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AUGUSTE RODIN - ENTRETIEN AVEC RODIN






La sculpture de la fin du XlX-e siècle et du début du XX-e est dominée par l'imposante figure d'Auguste Rodin. Tout l'art de cette période vient de lui. Visionnaire ardent, Rodin était animé par un romantisme lyrique, mais dépourvu du sens du monumental. Peu d'artistes ont connu comme lui, de leur vivant, une pareille gloire. On l'a appelé «un Moïse de la sculpture». Malgré le culte qu'on lui rendait, Rodin sut rester un homme simple et bon, dont la «conversation familière mêlait le bon sens aux aperçus géniaux sur l'art. ». Après une enfance besogneuse, il entra à l'âge de quatorze ans aux Arts décoratifs, mais peu de temps après il dut abandonner ses études pour gagner sa vie. Tour à tour mouleur, praticien, ciseleur, il apprit à fond dans d'humbles besognes les techniques compliquées de la sculpture. Le choc qu'il éprouva en admirant les ouvres de Michel-Ange en Italie le libéra de l'académisme. À l'âge de trente-sept ans il donna sa première ouvre importante, véritable chef-d'ouvre, L'Age d'airain, qui produisit une espèce de scandale. La perfection anatomique de cette ouvre magistrale le fit accuser d'avoir pris le moulage de son modèle, le soldat télégraphiste Auguste Ney. Il fallut que les plus grands artistes de l'époque signassent une attestation garantissant la bonne foi de Rodin pour que cette campagne cessât. Il accumula ensuite les chefs-d'ouvre: Les Bourgeois de Calais, sculpture évoquant un moment douloureux et en même temps héroïque de la guerre de Cent ans; Saint Jean Baptiste, Eve, Balzac (ouvre pour laquelle il se passionna et pour laquelle il exécuta non moins de quarante éludes préparatoireS); Le Penseur.





Oeuvres de Rodin les Portes de l'Enfer; le Baiser (1886); les Bourgeois de Calais (1884-1886); Balzac (1891-1898); le Penseur ; Clemenceau (1911)



ENTRETIEN AVEC RODIN

(LE MOUVEMENT DANS L'ART)



Remarque: les phrases du texte du manuel officiel sont mises en caractères gras.



«Notez d'abord que le mouvement est la transition d'une attitude à une autre.

Cette simple remarque qui a l'air d'un truisme" est, à vrai dire, la clé du mystère.

Le peintre ou le sculpteur figure le passage d'une pose à une autre: il indique comment insensiblement la première glisse à la seconde. Dans son ouvre, on discerne encore une partie de ce qui fut et l'on découvre en partie ce qui va être...

Avez-vous déjà examiné attentivement dans des photographies instantanées des hommes en marche? me demanda tout à coup Rodin. Et sur ma réponse affirmative:

- Eh bien! qu'avez-vous remarqué?

- Qu'ils n'ont jamais l'air d'avancer. En général, ils semblent se tenir immobiles sur une seule jambe ou sauter à cloche-pied.

Si, en effet, dans des photographies, les personnages, quoique saisis en pleine action, semblent soudain figés dans l'air, c'est que toutes les parties de leur corps étant reproduites exactement au même vingtième ou au même quarantième de seconde, il n'y a pas là, comme dans l'art, déroulement progressif du geste.

- Je vous entends fort bien, maître, lui dis-je; mais il me semble, - excusez-moi de hasarder cette remarque -, que vous vous mettez en contradiction avec vous-même.

- Comment cela?

- Ne m'avez-vous pas déclaré à maintes reprises que l'artiste devait toujours copier la Nature avec la plus grande sincérité?

- Sans doute, et je le maintiens.

- Eh bien! quand, dans l'interprétation du mouvement, il se trouve en complet désaccord avec la photographie, qui est un témoignage mécanique irrécusable . il altère évidemment la vérité.

- Non, répondit Rodin; c'est l'artiste qui est véridique et c'est la photographie qui est menteuse; car dans la réalité le temps ne s'arrête pas: et si l'artiste réussit à produire l'impression d'un geste qui s'exécute en plusieurs instants, son ouvre est certes beaucoup moins conventionnelle que l'image scientifique où le temps est brusquement suspendu.

Et c'est même ce qui condamne certains peintres modernes qui, pour représenter des chevaux au galop, reproduisent des poses fournies par la photographie instantanée.

