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François de Malherbe - POÈTE DU CENTRALISME






François de Malherbe (1555-1628) est le grand maître du premier quart de siècle parce qu'il a su couronner l'évolution de la poésie contemporaine et, tout en la soumettant aux perspectives les plus opératoires du temps, lui donner les moyens d'une autonomie artistique. Mais il pose du même coup des limites à l'imagination poétique.



1. Repères



Fils d'un gentilhomme de Caen, conseiller au présidial et leader protestant, le jeune Malhetbe se fait catholique sans véritable conviction. Révolte contre le père (5) ? En tout cas, ralliement au Roi et à la majorité : ce sera sa ligne directrice. En 1576, il devient secrétaire du duc d'Angoulême, gouverneur de Provence, après la mort duquel (1586) il vit tantôt à Caen (loyale à Henri IV dans une province dominée par la LiguE), tantôt à Aix où il subit l'influence de Du Vair (à partir de 1599) et traduit Sénèque. Ses premiers poèmes (1575-1587) étaient expressionnistes et recherchés : cf. Les Larmes de saint Pierre. La fermeté s'affirme avec la Consolation à Cle'ophon (1592), l'orientation néo-stoïcienne et les odes monarchiques écrites à partir de 1596. La doctrine est fixée dès 1599 (cf. Y Ode à la reine, 1600). L'influence de Du Vair la confirmera. En 1605, Malherbe s'installe à Paris. Invité par Desportes, il lui déclare que son potage est meilleur que ses poèmes. Lui-même renie Les Larmes de saint Pierre (1607). En 1605, à cinquante ans, il n'avait encore composé qu'une vingtaine de poèmes et n'en avait publié que dix. De 1605 à 1628, il en compose cinq fois plus, en publie dix fois plus. Dès 1606, il fait figure de poète officiel, pensionné à partir de 1611. Mais sous Concini et Luynes, il est en retrait et il écrit peu (1615-1621). L'arrivée de Richelieu lui donne un intense espoir et un nouveau dynamisme. Depuis 1615-1620, c'est un chef d'école. Sa poésie est devenue de plus en plus ferme et, avec l'âge et les déceptions, plus tendue : cf. Paraphrase du psaume CXLV et Ode pour le Roi allant châtier les Rochelois (1627).





2. L'amour de l'ordre



Malherbe a une personnalité vigoureuse, autoritaire, qu'on retrouve dans l'intransigeance du chef d'école, la fermeté du style, la fierté des clausules. Jeune, il était ardemment ambitieux. Mais une difficile expérience lui a appris à « faire de nécessité vertu » (6). D'autres chantent les tumultes des passions et les caprices du sort, l'angoisse et le plaisir du changement ou les fictions utopiques. Il sera le poète de la fermeté mentale, de l'ordre social, de la permanence divine.

Il est très fiet de sa noblesse, petite, pauvre, mais ancienne - et désolé que son père ait été magistrat. «Je voudrais, je le jure devant Dieu, avoir un bras coupé et qu'il n'y eût jamais eu office en noue maison » (22 novembre 1618). Il trouve étrange qu'Erasme ou Juste Lipse aient parié de civilité : il faut être gentilhomme et vivre à la cour pour s'y connaître. Mais tout en affirmant que « l'épée est la vraie profession du gentilhomme » (14 octobre 1626), il est résolument opposé aux tévoltes nobiliaires comme à tous



Les funestes complots des âmes forcenées (XXXIII)



à tous les « ennemis du repos où nous sommes » (IV), grands ou protestants, qui veulent « détruire l'Etat » (V), renverser « les pouvoirs légitimes ». (XXXVIII), semet « le désordre et la sédition » (XXLX), réveiller « la discorde aux crins de couleuvres » (XVI). Bien que partisan de l'union, de la paix, de la clémence, il réclame la force contre les fauteurs de guerre, ces « fléaux de la France » qui mettent leur « gloire aux misères publiques ». Il va jusqu'à inviter le roi à exterminer les protestants révoltés :



Marche, va les détruire : éteins en la semence. (XXLX)



Sa ligne directrice, c'est l'amour de l'ordre public, garanti par l'autorité de l'Etat et source d'heureuse prospérité.

