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ABDOULAYE SADJI - Maïmouna






«Maïmouna se trouvait être la grande vaincue de la

Vie, qui l'avait bafouée d'un bout à l'autre. Bafouée, vilipendée... Elle n'avait pas su dominer la Vie, lui faire donner ce qu'elle avait promis, la mettre au pas, lui faire rendre gorge.

Être le grand vaincu de la Vie, c'est la mort véritable : être et n'être plus. Etre et n'avoir pas de dépendance ; être une chose insignifiante sur l'océan mouvant du temps et de l'espace, et perdre l'espoir d'intéresser à son sort les hommes qui vous entourent... C'est la mort véritable; l'autre n'est qu'absence totale, repos, purification...

Un bruit, tout à coup, vint mettre au comble l'immense souffrance de mort où Maïmouna languissait. Et le monde réel, de nouveau, émergea, sordide, avec sa respiration, ses lueurs normales, et l'écourement de ses solitudes semées de vacarmes.



La mère Daro trouva sa fille avachie, prostrée, noyée dans ses larmes. Elle avait donc pleuré ! ! !

La lettre gisait auprès d'elle, muette de honte.

- Qu'est-ce qui t'arrive donc, Mai? questionna la mère, intriguée.

Mais, comme l'autre ne répondait pas et se mit subitement à sangloter et à hoqueter, Yaye Daro eut une intuition, prit la lettre et sortit.

Quand elle revint elle était plus furieuse qu'alarmée : - Ah ! te voilà bien propre, ma fille ! Pleure davantage ! Pleure donc, crève-toi les yeux ! ce qui arrive était fatal. Je le prévoyais. Mais nous ne sommes que de vieilles cervelles, n'est-ce pas ?... des folles à ne pas écouter ?... des gens d'un autre monde qui ne comprennent rien à la vie moderne ?... Oh ! elle est belle, la vie moderne ! Eh bien, moi je te dis que pareille chose ne serait jamais admise autrefois. Jamais !... Une jeune fille de bonne maison, trahie de la sorte, se fût jetée dans quelque puits de son quartier, au lieu que je te trouve là si couverte de honte et pleurnichant... Mais à quoi bon pleurer et que peux-tu désormais demander à la Vie ? Tu as tout donné à ton Doudou, à celui qui ne te trahirait jamais... Tout donné : ta jeunesse, ton honneur, notre honneur, ta santé ; et il t'achève par ce coup de grâce...»



(Paris, Présence Africaine, 1958, p. 246-247)



Abdoulayc Sadji est né en 1910 à Rufisquc (SénégaL) d'un père, marabout et convertisseur d'origine sérère, et d'une mère d'une famille musulmane labouc ancrée dans la tradition animiste. Ses études (école coranique, étude primaire, le lycée Faidherbe, l'École William-PontY) lui assurent la formation d'instituteur (1929), directeur d'école et Inspecteur Primaire (de 1959 à sa mort en 1961).

Léopold Sédar Senghor souligne le rôle important de Sadji dans le mouvement de la négritude par ses ouvres qui combattent la thèse de l'assimilation et de la fausse élite des « évolués ». Il a également défendu le syncrétisme religieux.



Ouvre outre des articles dans Présence Africaine ou Paris-Dakar, il a écrit des essais et des coûtes - Tounka (1952), Modou Fatim (1960), Leuk-Le-Lièvre (1953) en collaboration avec L. S. Senghor qui en assure la partie grammaticale - et deux romans, Maïmouna (1953) et Nini, la mulâtresse du Sénégal (1954). Il s'éteint le 25 décembre 1961.

Maïmouna est l'histoire d'une très belle Sénégalaise, poussée par son désir d'émancipation à quitter son village et sa tradition et à se convertir en «Étoile de Dakar». Grandeur et décadence, car séduite et abandonnée, elle redevient, après l'épidémie de variole, la vendeuse du marché de Langa, ayant perdu enfant, beauté et illusions.



Commentaire suivi



Le fragment débute par la réaction de Maïmouna à la lettre de Doudou qui tue toutes ses illusions de mariage. Abdoulaye Sadji fait le point de la situation de Maïmouna pour qui la vie d'illusion s'achève. Grande vaincue de la Vie qu'elle n'avait su assumer, qui avait trompé ses aspirations, parce qu'elle promettait mais n'avait jamais donné. Etre le grand vaincu de la Vie équivaut à la mort réelle, signifie être une morte vivante. Exister tout simplement sans point d'attache (n'avoir pas de dépendancE), insignifiante par rapport à l'immensité (océan mouvanT) de l'espace et du temps, sans désir et sans espoir d'amour. Cette mort est une mort réelle, puisqu'elle n'apporte pas, comme l'autre, absence totale, repos, purification.



La souffrance de Maïmouna se fait plus aiguë, quand un bruit la replace dans le monde réel, sordide, qui continue d'exister, avec sa respiration, ses lueurs normales, et qui ne lui offre désormais que solitude truffée de vacarmes : seule devant un monde qui n'a plus de sens.

Le tableau qu'elle offre à sa mère (avachie, prostrée, noyée dans ses larmeS) est celui d'une femme déboussolée, sans aucune volonté ou réaction, toute à sa souffrance. À côté d'elle la lettre.



Muette de honte, Maïmouna ne répond pas à la question de sa mère, redouble ses sanglots et hoquets. Très intuitive, la mère s'empare de la lettre et sort : comme elle n'a pas d'instruction et ne sait pas lire, elle va se faire lire la carte. Ayant pris connaissance du contenu de la carte, elle s'insurge, plus furieuse qu 'alarmée, contre l'attitude de sa fille.



Elle souligne l'inutilité des pleurs face à la fatalité de ce qui lui était arrivé. Elle l'avait prévu, mais ses soucis, ses conseils ne pouvaient rien devant les idées d'une jeune fille qui se considère plus intelligente (vieilles cervelleS), plus sage (folles à ne pas écouteR), plus moderne (gens d'un autre monde qui ne comprennent rien à la vie modernE), plus émancipée. La mère renvoie aux bons vieux temps (autrefoiS), aux règles et aux exigences de la tradition. La honte se devait d'être lavée (se fût jetée dans quelque puitS) et non pas subie (pleurnichanT) ; cette lâcheté (selon la mèrE) est inutile ; elle a tout donné à cet être (ton DoudoU) idéalisé (qui ne te trahirait jamaiS) : jeunesse, honneur, santé, mais aussi l'honneur de toute la famille (notre honneuR). La récompense en est ce type de mort - il / 'achève par ce coup de grâce.

Le message de l'auteur, qui souligne l'importance de la tradition, met en garde aussi contre les lacunes d'une éducation dont s'absente l'instruction scolaire, tout étant affaire d'apprentissage (par voie oralE) et d'initiation. La vie de brousse est incompatible avec celle de la ville de Dakar où Maïmouna est transplantée sans être munie de défense.



À consulter



1. Chevricr, Jacques, Littérature nègre, Paris, Colin,

1974.

2. Freynet, Alain, Maïmouna d'Abdoulaye Sadji, Paris,

Nathan/Abidjan, Les Nouvelles Éditions Africaines, 1984.

3. Kane, Mohamadou, Roman africain et tradition, Les

Nouvelles Éditions Africaines, 1982.

4. Kesteloot, Lilyan, Les écrivains noirs de la langue française, Bruxelles, 1963.



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