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Essais littéraire

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BOSSUET JUSQU'EN 1669






Comme les autres intellectuels chrétiens de son temps - Arnauld, Nicole, Pascal, Malebranche - Jacques Bénigne Bossuet (1627-1704), né à Dijon, est d'une famille de juristes, anoblie au XVI-siècle. Cette origine et un solide tempérament expliquent en partie sa personnalité de robuste travailleur, sûr d'avoir raison, sectateur de l'ordre établi et du juste milieu « où la justice, où la vérité, où la droite raison a posé son trône » (Oraison funèbre de N. Cornet, 1663). Fervent dans sa foi et dans son rationalisme, il va droit à l'essentiel ; mais certaines choses échappent à son positivisme naïf.



1. De la critique à la faveur (1659-1669)





Bossuet est un orateur capable d'impressionner. La reine mère l'apprécie. Il est membre de la Compagnie du Saint-Sacrement (p. 53 et 216) (6). Le parti dévot, soucieux de contrecarrer l'émancipation du roi et de la jeune cour, le fait venir à Paris en 1659- De 1660 à 1669, il prêche neuf Carêmes et neuf Avents complets (douze et six sermons à chaque foiS) dont deux (1662, 1666) et deux (1665, 1669) devant la Cour. Parce qu'il prêche la certitude religieuse dans un système social qu'il admire, Bossuet, par son lyrisme rationnel, est le premier en date de nos classiques (p. 186).

Mais, jusqu'en 1669, la dimension critique de son ouvre est importante. N'est-il pas chargé de prêcher la foi, l'humilité, la vertu à un roi orgueilleux et adultère, à une cour plus mondaine que chrétienne ? Il montre les pauvres qui « meurent de faim et de désespoir [...] au milieu de tant de plaisirs et de tant d'excès » (5 mars 1662) (7). Il dénonce l'adultère. Cènes rien de nouveau : les prédicateurs répétaient ces préceptes devenus des exutoires, sinon des alibis du système. Mais, devant un roi libertin, en révolte contre le joug dévot, en conflit avec le pape, les mêmes paroles ont un autre sens que devant le pieux Louis XIII. Troublée, Louise de La Vallière s'enfuit dans un couvent : le roi la ramène et boude les deux sermons suivants. Mais surtout Bossuet expose Les Devoirs des rois, programme politique et moral des dévots, dont les divers points ne seront repris par la suite que séparément et atténués. Pendant trois ans et demi, il ne sera plus invité à prêcher devant la Cour.

Il est dans une position ambiguë. C'est, nous dit-on, « le plus honnête homme, le plus droit, le plus doux et le plus franc qui ait jamais été mis à la Cour » (Mme de Lafayette, 9 septembre 1670). Mais pour agir il doit se faire accepter. Otage ébloui, son admiration pour l'absolutisme, la grandeur du roi, la splendeur de la Cour, le conduit à considérer des péchés mortels comme des accidents regrettables et non comme des tares inhérentes au système. Enfin, il n'est pas sans quelque ambition, manouvre pour un prieuré (1660) et passe, sans vouloir le reconnaître, de l'ultramontanisme dévot au gallicanisme gouvernemental (1663). Un agent de Colbert prétend qu'il cherche « à plaire à tous », « se ménage » de tous côtés, est « attaché à tous ceux qui peuvent faire sa fortune » (1663). Mais sa conscience chrétienne demeure la plus forte.

Pour faire plaisir à sa mère mourante, Louis XIV le désigne pour l'Avent de 1665 et le Carême de 1666. Devenu gallican, il s'est rapproché de la politique royale. Il est moins précis dans la forme : il entre « dans la grande manière classique, qui exclut des allusions trop directes et trop vives, les pétulances hors de la mesure, hors des limites des convenances sociales » (J. CalveT). Toutefois, sa morale reste fort exigeante. Dès le premier sermon, il choque le Roi, évoquant la crainte de sa damnation : « Que cet auguste monarque [...] soit auprès de Saint Louis qui [...] lui montre sa place ! O Dieu, que cette place ne soit point vacante ! » Mais le Carême de 1666 à Saint-Germain est plus prudent, plus vague, un peu amer : la reine-mère est morte, les mondains l'emportent, c'est le règne des plaisirs. Le roi quitte Saint-Germain pour Versailles, manquant deux sermons.