Certes, il est le premier intéressé dans cet engagement qui fera de lui le poète officiel du régime. Malherbe est réaliste (8) et paresseux pour tout ce dont il « n'espère ni plaisir ni profit » (18 octobre 1625). C'est un poète courtisan, au service de qui lui assure subsistance et renommée ; mais à condition que cela ne heurte pas son attachement à l'ordre public, à l'intérêt national et à la solidarité dynastique qui les garantit. Il met sa plume au service des amours d'Henri IV. Mais quand une favorite veut légitimer un bâtard, il célèbre les < chastes amours » du roi et de « sa compagne fidèle ». Avant de rimer (juillet 1609-avril 1610) des billets doux sollicités par Henri IV (2 février 1609), Malherbe rappelle (mars 1609) qu'un roi soucieux de son autorité doit se défier de l'Amour,



Ce public ennemi, cette peste du monde. (Ballet de MadamE).



D'où une intense admiration pour Richelieu. « L'esprit, le jugement ne furent jamais en l'homme au degré qu'ils sont en lui. Pour ce qui est de l'intérêt, il n'en connaît point d'autre que celui du public. Il s'y attache avec une passion, si je l'ose dire [...], déréglée [...]. Il s'y restreint comme dans une ligne écliptique et ses pas ne savent point d'autre chemin. » Il se distingue par le « mépris qu'il fait de soi et de tout ce qui le touche comme s'il ne connaissait point d'autre santé ni d'autre maladie que la santé ou la maladie de l'Etat » (14 octobre 1627). « Il y a en cet homme quelque chose qui excède l'humanité » (10 septembre 1625). Comme Richelieu et Rodrigue, Malherbe met la vigueur du gentilhomme au service de l'Etat : cet engagement fonde sa poétique.



3. Le chantre de la vérité générale



Pour la Renaissance, le poète est un génie inspiré, qui révèle aux hommes les vérités transcendantes et refuse d'être « esclave »



De l'art aux Muses inutiles



« art pénible et misérable », travail servile de versificateur (Ronsard, Odes, I, 10) (9). C'est à cette prétention que s'oppose Malherbe. Fidèle sujet, il ne saurait avoir de génie exceptionnel, d'inspiration divine, de message à délivrer ni d'état d'âme qui vaille d'être publié. La raison première n'est pas froideur d'imagination ; c'est que le poète doit être le chantre d'ufle vérité d'intérêt général dont il n'est pas l'inventeur : je suis du « parti de la vérité » (à Balzac, 1625). Aux frénésies passionnelles, imaginations originales et recherches stylistiques, Malherbe oppose la rationalité d'un modèle commun : c'est pourquoi il est classique. C'est d'autant plus remarquable que la plupart de ses poèmes sont des ouvres de circonstance réduites à l'essentiel, à l'exemplaire.

Sa poésie (10) est une célébration emphatique dont les qualités essentielles seront la logique et la clarté, nécessaires pour fixer et propager la vérité, la rendre assurée et transparente pour tous. Malherbe divise le poème en strophes, la strophe en groupes rythmiques ; il proscrit l'enjambement pour faire coïncider l'unité sémantique avec l'unité syntaxique et rythmique, en formules fermes, distinctes, équilibrées et sereines comme l'ordre, souvent closes par une rime masculine où elles se concentrent dans un terme bref ou pompeux. Il utilise la langue abstraite de la vérité générale, la langue moyenne de l'honnête homme contemporain (pas celle des crocheteurs du Port au Foin : c'est une boutade contre pédants et précieuX), sans archaïsme, particularisme, ni ambiguïté. Ce poète n'est pas un démiurge ni un voyant, mais un précepteur et un technicien, qui se veut « excellent arrangeur de syllabes ». Il a le sens de la formule (de l'antithèse surtouT) et de la musique : harmonie complexe et discrète, nombreuse et fluide, scandée par la précision des rimes, le jeu des accents et des moelleuses finales féminines.



