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Dominique Pagnier



Mansions - Poéme


Poéme / Poémes d'Dominique Pagnier





Avec l'automne, les élèves ont la couleur du doute dans l'iris; c'est le reflet rouge que donne l'érable avant sa révélation de novembre. Les plus détachés dans les affaires d'amour traitées sous le Préau, sont les mêmes qui en classe quêtent le plus durement la vérité. Le maître leur montre des éclats laissés par l'invasion. Quels barbares ont fait de la campagne une orfèvrerie du haut moyen-âge où l'azur est comme un émail sur le laiton repoussé des feuillages?



II

Pourquoi les terres d'invasion derrière les tilleuls ont-elles des lignes si pures? Peut-être pour s'en aller avec la beauté rapide de la horde. Et bientôt nous imaginerons des feuilles aux arbres comme un ramage au vide dont est fait l'ange. A présent leurs odeurs sont lavées dans les ciels un peu plus nocturnes des flaques fangeuses.



III

Une lumière étrange donne dans les écoles lorsque la lecture devient silencieuse; à l'est des livres monte une clarté qui, parce qu'elle touche les visages par le bas, les passe au clair-obscur d'un ancien charme. Les tisanes échangées sur la nef, un grand soupir lève la page sur l'amour.



IV

Dans les greniers des pensionnats, les maîtres bègues chassent les spectres qui menacent de leurs vieux ouvrages le cour et la raison des enfants. Tout est porté sur la scène de l'âtre où des flammes bleues d'automne incendient l'acte II avec son arbre gigantesque pris de murmures.



V

Dimanche après-midi, les pensionnaires marchent sur le fleuve asséché des feuilles mortes, derrière un homme de peine et d'écriture qui tâche de leur faire oublier que les arbres sont mortels. Dans l'infini des bouleaux maigres, leur exode avance vers un gros fût sombre qui garde encore très haut des lambeaux de vêture, comme un christ trop lâche pour accepter le bois du fond du sacrifice. Ce qui les guide peut être ce signe enlacé par un serpent de lierre qui fuit devant eux dans le brouillard. Au sortir du chemin, un érable porte encore sa violence jaune dans la lumière émue d'agonie, puis c'est le pré où le maître se perd.



VI

Les arbres composent des images pour édifier les élèves qui n'ont plus de famille, enfants de peu d'âme qui, rentrés au dortoir, couchent des peines énigmatiques dans leur journal intime, en marquent la page d'une feuille sèche d'érable prête à se rompre.



VII

Attentifs aux machines qui, sous la caresse d'un soleil intérieur, chantent comme un Memnon, les élèves perdent peu à peu le geste dépouillé d'écrire que leur inspirent des arbres si près de la vérité. Chaque Saint-Jean d'hiver, la campagne leur envoie un maître qu'ils pervertissent, silhouette christique qui se cherche dans l'indigente nativité formée autour d'elle par les platanes, les tilleuls et les robiniers du Préau.



VIII

Après l'odeur dont les imprègnent leurs jeux dans la jonchée, ils prennent celle plus hivernale de l'acier et de ses copeaux bleus. Ceux que marque à la tempe le battement d'aile bref et longuement mortel du nocturne - tache de suif ou présage d'une ouvre qui ne viendra plus - ont leurs livres ouverts, page dorée, page bleue comme la place d'un combat entre la lampe et la fenêtre.



IX



Où songeait un vieux château allégorique, l'école tremble aussi longtemps que dure au mur, au-dessus du tableau, la souillure d'un crucifix absent. Puis les classes s'estompent avec leurs visages parfaitement humains dans les noces chimiques de l'âme et du fer.



X

Pour sauver un couple d'enfants, il faut donc qu'un grand arbre nocturne se perde et si c'est un tilleul une main malheureuse doit en cueillir les étoiles odorantes. Par l'infusion, les arbres seront abstraits et leur charme d'hiver unira deux âmes.



XI

Ces personnages d'odeurs que laissent s'épuiser derrière elles les passantes lorsqu'elles se dépêchent sous la verrière des branchages nus d'une place, nous les traversons pour y mêler nos parfums de fumée, et cela donne des créatures fabuleuses. Non moins limpides sont les présences sur la fine nef de brume qui s'avance à peine, en contrebas, sur un bras mort de la vieille Seine; leurs parfums existent encore un peu vers novembre afin que soient refaits, alors sans les malheureuses, de très anciens gestes d'une passion, avec des jus d'herbes et quelques tremblements.





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Dominique Pagnier
(1951 - ?)
 
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