Dans l'Avent de 1669, Bossuet, promu évêque, retrouve sa vigueur, dénonçant par exemple la « mortelle léthargie » des mondains qui vivent dans l'oubli de Dieu tandis que « la mort [...] s'insinue avec les nourritures que nous prenons, avec l'air que nous respirons, avec les remèdes mêmes par lesquels nous tâchons de nous en défendre [...]. Sire, que vous servira d'avoir porté à un si haut point la gloire de votre France » si « vous ne travaillez encore à des ouvres qui soient comptées devant Dieu » au « jour effroyable où Jésus-Christ paraîtra en sa majesté [...] et ne fera [...] qu'un amas de cendre de tous les monuments des rois ? » (Sur l'endurcissemenT).



Cette vigueur retrouvée est-elle liée au fait que Bossuet sait qu'il ne prêchera plus de longtemps devant le Roi ? De son côté, celui-ci est maintenant le maître et vit à sa guise. La reine mère est morte, l'éblouissante Montespan a remplacé La Vallière, les bâtards de celle-ci sont légitimés, la Compagnie du Saint-Sacrement étouffée, Tartuffe autorisé. Il se doit d'équilibrer cela par des sermons sans danger, qui contribuent à la splendeur du règne. Néanmoins, plutôt que les sermons, ce sont les succès contre les protestants et particulièrement la conversion de Turenne, le plus prestigieux d'entre eux (1668), qui entraînent la faveur de Bossuet. Le voici évêque de Condom (septembre 1669), précepteur du Dauphin (septembre 1670), membre de l'Académie (mai 1671) : à sa réception, il fait un vibrant éloge du roi, qu'il ne critiquera plus.



2. Une vision de l'homme



Bossuet a des élans d'admiration pour l'homme, « animal divin, plein de raison et d'intelligence et capable de connaître Dieu » (1666).



Son humanisme est intellectualiste, volontariste, nourri de culture païenne. Mais il le soumet à la foi. La raison, « rend l'homme maître en lui-même. Mais pour être maître en soi-même, il faut être soumis à Dieu », ce qui demande un certain renoncement à ses propres lumières. Car « la foi est une adhérence du cour à la vérité éternelle malgré tous les témoignages et des sens et de la raison » (1663).

Admirateur de nos capacités, Bossuet est résolument pessimiste sur nos tendances : concupiscence, orgueil, amour-propre, ambition nous conduisent. « Il faut aller jusqu'à l'horreur quand on se connaît » (lettre du 3 mars 1674). L'expérience sociale confirme son pessimisme : triomphe des vices, humiliation des justes, écrasement des pauvres ; la vie mondaine et courtisane « entraîne tous les hommes dans une ruine presque infaillible » (1700). L'augustinisme vient le justifier : « nous sommes tous maudits, notre naissance est gâtée et infectée dans sa source » {Discours sur l'Histoire universelle, III, 1). La modération réaliste de Bossuet, son respect des autorités l'opposent aux jansénistes « esprits [...] excessifs » (Oraison funèbre de N. Cornet, 1663). Mais il a bien la même vision de l'homme. En revanche, il croit que la bonté salutaire de Dieu s'exercera bien plus largement qu'ils ne le pensent. Moraliste pessimiste, il reste un chrétien optimiste, dont la sévérité est en partie pédagogique.



3. L'éloquence



En ce siècle de civilisation, de moralisation, de christianisation, où l'écrit n'a pas encore pris le pas sur la parole et où, du théâtre à la Cour, la représentation, la cérémonie ont une importance capitale, l'éloquence sacrée est un genre important.

Nous avons dix des douze oraisons funèbres de Bossuet (8) avec le manuscrit des deux premières, une vingtaine de panégyriques et plus de deux cents sermons, avec de nombreux manuscrits. Les premières (dont se rapprochent les panégyriqueS) sont des discours officiels, soigneusement rédigés, destinés à la publication. Les sermons, moins solennels, sont des préparations, qui vont de la simple esquisse à la rédaction soignée, et non des textes définitivement fixés (9). Nous avons parfois la sténographie du sermon réellement prononcé, qui montre les changements dans la pensée et le style, la capacité d'improvisation. Reste à imaginer la vigoureuse présence de Bossuet.