199

Ils critiquent Géricault' " parce que dans sa «Course d'Epsom», qui est au Louvre, il a peint des chevaux qui galopent «ventre à terre», selon l'expression familière, c'est-à-dire en jetant à la fois leurs jambes en arrière et en avant. Ils disent que la plaque sensible ne donne jamais une indication semblable. Et en effet dans la photographie instantanée, quand les jambes antérieures du cheval arrivent en avant, celles d'arrière, après avoir fourni par leur détente la propulsion à tout le corps, ont déjà eu le temps de revenir sous le ventre pour recommencer une foulée, de sorte que les quatre jambes se trouvent presque rassemblées en l'air, ce qui donne à l'animal l'apparence de sauter sur place et d'être immobilisé dans cette position.

Or, je crois bien que c'est Géricault qui a raison contre la photographie; car ses chevaux paraissent courir: et cela vient de ce que le spectateur, en les regardant d'arrière en avant, voit d'abord les jambes postérieures accomplir l'effort d'où résulte l'élan général, puis le corps s'allonger, puis les jambes antérieures chercher au loin la terre. Cet ensemble est faux dans sa simultanéité ; il est vrai quand les parties en sont observées successivement et c'est cette seule qui nous importe, puisque c'est celle que nous voyons et qui nous frappe.

Notez d'ailleurs que les peintres et les sculpteurs, quand ils réunissent dans une même figure différentes phases d'une action, ne procèdent point par raisonnement ni par artifice. Ils expriment tout naïvement ce qu'ils sentent. Leur âme et leur main sont comme entraînées elles-mêmes dans la direction du geste, et c'est d'instinct qu'ils en traduisent le développement.»

Rodin, L'Art. Entretiens réunis par Paul Gsell, 1911.



Guide de lecture

Observations:

Notez d'abord que: «le mouvement est la transition d'une attitude à une autre.» Le peintre ou le sculpteur «figure le passage d'une pose à une autre.» Ce qui compte pour l'artiste (= dans l'arT) c'est le «déroulement progressif du geste». Il faut retenir également que «c'est l'artiste qui est véridique et c'est la photographie qui est menteuse».



COMMENTAIRE



Cet entretien de Paul Gsell avec Auguste Rodin, datant de 1911, met en évidence ce que nous avons souligné ci-dessus. C'était une «conversation familière [qui] mêlait le bon sens aux aperçus géniaux sur l'art.» L'une des idées fondamentales qu'il faut retenir en parlant de Rodin est celle du mouvement, car nous devons nous rappeler que le «mouvement est le principe de toute vie» (Léonard de VincI). La dureté et la rigidité sont les signes de la mon. La flexibilité et la souplesse sont les signes de la vie. Pour Rodin «le mouvement est la transition d'une attitude à une autre.» L'artiste, peintre ou sculteur, «figure le passage d'une pose à une autre.» Pour rendre l'impression de mouvement, l'artiste ne doit pas copier "mécaniquement" la nature. Il s'agit de l'analyser, de la décomposer, de la recréer.

Si l'on examine avec attention des photos reproduisant / qui reproduisent des hommes en marche, on a l'impression que ceux-ci se tiennent immobiles ou avancent / sautent à cloche-pied, car, dans ces photographies instantanées, il n'y a pas, comme dans l'art, un «déroulement progressif du geste.» «L'image scientifique où le temps est brusquement suspendu» donnée par la photographie est fausse. L'artiste, en (re produisant l'impression d'un geste exécuté en plusieurs instants, donne une image véridique, et c'est pour cela qu'un peintre comme Géricault a raison contre la photographie, car ses chevaux paraissent courir. En réalité le temps ne s'arrête pas comme dans une photographie (scientifiquE) instantanée, bien que cet ensemble soit faux dans sa simultanéité. Mais il est vrai en en observant les parties successivement, et c'est la seule chose qui compte pour un artiste, sculpteur ou peintre: recréer artistiquement la vie et non pas la copier mécaniquement comme le fait la photographie. C'est ce qui frappe le spectateur et c'est ce qui compte / importe réellement. La conclusion qui s'en dégage («c'est l'artiste qui est véridique et c'est la photographie qui est menteuse»), résume parfaitement la conception d'Auguste Rodin sur l'art.





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