de la mescaline : il retrace son expérience dans Misérable Miracle (1956). Suivra l'Infini turbulent (1957) où Michaux reconnaît avec fureur le silence où il est réduit : « Depuis toujours révolté par les portes interdites, et les "réservé aux initiés", là pourtant j'ai su de moi-même qu'il ne faut pas, et surtout pourquoi il ne faut pas, parler davantage. L'arme surhumaine aux multiples tranchants ne peut être livrée. » Dans les Grandes Épreuves de l'esprit (1966), troisième ouvrage consacré à la drogue, le motif de l'enfermement en soi-même domine : le domaine extérieur n'est figuré que par un verre, un tube de colle, un magazine. Hallucinations et pensées ont la fulgurance d'éclairs non maîtrisés. Les fixer un instant, réfléchir sur leur puissance ne peut se faire qu'au prix de tâtonnements hébétés, de répétitions lancinantes. La conscience ne peut finalement se saisir elle-même. Michaux constate avec désespoir l'impossibilité d'être autre et soi-même à la fois : on ne peut en même temps ou successivement se perdre dans l'hallucination, en noter les effets, consigner les réactions du patient, afin d'en extraire une solution. Dans Connaissance par les gouffres (1961) où le poète fait état des réflexions nées de l'usage de la drogue, il repère trois stades dans l'expérience : celui où l'individu parvient à contrôler ses contradictions, celui où, saisi par la drogue, il entrevoit « succession et séparation totale des pulsions antagonistes » ; enfin l'accession à l'extase « où la conscience règne », moment « sans alternance, comme sans mélange » d'une « totalité inouïe ». Drogue, folie et poésie se fondent alors dans un « grand jeu » où la violence envahit le champ du réel et où les mots perdent leur sens.



Les images agressives et oppressantes qui hantent les visions mescaliniennes déjouent toute tentative d'interprétation par la raison. Cependant, l'épreuve de la drogue pousse l'individu vers la compréhension d'autrui en revivant l'expérience de « certains de ceux-là auxquels on donne le nom de schizophrènes, (dE) milliers auxquels on n'a pas encore donné de nom ». Cette expérience personnelle débouche, en fait, non sur un exposé médical, mais sur l'écriture poétique de la clairvoyance qui se déploie « nerveusement et non constructivement ».



La drogue n'est qu'un des aspects de cette prospection de l'intériorité qu'a entamée Michaux. La Vie dans les plis, qui regroupe une série de textes écrits entre 1945 et 1948, témoigne du même désir d'atteindre les limites de l'individu. Les cauchemars sont l'objet d'une description sans complaisance : thermocautères sillonnant les plaies, appareil à éventrer, sabre ondulant fin comme une aiguille « qui vous perce à distance et à travers vous la personne qui se trouve au-delà ». Le dessin sert à la révélation du monde intérieur : les « Meidosems », dessins ou signes, fins et souples, introduisent dans un monde étrange où « un nuage ici fait un nez, un large nez tout répandu, comme l'odeur autour de lui, fait un oil aussi, qui est comme un paysage... ». La mort brutale de la femme aimée poursuit la dislocation de la personnalité : « Le démantèlement commença avec la mort de quelqu'un avec qui je vivais. Ce quelqu'un était femme, c'est-à-dire propre à s'insinuer dans tous les couloirs de l'âme. »

L'ouvre d'Henri Michaux, dont on n'a donné ici qu'une présentation sommaire, est inclassable dans la production littéraire contemporaine. Marginale et déroutante, elle reste solitaire, ne revendique aucune filiation et ne se cherche pas d'héritier. Sans origines et sans futur, elle est absolument unique.






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