Les thèmes sont variés. Portraits (Condé, Turenne, CromwelL), fresques historiques (la révolution anglaise, la France au temps de la révocation de l'édit de NanteS), récits épiques (la bataille de RocroI), analyses politiques (Oraison funèbre de Le TellieR), péripéties tragiques et déplorations pathétiques (la mort de Madame*), dans les oraisons funèbres, centrées sur un grand thème chrétien : la providence (Henriette de France, 1669) la mort {Henriette d'Angleterre, 1670), la vertu {la reine, 1683), la grâce (la Palatine, 1685), la sagesse (Le Tellier, 1686), la piété (Conde', 1687). Grands moments de la vie des saints (conversion, combats, martyrE) dans les panégyriques. Les sermons dépendent des auditoires : religieux, soldats, mondains ou princes. Mais il s'agit toujours, à partir d'une expérience contemporaine éclairée par la Bible et les Pères, d'inculquer la morale religieuse aux hommes en général.

Pour Bossuet, la prédication est une tâche pastorale : l'essentiel n'est pas « l'art du bien dire », dont il faut éviter les « figures artificielles ». « Tout se fait par une secrète vertu qui persuade contre les règles » (1665, O.O., IV, 657) ; « non des brillants qui égayent, ni une harmonie qui délecte, ni des mouvements qui chatouillent, mais des éclairs qui percent, un tonnerre qui émeuve, une foudre qui brise les cours ». Cela ne veut pas dire que le prédicateur doive « négliger les ornements de l'élocurion quand il les rencontre en passant » et surtout quand il les trouve dans l'Ecriture. Bossuet étudie les orateurs et prosateurs grecs et latins, Balzac et Descartes, mais surtout la Bible, les Pères, saint Augustin. Cette culture lui permet une sublime aisance, une « vive et majestueuse simplicité » (1M janvier 1687) où l'éloquence « semble venir comme d'elle-même, attirée par la grandeur des choses » (13 mars 1661).



Bossuet veut concilier la modestie chrétienne et l'esthétique du sublime chère à l'académie Lamoignon. Mais parfois la pompe requise par les cérémonies l'emporte, le prédicateur est entraîné par le public qu'il devait transformer (10) et le style participe du narcissisme que le message condamne : « Parais donc ici, ô honneur du monde, vain fantôme des ambitieux et chimère des esprits superbes » (21 mars 1660). Les Oraisons funèbres sont inévitablement apprêtées. Néanmoins, à l'aise dans le grandiose, Bossuet transforme des cérémonies faites « pour satisfaire l'ambition des vivants par de vains éloges des morts » en exhortations religieuses. Le destin des Grands montre « le néant des grandeurs humaines » et devient modèle de « toutes les calamités du genre humain » (Oraison funèbre d'Henriette d'Angleterre, 1670).



La Providence « se glorifie de faire la loi aux rois » par « de grandes et de terribles leçons » afin de « faire trembler toute créature sous les jugements de Dieu » [Oraison funèbre d'Henriette de France, 1669). On retrouve les thèmes et le style de la tragédie, car il s'agit d'inspirer terreur et pitié.

Bossuet est un orateur pédagogue : l'exemple et l'image redoublent l'affirmation morale ou théologique. Ses armes sont simples : l'autorité de la parole divine, la logique, l'émotion. « Procédons par principes : les hommes ne reviennent que par là » (Pâques 1681). Cet homme, qui a « le génie de l'abstraction » (J. TrucheT), ramène tout à des idées simples, à des images exemplaires. Il compose méthodiquement, par opposition, parallélismes, reprises et déductions, dans une harmonie large et ferme. Phrases solides, assez symétriques, qui montent et redescendent par paliers.

Ces dissertations rationnelles sont aussi des tableaux dramatiques, des appels pathétiques, des effusions lyriques. Bossuet voudrait « imiter le tonnerre du Dieu vivant ». Parfois, au début, l'émotion se fait vision baroque, comme dans cette évocation du Christ : « contemplez cette face, autrefois les délices, maintenant l'horreur des yeux [...]. O plaies, que je vous adore ! Flétrissures sacrées, que je vous baise ! O sang qui découlez, soit de la tête percée, soit des yeux meurtris, soit de tout le corps déchiré, ô sang précieux, que je vous recueille ! » (26 mars 1660). Mais en général, le style reste assez abstrait, le lyrisme majestueusement rhétorique. C'est surtout dans le ton et le rythme, nombreux et tonifiant, que s'exprime l'engagement affectif de l'orateur dans sa parole : phrase courte de la narration et de la critique (une « phrase de combat », Ch. BruneaU), ampleur des exhortations. « Dans l'ordre des écrivains, je ne vois personne au-dessus de Bossuet ; nul [...] plus énergique et plus délié dans tous les actes du discours [...], plus maître du langage » (P. ValérY). Mais « la pensée n'est pas tout à fait au niveau de l'expression » (L. CogneT).






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