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André Frênaud



Vieux pays - Poéme


Poéme / Poémes d'André Frênaud





Les légendes se forment sous nos pas.
Déjà la nostalgie embrume les éclats d'un pays qui se défait, va l'anéantir pour le parfaire plus poignant.
J'ai trop tardé à l'honorer, il est temps.
Homme de l'avenir, il te faudra le connaître en rêve, celui que nous avons aimé dans nos yeux, sous nos mains.



Monde premier, reconnaissable encore en l'aujourd'hui.
J'aime ceux qui
P écoutent et qui savent l'entendre, ceux qui ont gardé l'oreille de leur enfance, les seuls héritiers d'eux-mêmes dans un souffle qui vient de loin.



Ils avancent entraînés par des voix qu'ils retrouvent.
Ils vont se tenir dans une fête à ses derniers feux.
La bienveillance derrière chaque tournant devinée n'avait pas menti.
Voici qu'on tire l'eau à la pompe, la soupe cuit avec des poireaux et le pain devant les collines étagées est rompu, l'homme de l'ancien pacte est là toujours, grave et qui s'affaire car il est tard.



Nous qui sommes revenus quelquefois dans cet enclos que l'ombre embellit -

après tant de passages la conscience est lasse,

alourdi notre élan trouve ici un répit -

voici, comme un arc-en-ciel d'après nos désastres,

que des yeux de l'homme fidèle, de ses mains,

s'éveille et nous emporte parmi elle une gloire

où les prises des racines et l'impatience de lumière

composent une réconciliation timide.
Oh!
Sachons

accueillir le langage de l'autrefois dans l'âme bouleversée !



Pour gagner sa place dans l'harmonie violente

il a pris parti pour la terre,

le grand frère enfantin qui nous a précédés.

Dans la compagnie de la douleur qui ne démordra pas,

dans la modestie de son courage avec confiance,

chaque jour il renouvelle sa réponse

aux paroles de la terre.

Oh !
S'il est en accord avec elle...

Mais le sait-il même, il est si simple !

Il ne démêle pas ses tourments, il se dérobe.

Il sait seulement qu'il faut pâtir et tenir ferme,

au-dessus de l'abîme entrevu, ici-bas,

dans l'accomplissement perpétuel de ses tâches,

dans la lourde camaraderie des saisons de sa vie.



La difficulté des nouds dans l'aubier jeune, la varlope adroite des compagnons, les longs chemins couronnés par le chef-d'ouvre : une table, un escalier, une charpente.
Un maillon à la chaîne et des chansons à boire.
O rochers et alignements des blocs des carriers, jeux d'équerre et rites inquiets, maîtrise honnête.
O travail et douleur et vaillance, ô misère, fierté des innocents dans la chaîne et la gaieté du diable, débonnaire !



Il appareille sa vie comme on bâtit un mur, avec des sentiments droits et des désirs inquiets, avec des égards pour chaque pierre et de la bonhomie, avec des projets et des fumées, avec des ruines, avec ce qui dure peu, qui est éternel.

L'amour se meurt, sinon la mort le résilie.

Ils s'aimaient tant...
La terre est noire et tout est bien...

Tout est mal!
Est-ce qu'il l'ignore?
Il respecte l'ordre.

Serviteur trop docile, sous les gestes de la soumission

un secret retenu chuchote dans son langage,

et jusqu'auprès des reposoirs solennels je crois que

brûle un vent réfractaire, mêlé à l'adoration.

D'où sort son
Dieu?
Il l'a tiré de ses marais,

de l'eau dangereuse où soufflent les monstres,

dérivation de l'unique source qu'il devine,

influant tout désir, pure et sans nom...

Intime ennemi dont il ne prend pas la mesure,

maître ou esclave de l'énergie interdite,

son regard lui forme un visage et son élan l'exhausse.

Il le couronne pour s'exorciser, pour pouvoir vivre ici.

Haut fronton édifié au-delà des nuages pour sommer les ouvres de son effort patient, caution de la bonne mort sur la vie difficile, sceau pour les calamités et les exploite, cet homme avait créé
Dieu pour sa gloire, pour sa récompense et par fierté.

Comme la vie peut devenir une clairière habitable jusqu'à repousser l'ombre qui s'approche !
Rival des rivières élancées et des montagnes qui le soir venu pâlissent et l'apeurent,



à l'école de ce qui l'émeut il forme de la beauté pour se faire l'âme plus fine et pour la protéger.
Les meubles luisent auprès de lui, dans la chambre où sont passés les grands-parents qu'il retrouvera.
Donateur dans la compagnie des autres, donateurs, à l'appel d'un lointain qui s'accomplit indéfiniment au long de la rêverie où quelle rumeur, émergeant du profond, promet la mer, il regarde les armes de son courage : la toiture et le feu, la charrue, le cadran.

Et moi je l'ai connue aussi dans mon enfance,

la beauté sortie de la main pour notre usage familier,

agréée dès l'aube par la nature...
L'enfance

a prolongé les frontières d'une contrée qui fut,

accueillante partout selon le lieu et la lumière.



Les formes qu'approfondit un éclat de l'origine, les rapports saisis dans les vieux gestes adroits, avec les sortilèges naïfs, les recettes pour conjurer appartiennent à ceux qui les aiment encore parmi notre

âge, éclaircies brûlantes, sourires d'une alliance qui a duré, bouffées d'une patrie qui me préserve et que je comble au cour réservé d'une image.

Les déploiements et les encoignures,

la maison où l'on descend et où l'on monte,

avec le grenier qui inquiète et la cour pour rassurer,

l'arrangement de la verdure et du soleil fidèle,

avec les pierres, avec la lune et la pluie fine, avec le vent,

la maternelle maison où l'on est bien.

J'ai participé à la douceur, à la colère,

aux prestiges entrevus parmi les savoirs quotidiens.

Vieux pays en lutte, avec des manières avenantes...



Mêlé aux bêtes pensives, aux roues en mouvement, j'ai attendu dans son attente, j'ai connu la plénitude que me promettait dans le défaut émouvant une saveur incomplète.





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André Frênaud
(1907 - 1993)
 
  André Frênaud - Portrait  
 
Portrait de André Frênaud
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