4. L'émotion



Malgré ce vif souci de la forme, Malherbe ne donne pas dans l'art pour l'art. C'est au contraire son engagement qui fonde son art : il choisit la rhétorique pour convaincre, la fermeté pour construire, au sortir d'une époque d'instabilité politique et mentale. Ses grandes ouvres sont politiques, morales ou religieuses. Sa fierté assume avec douleur une condition humaine dominée par la mort, l'injustice du son et des Grands. On ne saurait réduire à la froide technique ce qui est un art « en désespoir de toute illusion » (F. PongE). Toute sa vie, Malherbe s'est plaint de sa mauvaise fortune : mal aimé dans sa famille, trahi par la mort de son protecteur Henri d'Angoulême, dégoûté par les favoris Concini et Luynes. « Ma fortune est un monstre » (1626). Les Grands sont égoïstes et durs. Les rois « ne se soucient de personne » (1625).



Quoi donc c'est un arrêt qui n'épargne personne

Que rien n 'est ici bas heureux parfaitement,

Et qu 'on ne peut au monde avoir contentement

Qu'un funeste malheur aussitôt n'empoisonne. (X)



La vie est dominée par le malheur et la mon. Mais il faut accepter, assumer l'ordre des choses.



La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles

De murmurer contr'elle et perdre patience

Il est mal à propos Vouloir ce que

Dieu veut est la seule science

Qui nous met en repos. (Consolation à Du Pe'rier, 1592-1598) car « rien que Dieu n'est permanent » (Pour une fontainE).



Un stoïcisme âpre et désabusé fait vibrer secrètement la fermeté malherbienne, « hautaine entreprise » d'un « athlète » (1610). La précarité chère aux baroques se retrouve chez lui, mais domptée par un effort dont on sent parfois la pathétique grandeur :



N'espérons plus, mon âme, aux promesses du monde ;

Sa lumière est un verre et sa faveur une onde.

En vain, pour satisfaire à nos lâches envies,

Nous passons près des rois tout le temps de nos vies

A souffrir des mépris et ployer les genoux ;

Ce qu 'ils peuvent n 'est rien ; ils sont comme nous sommes

Véritablement hommes

Et meurent comme nous.

(Paraphrase du psaume CXLV, 1627)



Seule la perfection de l'an nous sauve du néant.



Par les Muses seulement

L'homme est exempt de la

Parque Et ce qui porte leur marque

Demeure éternellement. (VII, 207-210)



Quatre poèmes s'achèvent sur cet adverbe. Malherbe est classique parce qu'il impose en pédagogue officiel une vérité commune et parce que déjà il sait « faire quelque chose de rien » (RacinE), sublimant son pessimisme dans une sereine harmonie « où le mouvement n'est suggéré que pour mettre en valeur l'équilibre et le repos » (J.-P. ChauveaU). Sa fermeté n'est pas sécheresse, mais plénitude rassurante, d'autant plus précieuse que ce poète est stérile et lent ; une fois construite, elle le comble de sa douce pesanteur.



La moisson de nos champs lassera les faucilles.

Et les fruits passeront la promesse des fleurs. (Prière pour le RoI)



La satisfaction poétique excède la technique qui l'a produite ; la faucille cesse de trancher pour être accablée de plaisir, le fier Malherbe est comblé par son assujettissement. Fier de sa noblesse et de sa supériorité, sceptique, pessimiste et quelque peu libertin mais soumettant tout cela à la discipline monarchique et rationaliste, il était bien placé pour tirer le meilleur parti des richesses de son temps et en devenir le principal représentant aux yeux d'une postérité qu'il prépare.






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